Contraint de rester chez lui, les fesses posées dans le baquet de son simulateur, le pilote luxembourgeois de Porsche Supercup, Dylan Pereira, prend son mal en patience et espère commencer sa saison en… juillet.
Malgré la cagoule, le casque et les gants, les pilotes ne sont pas davantage à l’abri du coronavirus. Que faisiez-vous alors début janvier au moment où la Chine évoquait un début d’épidémie ?
Dylan Pereira : Début janvier, j’étais aux Émirats arabes unis où j’ai pris la 3e place de ma catégorie aux 24 Heures de Dubai. À ce moment-là, on avait bien entendu parler de ce qui se passait en Chine, mais on se disait, justement, que c’était en Chine et que ça n’irait pas plus loin. Franchement, personne ne parlait de ça. D’ailleurs, on a poursuivi le programme prévu en restant à Dubai pour la manche Middle East où je coachais Richard Wagner (NDLR : l’Allemand a pris successivement la 4e, 7e et 3e place). Après ça, je suis rentré au Luxembourg puis reparti au Bahreïn pour trois courses en Middle East, cette fois en tant que pilote : deux victoires et une troisième place. Le 23 février, j’étais de retour au Luxembourg sans me douter alors ce qui allait suivre…
Vous ne vous attendiez pas à voir la FIA annuler certains Grand Prix de F1 ?
Non, ce n’était pas encore d’actualité. Le Grand Prix d’Australie était prévu le 15 mars, le 16 je devais être à Zandvoort (Pays-Bas) pour effectuer des tests. Mais quand je suis arrivé sur place, tout venait d’être annulé. Ensuite, les 21-22 mars, je devais retourner au Bahreïn dans le cadre de la Middle East, mais c’était aussi annulé.
Savez-vous quand vous pourrez reprendre la compétition ?
Ce mercredi (hier), on devait démarrer les tests officiels à Barcelone et commencer la saison à Zandvoort (1er-3 mai) mais l’épreuve a été annulée. Tout comme celles de Barcelone (13-15 mai) et Monaco (26-29 mai). Donc, au mieux, on pourrait reprendre la compétition sur le Red Bull Ring en Autriche (1er-3 juillet). Mais pour l’instant, on n’en sait absolument rien.
Une compétition sur simulateur, réservée aux pilotes engagés en Supercup, va avoir lieu
Quelles peuvent être les conséquences de ces reports et de ce calendrier tronqué ?
Je ne sais pas. Mais si la situation devait se prolonger et qu’il faudrait annuler d’autres courses, ce serait comme un élève qui n’irait pas en classe pendant un an… Après, si tu ne viens à disputer que cinq courses, comme cela risque d’être probablement le cas, il faudra être tout de suite compétitif, car la marge de manœuvre sera moins importante. Sur neuf manches de Supercup, tu peux te permettre de ne pas être dans les points une ou deux fois. Sur cinq, ce n’est pas possible.
En tant que pilote, comment vivez-vous cette période ?
C’est une situation que personne n’a vécue auparavant donc, forcément, ça demande un petit temps d’adaptation. Notamment le fait de rester confiné à la maison. Certains s’y adaptent plus facilement que d’autres. Je n’ai pas trop à me plaindre même si je dois aussi faire des compromis. Par exemple, concernant ma préparation physique, je dois la faire de mon côté. Je ne peux l’effectuer avec Maxime (NDLR : Jacques). On s’appelle, il me dit ce que je dois faire et, ensuite, une fois que c’est fait, on fait un petit debriefing.
Et pour le pilotage, combien de temps passez-vous sur votre simulateur ?
Ça peut aller jusqu’à cinq heures par jour. L’objectif de tout pilote est de rester en forme mais aussi de garder ses réflexes et, pour cela, tous les pilotes ont un simulateur. Et ceux qui n’en avaient pas, je peux vous assurer qu’ils en ont vite acheté un…
Les sensations sont-elles véritablement comparables à celles que vous ressentez dans le baquet de votre voiture ?
Non. Des simulateurs, vous en avez de toutes sortes et à tous les prix. Ça va de 200 euros à plusieurs millions d’euros. Bon, généralement, il faut compter entre 5 000 et 15 000 euros. Je roule sur I-Racing. Le mien ne bouge pas. C’est-à-dire qu’il ne vibre pas en fonction des trajectoires prises. Pour le reste, je peux régler le volant, resserrer plus ou moins les pédales, etc.
La F1 a décidé de disputer de manière virtuelle les Grands Prix annulés. Peut-on imaginer que ce soit le cas en Supercup sachant que Porsche, l’an dernier, a organisé une compétition e-sport ?
Porsche souhaite aller sur le terrain de l’e-sport et a organisé, c’est vrai, un Porsche Esports Supercup dont le vainqueur remportait 100 000 dollars. Mais cette compétition était ouverte à tout le monde. On vient d’apprendre qu’une compétition sur simulateur allait avoir lieu, mais cette fois uniquement réservée aux pilotes engagés en Supercup. Et les courses seront retransmises sur YouTube et Twitch. Le vainqueur empochera… 2 500 euros.
Entretien avec Charles Michel