BGL LIGUE (16e JOURNÉE) Le F91, moins enclin à se laisser délester de joueurs cadres, accueille son dauphin, un Progrès (encore) en reconstruction parce que lui laisse les portes ouvertes. Comme de plus en plus de clubs au pays.
Deux mois plus tard, rien n’a changé : la plupart des clubs de BGL Ligue estimaient déjà fin décembre que le favori désigné pour le titre après la phase aller s’appelait F91 et ce ne sont pas ses matches amicaux contre le CSKA Moscou (victoire 1-0) ou le Molde FK (défaite 1-0 après avoir dominé tout le match) qui vont faire changer qui que ce soit d’avis. Mais ce ne sont pas deux fois 90 minutes sur une pelouse espagnole qui désignent Dudelange pour le sacre, fin mai. Non, ce sont plutôt six semaines de coulisses, à accumuler des preuves lors d’un mercato qui a dessiné des ambitions, des stratégies et des moyens différents en fonction des clubs.
Vu de l’extérieur, cela semble clair pour tout le monde : la plupart des clubs (le Fola pour Pimentel, le RFCU pour Ikene, le Progrès pour Muratovic, la Jeunesse pour Klica…) ouvrent désormais tout grand leurs portes pour que leurs jeunes partent à l’étranger à la moindre opportunité professionnelle, quitte à perdre en qualité et en premières licences. Pendant ce temps, le F91, lui, verrouille son monde pour s’assurer une continuité qui pourrait le porter au(x) titre(s). L’exemple Bettaieb (lire ci-contre) tend à illustrer le propos et la stratégie dudelangeoise tend vers le résultat sportif à court terme plus que vers le fait de poser des bases de recrutement pour l’avenir. Ce sont deux logiques. Elles se défendent toutes les deux.
Aujourd’hui, celle du F91 fait dire ceci à Stéphane Leoni, qui a vu son meneur de jeu partir en D2 roumaine et a laissé son capitaine et défenseur central aller ramer une semaine en D2 danoise dans l’espoir de décrocher un contrat à Esbjerg : «Samedi, on reprend contre la meilleure équipe du pays en qualité intrinsèque. Et surtout, un groupe qui a des automatismes puisque cela fait deux ans qu’ils n’ont presque rien changé. On a deux projets différents. Eux bâtissent pour être champions, nous, on laisse nos jeunes partir et on tente de rester compétitifs. Du coup, aujourd’hui, les jeunes veulent venir chez nous mais les favoris, ce sont eux. Cela peut leur retomber dessus à long terme mais pour le moment, ce sont eux qui jouent le titre!».
«Notre budget n’est pas énorme»
Est-ce trop simpliste? Peut-on faire ce genre de procès au F91 alors qu’il a été pillé de tous ses meilleurs éléments il y a deux ans et s’en est malgré tout sorti en réinstallant une forme de stabilité? Carlos Fangueiro se plaît à le rappeler, un brin agacé qu’on puisse se plaindre du cynisme de la politique sportive de son club, d’autant qu’elle se défend : depuis quand peut-on reprocher à un staff de tout mettre de son côté pour aller glaner un titre? «Non mais attendez : la plupart des autres équipes ont perdu des joueurs, oui! Mais elles ont bien recruté pour compenser, il me semble. Nous, tout ce qu’on s’est permis, c’est de prendre un gardien parce qu’on n’en avait qu’un sur la première partie de saison. Si on n’a rien fait de plus, c’est aussi parce qu’on n’avait tout simplement pas les moyens financiers! Notre budget n’est pas énorme! Comme vous le savez, il a même énormément baissé depuis deux ans!» Une façon comme une autre de renvoyer à leurs affaires tous ceux qui s’étonnent de voir le leader ne pas suivre le mouvement de l’ouverture. Et qui n’évite pas longtemps de reparler de l’«affaire Hellers» pour signaler que le comité n’a formulé aucune injonction de résultat pour aller chercher le titre, et donc la C1 et donc plus de matches européens.
Avant le choc, Stéphane Leoni ne cache pas qu’une certaine stabilité est «toujours appréciée» par un coach. Lui n’a plus de colonne vertébrale pour ce duel au sujet duquel il avoue : «J’aurais préféré qu’il se joue plus tard. Parce que je regarde leurs vidéos et je vois une équipe très physique, qui est prête tactiquement. Et devant le but, c’est clinique. Il faudra être très sérieux dans ce match pour espérer quelque chose et faire un sans-faute sur la deuxième partie de saison pour aller les chercher».