Annoncé à Heffingen la saison prochaine, le plus grand joueur luxembourgeois (2,13 m) fait vraisemblablement une croix sur une carrière dans le basket. Mais Lou Demuth n’a pas de regret.
La carrière de Lou Demuth n’a jamais été un long fleuve tranquille. Passé par les espoirs du SLUC, où il devra malheureusement composer avec une grave blessure au pied pendant de longs mois, il tentera sa chance en rejoignant l’équipe jeune de Séville qu’il quittera également rapidement. Revenu au Luxembourg, on retrouvera sa trace au sein de l’équipe de Gréngewald en N2, où l’un des plus grands espoirs annoncés du basket luxembourgeois ne brille pas? Loin s’en faut. L’année dernière, il avait décidé de tenter une nouvelle fois de faire du basket à haut niveau, en rejoignant Chicago State University en NCAA. Mais là encore, la chance n’est pas de son côté. Non seulement, à cause de la situation sanitaire, il ne peut pas vivre son rêve d’étudiant aux USA mais son équipe perd tous ses matches et ne terminera même pas le championnat, faute de joueurs disponibles. Rentré au pays après un sacré périple : «Trois jours au lieu de quelques heures», Lou Demuth devait rejoindre l’équipe nationale qui s’entraînait en vue de son déplacement au Kosovo. Mais, décidément pas verni, il doit renoncer au déplacement international en raison d’un test positif au Covid. Alors interrogé sur son avenir, le géant mosellan expliquait ne rien s’interdire.
Alors retour aux USA ? Engagement auprès d’une équipe pro ? Voire la Total League ? Depuis mardi, on sait désormais ce qu’il va faire : il ne retournera pas aux USA.
Pourquoi ce choix ? «Je voulais faire de la géographie aux USA mais il n’y en avait pas. Je devais faire trois ans de sociologie avant la géo. Je me suis dit que ça ne valait pas la peine. Le basket, c’est bien mais il faut voir un peu plus loin. Savoir ce qui a du sens.» Et se lancer dans cinq ans d’études sans avoir la certitude d’obtenir une équivalence une fois de retour en Europe, n’en avait visiblement pas. C’est donc la raison qui l’a emporté sur l’amour du jeu : «La meilleure solution pour moi était de revenir ici pour étudier.»
«Avec Heffingen, on peut surprendre beaucoup de monde»
S’il ne sait pas encore avec certitude où il étudiera, la tendance penche pour Trèves. Ou en tout cas, pas loin de là : «Je n’ai pas envie de faire deux ou trois heures de route plusieurs fois par semaine ou même de pouvoir seulement m’entraîner les week-ends avec l’équipe», confie-t-il.
S’il ne sait pas encore où il étudiera, il sait désormais où il jouera. C’est donc à Heffingen qu’on aura l’occasion de le voir débuter en Nationale 1. À 21 ans. On peut s’interroger sur ce choix mais le jeune homme est pragmatique : «Quand je suis rentré au pays, je me suis entraîné avec l’équipe nationale. Max Schmit m’a dit que je pouvais venir m’entraîner à Heffingen avec eux. Ken Diederich (NLDR : l’entraîneur national) m’avait proposé aussi de venir à Dudelange. Mais si je vais à Dudelange en sortant du boulot, je suis pris dans les embouteillages pendant une heure et demie. Si je vais à Heffingen, à part un tracteur de temps en temps il n’y a jamais de bouchon.»
C’est donc tout naturellement que le joueur d’Oberdonven recommence à travailler avec les hommes de Daniel Brandao. Même s’il ne joue pas avec l’équipe première, les entraînements se passent bien : «Je me sens à l’aise. Je sens que je suis à mon meilleur niveau. Sur le plan athlétique, j’ai le sentiment de n’avoir jamais été aussi bon», confirme le pivot, qui accuse 110 kg sur la balance. Au point de finalement s’engager : «Au début, je voulais seulement m’entraîner pour ne pas perdre mon éligibilité pour les USA. Mais au fil des semaines, je me suis rendu compte qu’il était préférable de rester au Luxembourg.» Et de nourrir pas mal d’ambitions avec son nouveau club pour la saison à venir : «Heffingen n’a jamais eu de joueur de grande taille. Et je crois qu’avec Max, qui est l’un si ce n’est le meilleur passeur de la ligue, ça peut faire une bonne combinaison. Je suis convaincu qu’on peut atteindre les play-offs voire même aller en demi-finale.» Et d’ajouter : «Quand mon arrivée a été annoncée, j’ai reçu des messages de personnes qui me disaient que j’étais fou d’aller là-bas. Je pense que beaucoup de personnes nous sous-estiment. Mais qu’on va surprendre du monde», indique encore Lou Demuth, qui a de la famille à Heffingen.
Alors qu’il avait indiqué aux Pikes sont désir de les rejoindre, il a révisé sa position au vu de la situation : «Ils ont déjà Buntic. Je n’avais aucune assurance en terme de temps de jeu. À Heffingen, il y a une place à prendre. Et puis ce club, ça a toujours été un coup de cœur pour moi. Maintenant, c’est le bon moment pour y aller.»
«Je n’ai plus ce rêve de passer pro»
Évidemment, quand on voit ses débuts prometteurs, on n’imaginait pas forcément une telle trajectoire. Mais le jeune homme n’a pas de regret : «Globalement, je suis assez content de mon parcours. Tout n’est pas allé comme prévu mais j’ai toujours réussi à faire ce que je voulais. À Nancy, j’ai été blessé un an. J’ai passé deux ans à Séville et je n’ai que de bons souvenirs. Je suis très content d’avoir vécu ça. Quand j’ai quitté Séville, j’avais un très bon niveau. J’aurais peut-être pu passer pro à ce moment. Mais par la suite, je n’ai pas fait un bon choix. Ce n’est pas grave, ce n’est pas la fin du monde. J’ai vécu de bonnes années et je ne regrette rien de ce que j’ai fait.»
Rêve-t-il encore de faire du basket une profession ? À l’entendre, tout cela c’est derrière lui : «Non, je n’ai plus ce rêve. Il faudrait que je joue très bien à Heffingen et que j’ai une très bonne offre. Passer pro pour passer pro, selon moi, ce n’est pas la meilleure solution. Bien sûr, on ne sait jamais ce qui va se passer mais je ne pense pas que ce sera le cas pour moi. Il y a d’autres choses dans la vie que le basket.»
On l’aura compris. À seulement 21 ans, Lou Demuth, qui reste certainement à disposition de l’entraîneur national Ken Diederich pour les futures campagnes, a certainement tourné une page importante de sa vie. Il va continuer à jouer pour le plaisir. Et celui des fans de Heffingen.
Romain Haas