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Le confinement, pas forcément la période idéale pour se doper


Le dopage quand on est confiné? "Il y a moins de contrôles, et c'est vrai que si certains ont de mauvaises intentions, ils vont les conserver pendant le confinement." (Photo AFP)

La lutte antidopage a mis un genou à terre avec le Covid-19 : les contrôles sont au ralenti, et les sportifs confinés, moins encadrés, apparaissent plus fragiles. Pour autant, cette période ne présente pas forcément un risque accru de dopage, estiment les spécialistes.

« Se doper en ce moment ? Quand on ne sait pas pourquoi, ça ne sert à rien. Aucune compétition n’est prévue, ce serait stupide », résume Jean-Claude Vollmer, membre de la nouvelle « cellule marathon » de la fédération française d’athlétisme, touchée par plusieurs affaires retentissantes de dopage depuis un an.

L’interrogation concernant une possible augmentation du dopage pendant le confinement semble à première vue légitime. En raison de la pandémie, les contrôles ont chuté de manière drastique : ils sont totalement à l’arrêt par exemple en Russie et au Canada. Le président de l’Agence mondiale antidopage (AMA), Witold Banka, a beau rappeler que les « tests ne sont pas l’unique arme dont nous disposons », en citant la poursuite des investigations, la lutte antidopage est privée d’un de ses principaux outils.

« Il y a moins de contrôles, et c’est vrai que si certains ont de mauvaises intentions, ils vont les conserver pendant le confinement », assure Christophe Bassons, ancien coureur cycliste, qui a travaillé pendant plusieurs années pour l’Agence française de lutte contre le dopage (AFLD). Mais l’équation est aussi un peu plus complexe que cela. D’abord parce qu’il y a plusieurs façons de se doper. « Quelqu’un qui veut gagner de la masse musculaire en prenant des anabolisants », la famille des stéroïdes, « il peut le faire, et ensuite il n’aura plus qu’à l’entretenir », reconnaît Christophe Bassons. « Il y a des produits que tu peux prendre tout le temps, comme les stéroïdes. Tu travailles ta masse, ta puissance, tu fais du fond. Ce que tu prends, tu le gardes. Donc là oui, il y a un petit souci », confirme également un acteur européen de la lutte antidopage qui s’exprime sous couvert d’anonymat.

Encore faut-il arriver à se fournir en produits dopants. « Il ne faut pas oublier que quand tu veux prendre des produits dopants, il faut se fournir. Et là en ce moment c’est un peu plus compliqué », explique Christophe Bassons.

Des sportifs toujours soumis à l’obligation de se localiser

Il y a en revanche une certitude : le dopage sanguin, via l’EPO ou les autotransfusions, qui vise surtout à augmenter les capacités d’endurance des sportifs, supporte mal le chaos dans le calendrier provoqué par la pandémie. « Un tricheur de haut vol, il va définir un protocole quasiment sur une année. Il sait exactement quand il va stocker du sang, quand il va faire monter ses valeurs sanguines pour être au top et indétectable le jour d’une compétition. Là, il n’a pas plus de repères », explique l’acteur européen de la lutte antidopage. Les compétitions s’annulent au fur et à mesure, les JO ont été reportés à l’été 2021, et cette absence de visibilité plombe le programme des tricheurs. Un avis que partage Jean-Claude Vollmer: « Les protocoles de dopage sont dessinés pour une date X précise. Se charger pour faire une heure de footing ou deux heures de home trainer ça ne sert à rien ».

Pour Jean-Jacques Menuet, le médecin de l’équipe cycliste Arkea-Samsic, les préoccupations sont ailleurs en ce moment. « Mon combat est avant tout sanitaire et certainement pas d’être dans une réflexion de savoir si les mecs sont en train de ‘se charger’ ou pas. Mon combat, c’est comment je fais pour continuer à les suivre et à maintenir leur moral. » Un autre enjeu.

Enfin, même confinés, et s’ils sont moins contrôlés, les sportifs de haut niveau restent soumis aux contraignantes obligations de se localiser, au quotidien, auprès des agences antidopage dont ils dépendent. « Celui qui décide de partir à la campagne, il doit toujours le signaler. Si on l’apprend dans la presse, il se met à la faute », résume un responsable de l’antidopage.

AFP/LQ