Le gouvernement japonais s’apprête vendredi à prolonger l’état d’urgence sanitaire dans une grande partie du pays, à 56 jours de l’ouverture des Jeux olympiques de Tokyo qui auront lieu, insistent les organisateurs, malgré des inquiétudes persistantes dans la population.
La prolongation de l’état d’urgence jusqu’au 20 juin devrait être formalisée par le gouvernement dans la journée, selon la chaîne de télévision publique NHK. Cette décision vise à consolider l’amélioration de la situation sanitaire constatée ces dernières semaines en vue des JO, selon les autorités.
« Bien que le nombre d’infections baisse à Tokyo et à Osaka (ouest), la situation générale demeure précaire », a déclaré jeudi le Premier ministre Yoshihide Suga. « Nous voulons faire de notre mieux » pour empêcher une nouvelle détérioration, a-t-il ajouté. « Le niveau général (des infections, NDLR) continue d’être très élevé », a aussi souligné vendredi le ministre chargé de la gestion de la crise sanitaire, Yasutoshi Nishimura. « Dans cette situation nous pensons qu’il est nécessaire de prolonger l’état d’urgence ».
Ce dispositif concerne actuellement dix des 47 départements de l’archipel, dont ceux de Tokyo et de sa grande banlieue, Osaka ou encore Kyoto (ouest). Il n’a cependant rien à voir avec les mesures de confinement imposées ailleurs dans le monde, consistant principalement à imposer des restrictions pour les bars et restaurants.
Le gouvernement japonais est critiqué pour la lenteur de son programme de vaccination et pour son insistance à maintenir les Jeux olympiques (23 juillet-8 août), qui constitueront un facteur de risques avec l’arrivée de dizaines de milliers de sportifs, représentants officiels et journalistes du monde entier.
Mercredi, le journal japonais Asahi, partenaire officiel des JO et deuxième quotidien national en termes de diffusion, a appelé à l’annulation de l’événement qu’il a qualifié de « menace pour la santé ». Il a dénoncé la « nature égoïste » du Comité international olympique (CIO), dont le vice-président John Coates avait déclaré la semaine dernière que les JO auraient lieu même si Tokyo devait rester en état d’urgence. De multiples sondages d’opinion ces derniers mois témoignent d’une opposition majoritaire de la population japonaise aux JO.
Certains dirigeants de grandes entreprises du pays ont aussi marqué leur hostilité et de nouvelles associations médicales japonaises ont ajouté jeudi leurs voix au concert anti-JO. Dès mars, les organisateurs avaient décidé d’interdire la venue de spectateurs de l’étranger, une première dans l’histoire olympique. Ils doivent se prononcer en juin sur la présence de spectateurs résidant au Japon et, si oui, dans quelle mesure.
Impatience des sportifs
L’immense majorité des athlètes sélectionnés à travers le monde se prépare avec impatience aux Jeux olympiques, même si certains ont exprimé des réserves. Le numéro un mondial de tennis, Novak Djokovic, a déclaré jeudi qu’il reconsidérerait sa participation si le public n’était pas autorisé.
Le président américain Joe Biden s’est lui montré favorable en avril à la tenue des Jeux et, jeudi, l’Union européenne a apporté son soutien aux JO, « symbole de l’unité mondiale pour vaincre le Covid-19 ». Ursula von der Leyen, la présidente de la Commission européenne, a souligné que l’autorisation donnée par l’UE d’exporter plus de 100 millions de doses de vaccins au Japon était « un signe fort du soutien que nous apportons à la préparation des Jeux olympiques et à la sécurité de ces Jeux ».
Le Japon, troisième économie mondiale, est à la traîne pour son programme de vaccination: moins de 2,5% de la population nationale a reçu deux doses pour l’heure, du fait notamment de lourdeurs bureaucratiques. L’archipel nippon a cependant été relativement épargné par la pandémie avec quelque 12.500 décès officiellement recensés depuis début 2020. Et le nombre de nouveaux cas quotidiens d’infections dans le pays tourne actuellement autour de 4.500 en moyenne sur sept jours.
Des élections générales sont prévues au Japon au plus tard en octobre. La cote de popularité du Premier ministre a chuté ces derniers mois, mais sa formation conservatrice, le Parti libéral-démocrate (PLD), qui domine la vie politique japonaise depuis plus d’un demi-siècle, n’est pas vraiment menacée pour le moment, l’opposition apparaissant faible et divisée, selon des experts.
AFP/LQ