Ce Fola est fort. Partout. Le nouveau leader se fait décrypter par l’un de ses grognards, Cédric Sacras. Intéressant et drôle.
Le défenseur latéral du Fola Cédric Sacras l’avoue franchement : ses coéquipiers et lui sont d’autant plus ravis d’avoir pris la première place du championnat, dimanche, qu’ils craignent une fin de saison anticipée, mais aussi que le souvenir de cette place de leader qui ne leur a pas permis d’être sacrés, la saison passée, reste vivace.
Cette première place, l’avez-vous un peu fêtée? Zachary Hadji a dit que vous vous étiez déplacé à Differdange pour ça, mais Sébastien Grandjean, votre coach, a assuré que ce n’est pas quelque chose que vous aviez en tête…
Cédric Sacras : Bon, on ne va pas le cacher, entre joueurs, on savait très bien que si on l’emportait avec deux buts d’écart, on serait premiers. Alors oui, ce n’était peut-être pas l’objectif, mais on l’avait dans un coin de la tête. Surtout quand tu mènes 2-0 après huit minutes. On s’est tous dit qu’il fallait absolument qu’on tienne ce score. Alors cet objectif n’était peut-être pas dans la tête du coach, mais c’est un gagnant, comme nous donc il devait quand même se le dire un peu…
Vous avez bien fait de jouer alors! Parce que vous n’étiez pas heureux, vous, personnellement, en reconnaissant ce terrain…
(Il rit) Non, je n’étais pas chaud, en effet. On était en train de tâter le terrain et là, on voit qu’il y a tout un côté gelé et le milieu était tout mou. Rien qu’au niveau des crampons, on ne savait pas quoi faire. Un terrain catastrophique.
Il s’agit d’un match référence malgré tout?
Non. Notre match-référence, c’était contre Wiltz. On gagne 0-2 (NDLR : 1-2, en fait, c’était le 21 octobre), mais on aurait pu gagner 5 ou 6-0. Le coach continue encore aujourd’hui à le prendre en exemple dans ses causeries. Au contraire, contre Differdange, malgré le score, j’ai trouvé qu’on avait eu un peu plus de mal que d’habitude. Disons qu’on a surtout été réalistes.
Parlons de votre attaque : Zachary Hadji, 24 ans, est-il sur les traces de son grand frère, Samir, une référence offensive de la dernière décennie au Fola et dans le pays?
« Zac », je le connais depuis 10 ans, quand on était à Metz ensemble. Son frère et lui n’ont pas le même style. « Zac » est plus fin techniquement. Il sait travailler dos au jeu, il est d’ailleurs au-dessus du lot dans ce domaine – même si son frère faisait ça très bien –, prendre la profondeur… Oui, il est sur les traces de Samir et il pourrait même le dépasser. Vous savez, en début de saison, je lui ai fixé quinze buts comme objectif et lui m’avait répondu qu’il serait déjà content d’en mettre dix. Il ne pensait pas en mettre plus de dix! Et là, hier soir (NDLR : dimanche), il a fini par m’avouer qu’il n’avait jamais mis un seul triplé en match officiel de toute sa carrière. Ça montre à quel point il est en confiance.
Correia et Sinani aussi, le sont.
Correia a passé un cap. Il est passé dans le monde des adultes depuis l’année dernière et avec son centre de gravité assez bas, c’est compliqué de lui prendre le ballon. Combien il mesure? 1,65 m? Mais il a très bien pris la relève depuis que Bensi s’est blessé. Quant à Sinani… ce gars-là, il a une main à la place du pied. Un simple coup franc, avec lui, c’est une occasion de but. Il a une vision du jeu au-dessus de la moyenne. Et puis ce qui lui arrive est mérité parce que c’est le joueur, chez nous, qui court le plus sur un terrain. Contre Rosport, il est sorti à la 80e minute et il avait déjà fait 12 kilomètres!
Nous, on se surnomme les champions du Covid pour en rigoler
On pensait que c’était déjà ce que faisaient Pimentel et Freire dans l’entrejeu…
Non, ce ne sont pas eux d’après nos GPS. Contre Rosport, Dejvid avait fait quelque chose comme 25 sprints. Après, ça n’empêche pas nos milieux de terrain de courir énormément, ce qui nous facilite la vie, derrière. Grâce à eux, on concède quand même peu d’occasions de but. Dans la tête, ça aide de se dire que si on ne prend pas de but, on va gagner le match. On a quand même inscrit trois buts en moyenne par match et il n’y a que sur une rencontre qu’on n’a pas marqué. C’est une force immense.
Puisqu’on parle de force : on aurait tendance à oublier que vous êtes le champion putatif du dernier championnat. Ça vous reste encore en travers de la gorge?
Entre nous, on se surnomme les champions du Covid pour en rigoler. Bon, ça nous a permis d’aller en Ligue des champions. On a quand même eu droit à ça. Mais ce serait con de finir une deuxième fois premier et de ne pas être champion une deuxième fois. La saison passée, la fédération aurait pu faire comme cette saison, valider le championnat après la phase aller, mais j’imagine que tout est arrivé trop brusquement. Là, encore ce week-end, on se disait que tout pourrait s’arrêter mercredi, quand on aura joué quinze matches. Apparemment, le programme reste en place, mais c’est vrai qu’à partir de maintenant, chaque match peut être le dernier, donc c’est important de rester devant.
Et donc d’avoir un Cédric Sacras performant.
Sylvio (NDLR : Ouassiero, son alter ego du couloir droit) est à trois passes décisives, moi à deux et on a un petit challenge lui et moi depuis qu’on a regardé un match du FC Barcelone au club-house, dans lequel Sergi Roberto a fait une passe décisive à Jordi Alba. Depuis, on rêve de refaire la même chose, entre défenseurs latéraux. Juste pour la beauté du geste. Cela a failli arriver contre Strassen mais j’ai croqué…
Il y en a un qui ne croque pas beaucoup en ce moment, c’est votre ancien concurrent au poste, Mehdi Kirch, qui s’éclate au F91…
Je l’ai un peu charrié, lui qui marque tout le temps en ce moment, quand il a marqué contre son camp (NDLR : contre Rodange). Son coach l’a installé à un poste fait pour lui, dans ce 3-5-2. Nous aussi, au Fola, on a fait des tests en 3-5-2 et 3-4-3 en amical et ça me conviendrait à merveille. Je pense avoir les qualités d’endurance pour ça. Mais on est restés sur une défense à quatre qui nous convient très bien. Après tout, c’est ce qui nous avait rapporté le titre la saison passée, même si c’était le « titre Covid »…
Entretien avec Julien Mollereau