Le Fola Esch, au sujet duquel on peut se demander s’il ne continue pas de nourrir un petit complexe face au F91 malgré son sacre en 2013, a-t-il mûri ?
Depuis une semaine, Jeff Strasser a dégainé ce que les hommes politiques du XXI e siècle appellent les «éléments de langage». On ne l’avait pas encore vu, au Luxembourg, s’appliquer à faire passer un message aussi méthodiquement.
Dimanche soir, sur les hauteurs du stade Op Flohr, à l’issue d’une démonstration magistrale face au CSG (1-5) : « Je salue les qualités mentales de mes joueurs. Ils ont montré qu’on avait grandi, qu’on avait mûri. » Puis vendredi après-midi, à 48 h d’un match qui pourrait être celui du titre mais qu’il faut, encore une fois, jouer contre le F91 : « Il y a chez certains en particulier, mais aussi dans toute l’équipe, un comportement général, un langage corporel qui te fait remarquer que ça va mieux. »
Ses phrases ne sont pas anecdotiques. Elles arrivent un an après la déculottée de la grande finale de la saison 2013/2014, perdue 3-0, qui a vu le Fola sombrer mentalement au stade Jos-Nosbaum.
Venu pour ne pas perdre et en choisissant de se passer de son seul vrai patron moral, Tom Schnell, le club doyen y avait abandonné son titre et encaissé de sévères critiques sur sa fragilité psychologique.
Car si l’on peut être plus beau que quiconque à voir jouer et passer toute la saison devant au classement, ne pas être champion au final relève de l’évidente faute de goût.
Cela, au moins, n’arrivera pas dimanche. En résistant au retour d’un F91 transfiguré mais qui s’est lancé dans sa course-poursuite avec six points de retard en février, le Fola, en conservant quatre unités d’avance, a gagné quelque chose d’inestimable avant cette nouvelle finale pour le titre : le droit à l’erreur.
Qu’il craque encore un jour, où être simplement plus fort, lui garantit la couronne et il ne sera pas forcément pardonné par les puristes, qui aimeraient sûrement le voir enfin prendre ses responsabilités dans les matches décisifs.
Mais au moins restera-t-il en position de force pour le titre. Mais il va de soi qu’en finir ce week-end aurait une portée symbolique qui lui ferait sans doute passer un cap.
Et c’est bien parce qu’il y a eu, début avril, un Fola – F91 de quarts de finale de Coupe qui s’est très mal terminé pour les Eschois (1-3), dominateurs pendant 25 grosses minutes avant de s’écrouler et de se montrer incapables de renverser la tendance, qu’on peut encore douter de ce que professe Jeff Strasser.
C’est de bonne guerre, dans l’autre camp, on joue aussi sur la corde psychologique. Mais en la tendant dans l’autre sens pour être bien sûr qu’elle revienne en pleine poire du Fola. « C’est nous qui avons un avantage sur eux, jure Sébastien Grandjean, puisque pour nous, les choses sont claires : si nous faisons ne serait-ce qu’un match nul, ils sont champions! Donc, on doit gagner et eux ils ne doivent pas perdre.
Que vont-ils donc faire? Attaquer ou défendre? Aligner Stefano Bensi ou pas? » Poser ces questions, c’est partir du principe que le Fola ne sait toujours pas y répondre.
Il faudra en effet beaucoup de choses au leader pour redevenir le patron de la DN dès ce week-end. « De l’engagement, du sens tactique, de la maîtrise », annonce Jeff Strasser. Tout ce qui lui a manqué il y a un an.
Julien Mollereau