La 16e journée de N1 a été marquée par la performance stratosphérique d’Adam Eberhard, l’Américain de la Résidence.
Au moment de se pencher sur ce qui s’est passé ce week-end, les sujets ne manquent pas. On aurait pu évoquer Contern, qui a peut-être fait un pas décisif vers les play-offs en écartant en plus Heffingen, le Sparta encore tout près de décrocher une victoire sans joueur pro. Ou encore le champion eschois qui, après avoir fait tomber la Résidence, s’est offert le scalp d’Etzella au Deich.
Mais c’est du côté de Walferdange, encore une fois, qu’on a finalement décidé de se tourner. Il faut dire qu’il s’est passé quelque chose d’énorme, du côté du Hall Prince-Henri, samedi. Au-delà de la victoire, il faut le dire attendue, de la Résidence dans le derby face à l’Amicale, toujours privée de son deuxième US Ron Mvouika (102-78), c’est surtout la ligne de stats d’Adam Eberhard qui choque. Voyez plutôt : 46 pts, 18 rebonds, 12 passes, 5 interceptions… N’en jetez plus !
Mais qui est donc ce grand gaillard (2,03 m), dont le patronyme évoque forcément un côté germanique : «Certainement, mais cela remonte à plusieurs générations. Mes parents et mes grands-parents sont américains», sourit le gamin d’Evansville, dans l’Illinois. Lui, c’est donc Adam Eberhard. À 24 ans, il dispute sa seconde saison chez les pros après une première expérience non loin du Luxembourg, en Pro A allemande, au sein de l’équipe des MLP Academics Heidelberg. S’il y réalise des stats correctes (7 pts, 4 rebonds, 1 passe), le jeune homme, passé par Bellarmine University (NCAA 2) dans le Kentucky, se morfond trop souvent sur le banc à son goût : «C’est une très bonne ligue. Il y avait quatre Américains dans l’équipe et je n’ai pas été assez bon pour avoir beaucoup de temps de jeu», reconnaît-il avec humilité.
La Résidence entre en contact avec son agent et le voilà qui débarque cette saison au Luxembourg, du côté de Walferdange. Avec un tout nouveau rôle : «Pour moi, c’est un cadeau tombé du ciel d’être ici. Je joue pratiquement tout le temps. J’ai trouvé de très bons joueurs et ils sont nombreux à pouvoir scorer dix points. C’est ce que j’aime. Le basket, c’est un sport collectif», martèle-t-il.
En posant ses valises au Grand-Duché, Adam Eberhard a dû forcer sa nature : «J’ai dû adopter cette mentalité de scoreur que je n’avais pas. Être plus agressif.» Avec ses 203 cm sous la toise et ses seulement » 97 kg, il a dû développer d’autres armes que son seul physique pour rivaliser avec les mastodontes en Allemagne : «En tant que poste 4, je n’étais pas le plus costaud. Je devais trouver d’autres moyens pour mettre des points que le combat dans la raquette où j’allais me faire démolir. J’ai travaillé mon tir à mi-distance, mon fade-away jumpshot ou encore mon tir à trois points. Je continue de le faire.»
L’heure de la retraite a déjà sonné
Avant ce match, samedi, pourtant, il ne se sentait pas bien : «J’avais mal à la tête. Je l’ai dit à Marcus Neal, l’assistant coach et il m’a répondu que ça pouvait être un bon signe. Il avait raison.» En effet, alors qu’il tourne habituellement à une vingtaine de points et une quinzaine de rebonds, Adam Eberhard va vivre une soirée incroyable. Dès le premier quart, qu’il termine avec 13 pts, 6 rebonds et 3 passes, il inscrit trois paniers longue distance. À la pause, il a déjà un double double en poche (24 pts, 11 rebonds) et il ne faiblira pas après la pause avec des tirs de loin, de près, des rebonds, des passes, des interceptions. Il est sur tous les fronts. Et quand on lui demande quelle stat lui fait particulièrement plaisir, il n’hésite pas longtemps : «Les points. Tu veux toujours mettre tes tirs et avoir la main chaude. C’est ce qui c’est passé. Dix-huit rebonds, c’est bien mais je l’ai déjà fait. Les passes, je suis un joueur qui adore passer donc ça ne change pas. Mais mettre autant de points, ce n’est pas habituel pour moi. Et prendre 13 tirs à trois points, c’est vraiment une exception. Mais j’en mettais beaucoup, alors j’ai continué. D’habitude, je suis plus catch and shoot. Et dans le troisième quart, j’en ai mis un après un dribble et là, je me suis dit que ce serait peut-être mon soir.»
Avec Adam Eberhard, la Résidence compte une arme de plus qui peut lui permettre d’aller loin. Très loin : «Bien sûr que je pense qu’on peut aller au bout. On a des super joueurs, au premier tour, on a montré qu’on pouvait battre tout le monde, à part Esch. Si on continue à bien jouer, on a une chance.»
Pour lui, il s’agira malheureusement de la dernière. En effet, il a décidé d’arrêter à l’issue de la saison, son expérience luxembourgeoise : «Il y a trois semaines, j’ai eu l’opportunité de signer avec Tennessee. Je vais rejoindre le support coaching staff des Volunteers. Je vais m’occuper du scouting, de l’entraînement des joueurs, un peu de tout. Mes deux années en tant que joueur pro sont une bonne expérience. Et j’ai toujours voulu coacher et apporter beaucoup d’importance au QI basket. Avoir la chance d’apprendre aux côtés de Rick Barnes est une chance que je ne voulais pas rater.»
Avant de traverser à nouveau l’Atlantique dans quelques semaines, comme il l’avait fait au moment de l’arrêt de la saison et de revenir avec le même plaisir à Walferdange, Adam Eberhard a une mission : aider la Résidence à renouer avec le succès. Le dernier titre national de la Résidence remonte à 24 ans… l’âge d’Adam Eberhard.
Romain Haas