Dejvid Sinani, meilleur passeur de la dernière saison avec le Fola, est en train de s’installer tranquillement à Dudelange. Et même au footgolf, il a une longueur d’avance…
Pourquoi le F91 plutôt que de rester « tranquillement » au Fola?
Dejvid Sinani : Je voulais m’offrir un nouveau challenge. J’ai eu mes belles années au Fola, avec deux titres de champion ou en tout cas ce que moi je considère comme deux titres de champion (NDLR : le Fola a terminé en tête de la saison 2020, qui n’a pas été homologuée par la FLF) et j’avais besoin de me prouver que je pouvais faire de belles choses ailleurs.
Rien à voir avec le fait que votre petit frère, Danel, a marqué le club dudelangeois de son empreinte en l’emmenant deux fois en phase de groupes de l’Europa League ?
Si, Danel, aussi, a eu une influence sur ce choix. Il a passé de superbes années dans ce club, m’a parlé de l’ambiance, des infrastructures d’entraînement, les plus belles du pays, et cela m’a conforté dans mon choix. En plus, je connais énormément de joueurs là-bas et ceux que je ne connais pas, j’ai appris à le faire en stage (NDLR : à Sochaux). Une équipe formidable et un staff formidable.
Le stage, c’est le moment du bizutage.
(Il rit) Pour ça, il n’y a plus de trac depuis longtemps. J’ai chanté un truc dans ma langue (NDLR : le Serbe), celle dans laquelle je me sens le plus à l’aise. Bon, les Agovic, Muratovic, Bojic… eux, ils ont compris, mais les autres ont juste pu me noter sur ma belle voix.
À 28 ans, c’est toujours aussi important, ces petits moments d’avant-saison ?
On a fait du team building le week-end passé, en marge de notre match à Sochaux (NDLR : défaite 3-0). On a essayé le footgolf. Je ne veux pas me vanter, mais j’étais le meilleur. C’est le même système qu’au golf, avec un nombre de coups théoriques à chaque trou. Tu fais ton parcours et tu comptes, avec des trous de 90 à 150 mètres. C’est assez ludique. Moi, j’ai fini en 72, légèrement au-dessus du total théorique. Bon, si j’avais fait moins, j’arrêtais le foot et je me faisais professionnel de footgolf…
Et au niveau du terrain ? Cela se passe-t-il aussi bien ?
Pour le moment, il est surtout question de découvrir les envies du coach, d’observer comment les coéquipiers bougent, font leurs appels. Qu’on développe des automatismes.
Pour un meneur, un dernier passeur, c’est une période cruciale ?
Oui, c’est important. Vous imaginez si j’essaye de jouer dans les pieds d’un mec qui prend généralement la profondeur ? Ou si je ne joue pas sur son bon pied ? Pour une belle alchimie, il est important de se découvrir vite.
C’est plus à moi de m’adapter au F91 que l’inverse
Partez-vous du principe que Carlos Fangueiro vous demandera exactement la même chose que ce que vous demandait Sébastien Grandjean au Fola ?
Je ne saurais pas encore vous dire avec certitude, mais pour le moment, en tout cas, je joue exactement au même poste. À mon poste.
Vous remplacez un peu la patte gauche de Mario Pokar (NDLR : parti au RFCU) au cœur du jeu. Il évoluait, lui, un cran plus bas lorsqu’il était sur le terrain. Est-ce que cela va faire bouger le centre de gravité de l’équipe et faudra-t-il au F91 un peu s’adapter à vous ?
Non, c’est plus à moi à m’adapter au F91 que l’inverse. Et ça ne me pose pas de problème. On verra bien comment je serai utilisé.
Votre ancien club du Fola est de nouveau victime d’une petite saignée au niveau de ses joueurs cadres. Son désormais ex-président, Mauro Mariani, a promis que l’équipe s’en remettrait comme elle s’en était remise en 2019. Votre avis ?
Moi aussi je pense qu’ils vont s’en remettre. Les dernières années déjà, on s’en était bien sortis et je ne vois pas pourquoi cela changerait. Comme l’a si bien dit le président, personne n’est irremplaçable, même pas moi.
Le président a aussi confirmé que le Fola ne ferait plus jamais dans la surenchère pour conserver à tout prix des joueurs cadres en fin de contrat. Vous le comprenez ?
C’est le club qui sait le mieux comment il doit fonctionner, sur quel chemin il doit aller. Mais quand je vois les résultats, pourquoi changer sa politique dans ce domaine ? Pour le moment, ça a l’air de plutôt très bien fonctionner.
Malgré vos excellentes performances au Fola, vous n’avez pas été appelé en sélection. Ça vous titille quand même un peu ?
(Il hésite) Comment vous dire ? J’ai donné le meilleur de moi-même. La saison passée était ma meilleure. Mais je ne peux pas me sélectionner moi-même. Je ne suis pas déçu, parce que tout ce qui comptait pour moi, c’était d’être champion. Ce n’est pas à moi de faire ce genre de choix. D’ailleurs, mon frère et moi, on n’en parle même pas.
Entretien avec Simon Butel
Dejvid Sinani est à un niveau extrêmement élevé depuis sa dernière saison à Mondorf, en 2017/2018. Il a d’ailleurs égalé son record établi à cette occasion de 13 passes sur une saison, en mai dernier. Le bilan est assez faramineux : sur les quatre derniers exercices, en 86 apparitions en BGL Ligue, il a distribué… 42 passes décisives, c’est-à-dire bien plus que son nombre de buts, malgré les 16 inscrits en cette saison de titre pour le Fola : 29. Mais 42 passes, c’est pratiquement une tous les deux matches. Peut-il encore faire mieux à Dudelange? «Ah le but, c’est toujours de faire mieux! D’en faire une de plus. Mais on va dire que ce ne sera pas facile. Et le poste auquel j’évoluerai jouera énormément.» Mais avec de telles statistiques (une passe toutes les 151 minutes passées sur le terrain, une implication sur un but toutes les 89 minutes), Fangueiro peut-il faire autrement que de calquer une partie de sa stratégie sur lui?
J. M.