Accueil | Sport national | Awards Night 2019 : «Je n’ai pas raté une seule cérémonie, sauf celle-là…»

Awards Night 2019 : «Je n’ai pas raté une seule cérémonie, sauf celle-là…»


Ce jeudi soir, on connaîtra le nom des lauréats 2019. (Photo : Luis Mangorrinha)

Absents lors de leur sacre, ils avaient tous une bonne raison. Témoignages…

Des grands frissons. Qu’on le veuille ou non, ce Gala de la presse sportive est une soirée à part. De celle d’où peut jaillir un intense plaisir ou une terrible frustration. Contrairement au pardessus, l’esprit de compétition ne reste pas aux vestiaires. Bien avant l’heure des premiers petits fours, entre deux sourires, chacun se jauge du coin de l’œil : «Et si c’était lui? Ou lui tiens, c’est vrai qu’il a fait une belle saison. Mais moi, depuis le temps que je cours derrière…» Ce soir, au Casino 2000 de Mondorf, comme jadis au centre sportif d’Oberkorn, une légère tension flottera dans un air adouci par diverses fragrances. Ni sueur – tout juste les aisselles légèrement humides – ni larmes. Question de pudeur. Pourtant, à l’évocation de leur nom, le pouls des lauréats s’accélère, leur sang ne fait qu’un tour. Ni une ni deux, les voilà debout, prêts à monter sur scène. Le sourire accroché à des lèvres parfois tremblantes. À moins de ne pas être là…
Perpignan, Décembre 1997. Christian Poos est en stage avec son équipe Cofidis. L’appel de Nico Keiffer, déjà maître de cérémonie, le scotche littéralement : «Cette année-là, j’avais gagné Liège-Bastogne-Liège Espoirs mais, à mes yeux, d’autres méritaient ce prix plus que moi. J’étais vraiment étonné…» Alors, au moment de faire son speech, le jeune homme de 20 ans peine à trouver ses mots. Aujourd’hui encore, on devine le malaise qui a pu être le sien. «Parler en public, ça s’apprend…»

Je ne voudrais pas être à la place des journalistes qui votent. Il y a une part de subjectivité, non?

Dans l’absolu, l’idéal serait de ne pas l’être, en public. Ou alors, de ne pas le savoir. Quoique, ceci peut s’avérer… gênant. Au soir de la remise du premier de ses six trophées, en 1987, Nancy Arendt  (Kemp ne viendra que plus tard) se trouve à Boca Raton (Floride). Entre le décalage horaire, une bonne friture sur la ligne et un léger quiproquo, la nageuse livre le speech de remerciement le plus osé de l’histoire du Gala : «J’entends Pilo Fonck me dire : « Bonjour Nancy, tu es sportive de l’année. » Je le remercie, lui répond que c’est super et voilà. Et puis, à l’autre bout du fil, j’entends ma mère. D’un côté, je ne comprenais pas ce qu’elle faisait avec Pilo mais, d’un autre, j’étais hyper contente de l’avoir car, deux semaines plus tard, elle devait venir me voir. Alors, je lui dis : « Maman, quand tu viens, n’oublie pas de me ramener des petites culottes. » Et là, elle me dit : « Fais attention à ce que tu dis, tout le monde t’entend! » Je ne le savais pas mais j’étais en direct…»
Direct, comme le vol en hélicoptère que l’organisation aurait été prête à mettre à sa disposition pour s’assurer de la présence de la nageuse reconvertie triathlète. C’était en 1996. «Vainqueure de la Coupe d’Europe, j’étais à Paris pour recevoir le prix de la meilleure triathlète européenne de l’année. Petz (NDLR : Lahure, le président de Sportpress.lu) voulait absolument que je vienne mais je ne pouvais pas. En plus, une interview avec Triathlète Magazine était déjà prévue», confie, aujourd’hui, Nancy Kemp-Arendt alors que son homologue masculin, cette année-là, était également absent. Et pour cause, il s’agissait de… Marc Girardelli.
Des absents, il y en a eu d’autres. «Je n’ai pas raté une seule cérémonie, sauf celle où j’ai reçu le prix», enrage gentiment Justin Gloden, lauréat de l’édition 1980. Sa victoire, l’athlète la célébra au petit matin du 5 décembre dans… une cabine téléphonique de Puerto Rico où il disputait le semi-marathon de San Blas. «J’appelle François Faber, un journaliste du Luxemburger Wort qui me dit : « Je salue le meilleur sportif de l’année! » J’ai levé le poing et les autres athlètes qui m’attendaient dehors sont tous entrés dans la cabine pour fêter ça!» Deux ans auparavant, à l’issue d’une saison lors de laquelle il améliora «dix records nationaux, du 800 m au 10 000 m», Gloden était sûr de décrocher la timbale : «Mais c’est Roland (Bombardella) qui l’a eue. Pourtant, j’étais sûr de l’avoir…» En 1985, il est devancé d’un petit point par Claude Michely, médaillé de bronze aux Mondiaux de cyclo-cross à Munich. «Pas grave, Claude est un bon copain, on a fêté ensemble jusqu’à 2 h du matin!»
Se pose alors la question même de cette élection. Et, insidieusement, des critères pris en compte. «Je ne voudrais pas être à la place des journalistes qui votent, assure Nancy Kemp-Arendt. Il y a tant de disciplines différentes. Il doit y avoir une part de subjectivité, non?» Possible…

Charles Michel