La Luxembourgeoise vient tout juste d’être diplômée en sciences politiques de son université de Virginia. Elle revient sur quatre années qui ont changé sa vie. Et évoque son futur.
L’UNIVERSITÉ AMÉRICAINE «Vous êtes dans une bulle»
Lisa Jablonowski : «Avant de rejoindre cette université, j’avais effectué beaucoup de recherches. Je savais à peu près à quoi m’attendre mais c’était encore plus grand que ce que j’imaginais. La culture universitaire américaine est quelque chose d’unique, c’est très différent de ce qu’il y a en Europe. Vous êtes dans une sorte de bulle dans laquelle tout tourne autour de l’université. Là-bas, il y a un système avec beaucoup plus de support. Si un étudiant de Virginia venait en Europe, je pense que je le recevrais comme quelqu’un de ma famille, car nous formons tous une famille.»
ÉVOLUTION PERSONNELLE «Je suis restée la même Lisa»
«Par rapport à la jeune fille qui est arrivée aux USA il y a quatre ans, je suis restée la même Lisa même si je crois que j’ai un peu grandi (NDLR : elle est annoncée à 1,89 m). Maintenant, ce qui est certain, c’est que le fait de vivre à l’étranger, de connaître de nouvelles personnes, un nouvel environnement, tout cela donne une perspective différente sur le monde qui nous entoure. C’était quatre années très intenses, une étape très importante de ma vie qui m’a fait gagner en expérience.»
ÉVOLUTION SPORTIVE «J’ai beaucoup gagné en confiance»
«Ce n’était pas toujours facile. Pendant ces quatre années, on a connu des hauts et des bas. Il y a eu le changement de coach en fin de deuxième année, chose que je n’avais pas du tout anticipé. La nouvelle (NDLR : La Hall of Famer Tina Thompson, double championne olympique qui a joué 17 ans en WNBA) est arrivée au mois de juillet et il a bien fallu attendre novembre pour que tout se mette vraiment en place. L’équipe a beaucoup évolué, on a perdu des joueuses et mon rôle a pas mal bougé. Lors des deux dernières saisons, j’ai gagné en temps de jeu et en confiance. J’avais davantage de responsabilités et je pense également que je suis bien meilleure en défense car on affronte des adversaires bien plus rapides et fortes qu’en Europe. Il faut être capable de s’adapter.»
L’ARRÊT DE LA SAISON «J’ai dû réorganiser ma vie en trois jours»
«Au mois de mars, on a appris que l’université ne rouvrirait pas. Comme tous les cours étaient en ligne, j’ai pris la décision de rentrer au Luxembourg puisque, de toute façon, tout était fermé aux USA. J’ai dû réorganiser ma vie en trois jours, remplir deux valises et donner ou jeter pas mal de choses. La décision de rentrer était à la fois facile et difficile. Facile parce qu’il n’y avait pas d’autre alternative. Difficile car je n’avais pas envie que ça s’arrête comme cela. Pendant quatre ans, je me suis fait beaucoup d’amis, j’ai passé beaucoup de temps avec mes coéquipières, les coaches. C’est comme ma deuxième famille et je ne voulais pas les quitter si tôt.»
SON POSTE DE PRÉDILECTION «Je peux jouer à toutes les positions»
«Lors de mes deux premières saisons, j’ai évolué des positions 3 à 5. Mais lors des deux suivantes, comme on a pas mal de joueuses qui sont parties et qu’on manquait de joueuses intérieures, j’ai souvent occupé les postes 4 et 5. Personnellement, j’ai une petite préférence pour le poste 4 mais cela dépend de la manière dont joue l’équipe. Je peux jouer à toutes les positions.»
SON MEILLEUR SOUVENIR «Jouer le tournoi NCAA devant 16 000 personnes»
«Lors de nos quatre années, on n’a atteint qu’une seule fois le tournoi NCAA. C’était lors de ma deuxième saison. On avait gagné notre premier match et ensuite on s’était inclinées face à South Carolina, qui était le champion en titre du pays, après avoir fait jeu égal avec elles jusqu’à 3 minutes de la fin. On a joué devant 16 000 spectateurs. Au-delà du résultat, c’est surtout l’expérience de vivre cela qui est incroyable. En plus, mes parents étaient présents pour me voir, c’était génial!»
SON DIPLÔME «J’ai mon bachelor en sciences politiques»
«Depuis samedi, je suis officiellement diplômée en sciences politiques. Quand la saison s’est arrêtée, on était à la moitié du semestre. Contrairement à d’autres de mes amis qui étudient une autre matière, je n’avais pas d’examens à faire en ligne mais des productions écrites que je devais rendre dans un laps de temps imparti. Je l’ai fait et mes professeurs les ont notées.»
LA CÉRÉMONIE «J’ai jeté ma tenue»
«Le jour où j’ai réalisé qu’on n’aurait pas de cérémonie de remise des diplômes a certainement été le pire moment que j’ai vécu pendant ces quatre ans. On avait reçu au mois de février notre tenue pour la cérémonie, je l’avais essayée mais quand il a fallu partir, je l’ai jetée. On savait que la cérémonie n’aurait pas lieu. Elle s’est déroulée samedi sur internet. Quelques discours, une vidéo revenant sur les 4 ans des étudiants, deux performances d’artistes et chaque matière a eu droit à sa remise, plus ou moins personnalisée. Comme on est très nombreux en sciences politiques, on a seulement eu droit à un message général, sans même qu’on cite nos noms. On recevra notre diplôme par courrier dans les prochains jours et on peut télécharger une attestation si, par exemple, on en a besoin pour un entretien d’embauche.»
LA SUITE «J’ai décidé de continuer à jouer au basket»
«J’ai pris la décision de poursuivre avec le basket. Je me donne un ou deux ans pour voir si ça m’intéresse vraiment. J’ai pris un agent américain, je lui ai expliqué ce que j’attendais en termes de niveau, dans quelle direction je voulais aller et quels étaient mes souhaits. On s’est notamment dit que pour une première année, il ne fallait peut-être pas tout de suite viser un niveau Euroligue, car j’arrive d’une université américaine, on ne me connaît pas. Donc c’est mieux de trouver une équipe qui évolue à un niveau moindre mais au sein de laquelle je pourrais faire une belle saison pour montrer ce que je sais faire.»
SES CRITÈRES «Trouver l’équipe qui saura utiliser mes forces»
«Le plus important, c’est de trouver l’équipe avec laquelle j’aurai un bon fit. Je suis une joueuse qui travaille beaucoup en défense, pas une top scoreuse qui met beaucoup de points. Je veux trouver la formation qui saura utiliser mes forces, qui aura besoin de moi et au sein de laquelle je me sentirai bien. Le fait d’être grande et européenne est forcément un avantage car je ne suis pas soumise aux restrictions qui peuvent toucher les Américaines alors que j’ai suivi le même parcours qu’elles. Je suis actuellement en contact très avancé avec une équipe, peut-être que ça pourra aboutir dans les jours ou les semaines qui viennent.»
SON ÉTAT D’ESPRIT «C’est maintenant ou jamais»
«Mentalement, j’ai le sentiment de ne pas être allée au bout de ma carrière universitaire. Mais je trouve le moment actuel très intéressant. Se projeter vers le futur alors que je n’en ai pas encore complètement terminé de mon passé. C’est excitant. Et après quatre ans aux USA, je suis confiante dans le fait que je peux franchir un nouveau palier supplémentaire dans le basket. De toute façon, c’est maintenant ou jamais. Si j’attendais un ou deux ans, je pense que ce serait trop tard. Je ne veux pas avoir de regrets en me disant que je n’ai pas essayé.»
LA SÉLECTION «Toujours un honneur de porter le maillot»
«La dernière fois que j’ai joué pour la sélection, c’était quand j’étais en première au Luxembourg. Depuis que j’ai rejoint les USA, Virginia était ma priorité et je me concentrais complètement là-dessus. Maintenant que je suis de retour, je suis à nouveau à la disposition de la sélection. J’avais prévu de participer à la campagne cet été, mais, évidemment, elle a été annulée. Pour moi, c’est toujours un plaisir et un honneur de porter le maillot de la sélection.»
SON CONSEIL «Attention, ce n’est pas que du basket»
«Si on venait me demander des conseils sur le fait de partir aux USA, je dirais que cela dépend de la joueuse. Avant de partir, je me suis bien renseignée, je savais où je mettais les pieds. Jouer en université américaine, ce n’est pas quelque chose de facile. Il y a beaucoup d’entraînements, beaucoup de travail dans la salle. Mais ce n’est pas que du basket. On est également bénévoles pour faire beaucoup d’actions en faveur de la communauté et il y a tout le travail scolaire à côté. Partir, ce n’est pas quelque chose qui doit se faire sur un coup de tête. Ça doit être quelque chose de bien réfléchi. On part pendant quatre ans, loin de ses parents, de ses amis, ce n’est pas facile tous les jours.»
Romain Haas