Le football européen pourrait subir plusieurs milliards d’euros de manque à gagner avec la réforme controversée du calendrier envisagée par la Fifa, selon un rapport commandé par l’UEFA, et plusieurs fédérations nordiques ont promis mercredi des « actions » si l’idée d’un Mondial biennal aboutit.
Après plusieurs semaines de polémiques autour des bouleversements suggérés par la Fifa, l’opposition semble se durcir, notamment en Europe où l’UEFA est vent debout contre cette réforme du calendrier international qui envisage notamment l’organisation de Coupes du monde masculine et féminine tous les deux ans, au lieu de l’habituel rythme quadriennal.
À cette fronde se sont joints des représentants des championnats nationaux du monde entier, des supporters et des joueurs, à l’image de la Norvégienne Ada Hegerberg, Ballon d’Or 2018 et voix écoutée du football féminin, qui fustige un projet conçu « sans considération » pour les joueurs.
Selon une source interne à l’UEFA, un rapport commandé par la confédération européenne évalue entre 2,5 et 3 milliards d’euros sur quatre ans le manque à gagner des fédérations européennes si le projet était adopté. L’UEFA a présenté mardi les conclusions de cette étude aux dirigeants de ses 55 fédérations membres. Ce rapport ne tient pas compte du possible manque à gagner additionnel pour les championnats nationaux, précisent Le Monde et L’Équipe, qui ont dévoilé le contenu du document.
Pertes en billetterie et droits TV
La présentation de ce rapport est intervenue juste avant la réunion du Conseil de la Fifa, l’organe directeur de la fédération internationale, prévue mercredi en fin d’après-midi avec au programme un point d’étape sur le sujet. La Fifa envisage de mettre en place une compétition de sélections chaque année chez les hommes et chez les femmes, en alternant Mondial et compétitions continentales comme l’Euro. Un rapport complet doit être publié par la Fifa en novembre, avant un « sommet global » d’ici à la fin de l’année.
En plus du Mondial biennal, qui pourrait débuter en 2028, le projet porté par Arsène Wenger, directeur du développement du football mondial à la Fifa, prévoit de rassembler les matches de qualifications en une seule fenêtre, en octobre, voire en mars et octobre, alors que les fenêtres internationales actuelles s’étalent tout au long de l’année. Pour l’UEFA, ce scénario risque de provoquer des pertes liées à la billetterie, aux droits TV et aux sponsors, détaillent Le Monde et L’Équipe, car les diffuseurs et les entreprises partenaires sont susceptibles de préférer un feuilleton courant sur toute l’année plutôt qu’un rendez-vous ponctuel à la visibilité moindre.
Selon Le Monde, la Ligue des nations, compétition nouvellement créée par l’UEFA dont la France est tenante du titre, disparaîtrait également.
Pour le président de la Fifa, Gianni Infantino, qui poursuit les consultations avec les acteurs du monde du football, son projet entraînerait à l’inverse de meilleurs bénéfices pour les fédérations.
« Ceux qui prennent les décisions ne sont pas sur le terrain »
Une perspective critiquée par Ada Hegerberg, premier Ballon d’Or féminin de l’histoire, qui rejette toute approche purement financière. « Ajouter des Coupes du monde pour gagner plus d’argent est une idée qui ne va pas avec la situation actuelle », a-t-elle pointé, craignant une augmentation du risque de blessures pour les joueurs. « Ceux qui prennent les décisions ne sont pas sur le terrain et n’ont pas de considération pour les joueurs », a asséné la Norvégienne, qui revient elle-même d’une longue blessure.
Les fédérations de football des pays nordiques, « fermement opposées à l’idée de Coupes du monde biennales », sont même allées plus loin mercredi en promettant d’examiner de possibles « actions » si jamais ce projet aboutit. « Si une majorité au sein de la Fifa décide d’adopter une proposition concernant des Coupes du monde biennales, les fédérations nordiques devront envisager de nouvelles actions et des scénarios qui soient davantage conformes à nos valeurs fondamentales », peut-on lire dans un communiqué commun publié par ces six fédérations membres de l’UEFA (Danemark, îles Féroé, Finlande, Islande, Norvège, Suède).
LQ/AFP