Differdange, à moins de trois semaines de sa reprise, a encore quatre réfractaires à la vaccination. Et son président, Fabrizio Bei, s’agace.
La nouvelle loi voulue par le gouvernement ne laissera, à la reprise, plus aucune chance de jouer aux non-vaccinés. Dans ce contexte particulier, chez le club le moins vacciné du pays à l’annonce de ces nouvelles mesures, Differdange, tout prend une ampleur un peu plus dingue qu’ailleurs. Et ce n’est pas son président, Fabrizio Bei, lui-même frappé par le covid depuis quelques jours et qui avoue en baver des ronds de chapeau, qui dira le contraire.
Les rumeurs entourant l’un de vos joueurs stars, Aurélien Joachim, n’en finissent plus de ne pas être contredites. Lui qui s’est montré si hostile à la vaccination depuis des mois, se pliera-t-il aux injonctions gouvernementales?
Fabrizio Bei : Je ne sais pas. Si vous l’avez au téléphone, vous lui direz de me rappeler pour me le dire. Tout ce que je sais, à l’heure actuelle, c’est que sur les douze ou treize non-vaccinés qu’il nous restait, seuls quatre joueurs n’ont pas encore donné de nouvelles et n’ont pas dit ni oui, ni non. Enfin si : un des quatre m’a répondu pour me dire qu’il n’était pas encore décidé.
Votre position, vous qui avez été l’un des présidents les plus décidés dès le début de la pandémie à privilégier la santé avant toute autre chose?
Ma position? Si je n’avais pas été vacciné, je ne serais peut-être pas en train de vous parler, là, maintenant, mais carrément en réanimation. Ceux qui n’ont pas le vaccin à la reprise de l’entraînement le 3 janvier, je leur ai dit, tout simplement : ne venez pas. Parce que c’est la loi. J’accepte la liberté de décision de chacun mais c’est la loi, on n’a plus le choix justement.
Cela risque-t-il de fragiliser votre équipe dans sa course à l’Europe?
(Il s’agace) Eh bien on jouera avec d’autres joueurs. Ceux qui ne veulent pas, je ne peux pas les forcer et on n’aura pas d’excuse : si les quatre joueurs qui ne nous ont encore rien dit refusent finalement de se faire vacciner, il nous restera encore 20 joueurs. Les autres nous laissent tomber? Ils ne veulent pas se faire vacciner? On passe à autre chose. Plus on parle de ces joueurs, plus ils vont se dire « ah tu vois, si je ne vais pas me faire vacciner, tu te retrouves dans l’embarras ».
Mais aucun n’est encore venu vous voir pour vous, dire, formellement, « non, je ne le ferai pas!« .
Non. J’en ai parlé devant tous les joueurs après le match contre Mondorf et personne n’est venu me voir. Bon, il n’y avait pas Aurélien (NDLR : Joachim). Et après, ça, une majorité sont allés voir notre doc pour commencer les vaccins. Sauf quatre dont on ne sait rien, pour lesquels on a reçu aucun document. C’est désolant. Mais que puis-je faire?
Difficile de lancer un recrutement hivernal dans ces conditions, non? Parce qu’entre vos besoins effectifs et les besoins qui pourraient naître de la défection de certains joueurs…
Je ne veux pas pleurer. Cela fait partie d’une saison. Forcément, nous avons des titulaires qui sont concernés mais je vous avoue que moi qui suis passé à la casserole, moi qui suis passé par des trucs, qui en bave, qui suis fatigué à tout bout de champ, j’en ai ras-le-bol! Ça nous fatigue de répéter tous les jours « tu pourrais aller chez le médecin, s’il te plaît? ». Eh! Oh! C’est pour ta santé mon gars! Maintenant, c’est à eux de voir s’ils veulent arrêter le football! L’un des quatre m’a dit « mais si la loi change dans quelques mois, peut-être que je pourrais… ». Moi, je lui réponds « et si elle ne change pas ». Et puis si elle change, ce sera en mars. Et moi, il est hors de question que j’attende mars : je dois prendre deux joueurs cet hiver et le 3 janvier, en fonction de qui sera vacciné ou pas, on agira. Comme on dit en Italie, qui va à Rome perd sa chaise. Si en mars, la loi change mais qu’un autre joueur est arrivé à votre place en étant vacciné, tant pis pour lui! Je suis peut-être le seul qui dit tout haut ce que tout le monde pense tout bas, mais je ferais la même chose dans mes entreprises!
Imaginez-vous que ce puisse être la fin de carrière d’un Aurélien Joachim?
Pfff, non mais regardez Kimmich (NDLR : le joueur du Bayern Munich, ouvertement hostile à la vaccination), il ne veut pas, il ne veut pas, il le déclare à la télé et maintenant, il n’a plus de souffle. Alors moi, je respecte ce qu’ »Auré » a décidé ou va décider, mais moi, c’est au club que je dois penser. Ce que je peux dire pour Auré, c’est qu’il ne mérite pas cette fin de carrière. Mais je ne peux pas l’emmener de force chez le docteur et lui mettre moi-même la piqûre dans les fesses. Enfin non, dans le bras…
Julien Mollereau