Michel Platini a retrouvé depuis ce lundi la justice suisse, comme suspect dans l’affaire qui a brisé son parcours dirigeant, avant de témoigner mercredi dans un dossier distinct visant le patron de la Fifa Gianni Infantino.
Resté plus de six heures au siège du Ministère public de la Confédération (MPC), à Berne, le triple Ballon d’or a été interrogé par le procureur Thomas Hildbrand qui le poursuit pour un paiement suspect de 2 millions de francs suisses (1,8 million d’euros) en 2011, aux côtés de l’ex-président de la FIFA Sepp Blatter.
« Michel Platini a été attentif à l’exposé des éléments et aux interprétations présentées par le procureur Hildbrand. Il demeure très confiant sur le fait que cette procédure lui permette de prouver son intégrité dans ce dossier », a indiqué l’entourage du Français. Selon le parquet, il s’agissait de son « audition finale » avant la clôture de l’instruction. Michel Platini, qui était aussi convoqué mardi mais n’aura pas besoin d’être réentendu, sera ensuite soit mis hors de cause, soit renvoyé devant un tribunal pour y être jugé.
L’ex-numéro 10 légendaire des Bleus est soupçonné d' »escroquerie », « gestion déloyale », « abus de confiance » et « faux dans les titres », des accusations élargies en novembre et passibles de cinq ans de prison.
Sepp Blatter devait également être entendu pour cette affaire mais il est convalescent après avoir été hospitalisé en décembre et janvier, selon son entourage.
Incohérence
Au cœur du dossier, ouvert en 2015 et qui a mis les deux dirigeants au ban du football mondial, le paiement par la FIFA de 2 millions de francs suisses à Michel Platini début 2011, sans justification écrite, sur ordre de Sepp Blatter. Anciens alliés devenus rivaux, Blatter et Platini ont toujours affirmé qu’il s’agissait d’un reliquat de paiement pour un travail de conseiller effectué par le Français entre 1999 et 2002.
Selon les deux hommes, l’accord entre eux remonte au printemps 1998 : Sepp Blatter, entré à la FIFA en 1975 comme directeur du développement mais dépourvu de légitimité sportive, cherchait l’appui de l’ex-champion pour prendre la tête de l’instance.
Mais la FIFA déplore l’absence de contrat écrit mentionnant à l’époque une telle rémunération, et en réclame à Michel Platini le remboursement. Il existe certes une « convention » écrite, signée en 1999, mais elle ne prévoit qu’un salaire annuel de 300 000 francs suisses pour Michel Platini.
Platini comme Blatter ont depuis expliqué cette incohérence en évoquant les « problèmes de liquidité » que connaissait à l’époque la FIFA. Ils auraient donc oralement prévu que le complément de salaire serait versé par la suite, négligeant simplement de le préciser par écrit, relatait le Tribunal arbitral du sport dans une décision rendue en 2016.
Un « complot »
Si le Français, âgé de 65 ans, n’exclut pas un retour aux responsabilités sportives, confiant dans ses chances de se voir blanchi, sa défense a demandé la récusation du procureur Hildbrand, affirmait dimanche le journal Le Monde. Fauché en pleine ascension, Michel Platini est convaincu d’avoir été victime d’un complot monté par Gianni Infantino, son ancien adjoint lorsqu’il dirigeait l’UEFA, pour l’écarter de la course à la présidence de la FIFA.
Or l’ancien champion est également convoqué mercredi à Sarnen, dans le centre de la Suisse, cette fois comme « personne appelée à donner des renseignements » dans l’enquête visant depuis juillet 2020 son ancien rival, selon une information du quotidien Le Monde confirmée par le parquet.
Ce volet porte sur trois rencontres secrètes en 2016 et 2017 entre Gianni Infantino et l’ancien procureur général Michael Lauber, qui ont nourri les soupçons de collusion entre le parquet suisse et la FIFA. Blanchi par la justice interne de l’instance, l’Italo-Suisse juge « absurde » d’être mis en cause pour avoir rencontré un magistrat.
Mais le dirigeant est désormais sous la menace d’une deuxième affaire, pour être rentré en jet privé du Surinam à la Suisse, en 2017, aux frais de la FIFA. Le procureur Stefan Keller, qui voyait fin 2020 dans ce vol une possible « gestion déloyale », vient d’être désigné compétent pour mener l’enquête.
AFP/LQ