Charles Schaack, le patron de l’arbitrage au Grand-Duché, est lui aussi heureux que cela reprenne. Et espère que les hommes en noir vont bien relancer leur métier.
Le championnat reprend dans 48 heures, avec des joueurs qui, à en croire leurs staffs, vont souffrir. Les organismes, remis à un niveau très aléatoire par trois semaines minimalistes d’une préparation perturbée par le temps, vont avoir du mal. Mais au moins les joueurs ont-ils pu retrouver l’intimité du vestiaire. Les arbitres, eux, n’ont vraiment retrouvé les leurs qu’hier soir. Comment vont-ils au moment de reprendre le sifflet ? Nous avons posé la question à leur patron, Charles Schaack.
Dans quel état est, aujourd’hui, le corps arbitral luxembourgeois ?
Charles Schaack : Les arbitres vont assez bien. Ils se sont entraînés seuls tout l’hiver grâce au programme de notre préparateur physique, mais on procédera à des tests ce jeudi pour observer la réalité. Nous les avons suivis sur l’application internet Strava. On mesure leurs pulsations, leur condition et en ce qui concerne les 25 arbitres capables d’officier en BGL Ligue, les chiffres sont bons. Mais le vrai test, c’est le test FIFA.
Ça, c’est pour le corps. Mais la tête ?
Moralement, nous allons voir ça ce soir (NDLR : l’entretien a été réalisé mardi), mais on se doute qu’il faudra du temps pour être pleinement dedans après une aussi longue trêve.
Vous n’avez pas cherché à envoyer des arbitres à l’étranger pour garder un petit pied dans la réalité ?
Nous n’avons eu aucun échange avec d’autres fédérations, non. En raison des prescriptions des autres pays, dans lesquels les arbitres doivent se faire tester plusieurs fois. Mais on n’a pas ça au Luxembourg. Alors oui, nous avons des partenariats avec Malte et l’Albanie, deux pays qui sont un peu loin. On pourrait envoyer des arbitres là-bas si on voulait, mais il faudrait payer les voyages. En fait, ces derniers mois, il n’y a eu qu’Alain Durieux qui a été arbitrer une fois à Nancy, en Ligue 2 (NDLR : le 12 décembre, Nancy – Auxerre, 2-2). Mais nous aussi, de notre côté, nous avons suspendu toutes les venues d’arbitres étrangers jusqu’à ce que la situation se soit normalisée.
On discute beaucoup des tests pour les joueurs ces derniers jours. Vos arbitres seront-ils testés ces prochaines semaines ?
Ils ne le seront pas. Ce n’est pas prévu et cela n’a jamais été demandé par le ministère des Sports.
Des tests pour les arbitres ?
Non, cela n’a jamais été demandé par le ministère des Sports.
Craignez-vous des problèmes d’effectif à la moindre contamination qui bloquerait potentiellement des trios d’arbitres ?
Ah ça, les effectifs, oui, cela nous cause un peu de souci. C’est pour cela que nous faisons bosser tout le monde en groupes séparés. En général, de toute façon, les cours sont en ligne. On essaye au maximum de distancier tout le monde. Nous voulons absolument éviter un grand groupe de contaminés. Même si avec une quinzaine d’arbitres capables d’officier en DN et huit matches à distribuer chaque week-end, ça devrait aller. Mais si jamais on a un problème, alors on pourra toujours se tourner vers l’étranger ou même vers les divisions inférieures. Des arbitres qui ont déjà officié en PH devraient pouvoir, aussi, siffler quelques matches en DN.
Même s’ils nous critiquent, on aime les spectateurs
Le calendrier, très chargé, sera-t-il un problème pour le corps arbitral ?
Cela m’inquiète pour les disponibilités en semaine, mais pas pour le physique et le mental, car la plupart de nos arbitres de l’élite sont habitués à siffler un ou deux matches de plus par semaine.
Les terrains risquent d’être très gorgés d’eau, voire potentiellement difficilement jouables avec l’accumulation des précipitations. Pourtant, la DN manque de temps et doit avancer à marche forcée. Vos arbitres ne risquent-ils pas d’être mis sous pression parce qu’il FAUT jouer ?
Nous n’avons absolument aucune pression. Il n’y a même pas eu une seule discussion sur le sujet, ni en commission arbitrale ni au conseil d’administration de la FLF. Personne n’interviendra sur les décisions que les arbitres prendront, comme d’habitude, forts de leur expérience et toujours depuis le terrain.
Ça ne les empêchera vraisemblablement pas de subir quelques petits coups de pression. Au moins pas des spectateurs pour une fois, puisque les huis clos seront stricts.
Ah ça, ce sera très calme. C’est dommage, parce que cela fait partie du jeu et, des fois, les spectateurs aident à maintenir les arbitres éveillés. Non, non, c’est négatif, cette absence. Même s’ils nous critiquent, on aime les spectateurs. Là, au moins, les arbitres de touche n’auront pas, en plus, à gérer les spectateurs susceptibles de se masser le long des mains courantes, ce qui n’est pas autorisé en ce moment.
Les arbitres ne se battent-ils pas un peu pour avoir le droit d’y retourner, attendu que les places sont limitées ?
Mais… Mais ils doivent toujours se battre ! C’est un sport, une compétition pour eux aussi ! Mais un arbitre, ça travaille dans la camaraderie, dans le respect mutuel. Il y aura assez de matches pour tout le monde vu le calendrier, puisque, hormis les trois arbitres FIFA, qui en ont peut-être un peu plus pour se maintenir à un rythme élevé, tout le monde reçoit environ le même nombre de rencontres à arbitrer sur une saison.
Je dois accepter, et respecter, le fait que les clubs aient jugé que c’était un surcoût (NDLR : d’avoir des juges de touche en L1 dames) mais ça aurait quand même été bien pour les arbitres des divisions inférieures.
Il a été très brièvement envisagé de faire évoluer les arbitres avec des assistants en Ligue 1 dames, tant que les autres divisions n’ont pas repris. Regrettez-vous que cela ne se soit pas fait ?
Là, à l’heure actuelle, je dirais oui. Mais l’on sait aussi que cela aurait été physiquement impossible de le faire une fois la situation revenue à la normale. Je dois accepter, et respecter, le fait que les clubs aient jugé que c’était un surcoût, mais ça aurait quand même été bien pour les arbitres des divisions inférieures.
Impossible d’en recaser certains en futsal, bien évidemment ? Les deux sports sont trop différents ?
Nous n’avons enregistré aucune demande, déjà. Ensuite, un certain nombre d’arbitres ont déjà les deux compétences et il n’y a pas de manques en futsal. Mais c’est un cursus spécial, très spécial même. On ne devient pas arbitre de futsal comme ça.
Pas mal de clubs s’inquiètent aujourd’hui de savoir s’ils ne vont pas perdre énormément de bénévoles dans cette pandémie du coronavirus. Vous inquiétez-vous, vous aussi, de dommages collatéraux dans l’arbitrage ?
Ah mais certains arbitres ont déjà décidé d’arrêter. C’est un nombre qu’on ne peut pas encore chiffrer et donc il n’est pas encore utile de dramatiser, mais voilà, c’est un fait : pendant la crise, certains ont trouvé leur bonheur ailleurs. Et c’est certain, on va en perdre d’autres. La situation était déjà difficile, elle ne va pas s’améliorer. Et on verra après si cela a un impact sur le recrutement. Mais rien que la promotion actuelle, qui compte 18 arbitres-aspirants, est bloquée. Cela fait un an qu’on n’a pas pu les mettre sur un terrain, puisque les catégories jeunes sont à l’arrêt. Ils ont passé leur théorie, mais la pratique… Dans ces conditions, cela risque d’être difficile d’en persuader d’autres de nous rejoindre.
Arbitre-t-on de la même façon sous Covid ?
Les vestiaires des arbitres ne seront plus ouverts qu’à une personne par club maximum. Plus de poignées de mains avant le match, comme depuis la reprise. Et on va demander aux joueurs de ne pas trop approcher les arbitres, même si l’on sait que dans l’émotion du jeu… Au niveau des règles, rien de particulier. Si ce n’est que nous devrons être attentifs aux comportements antisportifs qui pourraient être liés à cette situation sanitaire.
Entretien avec notre journaliste Julien Mollereau