Alors qu’il a tout vu et tout connu, Dan Leiner, sportif de l’extrême, mais toujours pour la bonne cause, va ajouter une corde de plus à son arc en Afrique du Sud, son pays d’adoption.
Ce mercredi matin, du côté du Cap, en Afrique du Sud, Dan Leiner sera à l’aéroport pour aller chercher cinq compatriotes : Sebastian Einsle, Gilles Ruffato, Sandro Curelli, Yves Steffen et Marc Fautsch. Ils auront à peine le temps de poser leurs bagages qu’ils devront déjà enfourcher leur vélo pour une reconnaissance du prologue de la Cape Epic, une course internationale de VTT par équipe de deux : «Ils atterrissent à 10h et à 13h on est sur le vélo. Ce n’est pas un souci, ils dorment un peu dans l’avion et c’est bon, il n’y a pas de décalage horaire avec le Luxembourg», note l’ostéo dudelangeois, qui a une résidence secondaire en Afrique du Sud : «Une fois que tu viens en Afrique, tu y reviens toujours. Un proverbe dit que tu quittes l’Afrique du Sud, mais elle ne te quitte pas. Il y a 25 ans, je suis tombé amoureux du pays, j’y suis revenu pour apprendre la torréfaction du café et j’ai même ouvert un café house à Dudelange», souligne-t-il.
Même si l’expérience n’a duré que quelques années, l’amour de l’Afrique, lui, est bel et bien resté. À tel point que, multipliant les allers-retours avec l’Afrique du Sud, il a finalement décidé de s’y installer plus durablement : «Mes fils m’ont dit qu’au lieu d’y aller et de rentrer, je ferais mieux d’acheter. Effectivement, c’est un bel endroit pour passer sa retraite. J’ai donc un appartement au Cap depuis dix ans. Et comme les saisons sont inversées, quand nous on a du mauvais temps au Luxembourg, en Afrique du Sud, entre mai et novembre, il fait un temps splendide.»
Le Grand Chelem sur la «4 deserts run»
De toute façon, les voyages n’ont jamais effrayé l’ancien handballeur international du HBD. Il faut dire qu’à l’aube de ses 61 ans, l’homme a roulé sa bosse dans tous les coins du monde. Et dans les conditions souvent les plus extrêmes. En effet, il est adepte des épreuves les plus dingues de la planète, comme le Marathon des Sables, la Diagonale des Fous à la Réunion ou encore la «4 deserts run», une course à travers quatre déserts dont il est le seul Luxembourgeois à avoir accompli le Grand Chelem. En 2012, il a en effet bouclé en autosuffisance successivement l’Atacama, désert le plus élevé et le plus aride du monde au Chili, le désert de Gobi en Chine avant d’enchaîner avec le Sahara et de terminer en Antarctique : «Passer de 40 degrés à -25 en l’espace de trois semaines, c’est un peu violent», sourit-il.
Amateur de sensations fortes, il a apprécié cette incroyable aventure, même si, pour lui, la plus dure reste le Grand Raid de la Réunion, surnommé, à raison, la Diagonale des Fous : «Un jour, on était en train de discuter dans la tente de ravitaillement et Laurent Jalabert nous a demandé quelle langue on parlait. Quand on lui a dit qu’on était luxembourgeois, il nous a dit qu’il fallait être complètement fou pour venir ici. Il avait souffert.» C’était en 2008, Daniel Leiner bouclait son raid en 41 heures alors que l’ancien champion cycliste mettait un peu plus de 47 heures. Ce dernier vient d’ailleurs de rallier l’île pour prendre le départ, dans une semaine, de sa troisième Diagonale des Fous.
S’il a visiblement besoin d’adrénaline, l’autre moteur de Dan Leiner est clairement l’engagement en faveur des autres. Et quand il a bouclé son périple à travers les quatre déserts, il avait recueilli des dons en faveur de la lutte contre le syndrome de Marfan. Pas moins de 30 000 euros avaient ainsi été récoltés. Une belle somme. Mais une toute petite partie de ce qu’il a réussi à emmagasiner lors de la dernière décennie : «Au total, entre les dons récoltés pour Den-i, Give Children a Future au Cambodge, Kenako Children Home, Open Hand Malawi, Kenako Urban Farming et le projet Velo-ambulance au Malawi où on a fait don de quelque 200 vélos d’occasion ainsi que de bancs et de tables de classe pour remeubler six classes là-bas, on doit être aux alentours de 150 000 euros.» Et de préciser : «Avec ma femme Renée, on a même ramené cet été un Defender 110 Land Rover en traversant la Namibie, la Zambie et le Malawi pour en faire don à l’hôpital géré par les sœurs luxembourgeoises de la clinique Zitha… et notre ‘Louis’, nom du Defender, fait désormais office de véritable ambulance !»
Dan Leiner s’est notamment impliqué dans l’association de droit luxembourgeois Kenako, qui soutient des projets éducatifs dans les townships du Cap. Un premier projet à Khayelitsha a permis d’aménager le centre d’accueil Fikelela, qui accueille et nourrit une quarantaine d’enfants âgés de 0 à 8 ans : «1,8 million de personnes vivent dans des townships dans des conditions inhumaines et on veut les aider», explique encore Dan Leiner. Qui s’appuie sur un réseau très solide : «Mon ami Mike Frantz, ancien footballeur du Spora (NDLR : qui avait notamment joué contre le Real Madrid), et sa femme Patty vivent sur place. Ils assurent le suivi. Les gens savent que quand ils font un don à l’association, leur argent sera bien utilisé. D’ailleurs, chaque fois que je reçois un patient dans mon cabinet, je le sensibilise à la cause.»
Le mont Blanc en deux jours, le Kilimandjaro en quatre
Le dernier projet s’appelle donc Urban Farming. L’idée est de permettre, toujours dans ce même township de Khayelitsha – et en association avec Green Guerillas, qui prône la végétalisation de l’espace urbain –, à des habitants d’être formés à l’agriculture urbaine et de créer des jardins dans lesquels ils pourront cultiver des fruits et légumes pour subvenir à leurs besoins et, le cas échéant, vivre de cette activité : «Le projet a bien démarré, on a une école et un terrain de 3 hectares à notre disposition. Avec Cape Epic, on espère sensibiliser plus de personnes.»
En effet, les six Luxembourgeois qui seront, dimanche, au départ de la course de huit étapes (en fait, sept et un prologue), porteront tous les couleurs de Team Lëtzebuerg Green Guerillas. C’est Yves Steffen, l’un des participants, qui a contacté Dan Leiner : «Il avait eu trois spots, il leur manquait deux bonhommes, alors on a fait appel à moi. Je les connais, même si je suis davantage de la génération de leur père», explique l’ultradynamique sexagénaire.
Et aussi curieux que cela puisse paraître, cette course sera sa première à vélo. Attention, cela ne signifie pas pour autant que Dan Leiner, qui a dû s’acheter un VTT pour y participer, ne sait pas rouler : «Chaque année, je fais des virées à vélo. En juin, je suis parti de Dudelange pour rallier Riga, le tout sans bagages. L’année dernière, je suis allé à Porto et l’année d’avant à Bari. J’ai fait aussi Alicante, j’ai environ 2 000 km d’entraînement de base. En 2018/2019, j’ai traversé Israël du nord au sud et au Maroc et j’ai fait Agadir-Zagora-Marrakech en gravel bike. Soit plus ou moins 1 100 km en sept jours…» Excusez du peu…
Et ne vous en faites pas pour sa condition physique : «En décembre dernier, pour s’entraîner, on a monté et descendu le Kilimandjaro en quatre jours, à 6 000 m d’altitude. Et il y a trois semaines, avec ma femme, on a fait pareil sur le mont Blanc, en deux jours. On a eu de la chance avec le temps.»
Dimanche, il prendra le départ avec des ambitions mesurées : «On compare souvent cette course au Tour de France du VTT tellement le plateau est impressionnant. Je n’ai pas de pression de compétition. Avec Sandro, mon équipier, qui a 58 ans, on a juste pour objectif de terminer.» Pour lui, l’objectif est ailleurs : «Le but, c’est de mettre en avant l’œuvre caritative. Ce Cape Epic sera un bon coup de pouce.»
Romain Haas
Si vous voulez soutenir l’association…
Tous les détails sont sur le site kenako.lu.