Parfaitement lancés dans l’Euro, les Bleus disposent déjà d’un onze de départ bien établi et difficile à concurrencer pour des « coiffeurs » (remplaçants) au CV bien fourni mais au temps de jeu réduit, poussant Didier Deschamps à user de dialogue pour « ne perdre personne ».
Olivier Giroud, Kingsley Coman, Ousmane Dembélé, Thomas Lemar, Corentin Tolisso… Le banc cinq étoiles de l’équipe de France ferait rêver n’importe quelle autre nation européenne. Mais dans l’effectif des champions du monde, difficile de se faire une place. Même durant les deux matches de préparation, le sélectionneur avait marqué les esprits en alignant son onze type, à une exception près : Corentin Tolisso a remplacé N’Golo Kanté, resté avec Chelsea pour la Ligue des champions, puis Adrien Rabiot, légèrement gêné à une cheville.
Le premier match officiel n’a pas inversé la tendance, au contraire. Deschamps n’a procédé qu’à deux changements – sur cinq possibles – mardi contre l’Allemagne (1-0), offrant quatre minutes à Dembélé et dix à Tolisso, dont huit minutes de temps additionnel.
Pendant les trois semaines de préparation à Clairefontaine, l’espoir de voir la hiérarchie légèrement bousculée pouvait exister: Jules Koundé avait marqué des points au poste d’arrière droit, Dembélé et Coman avaient impressionné contre le pays de Galles (3-0) après leur entrée en jeu et Giroud avait signé un doublé face à la Bulgarie (3-0).
Garder « la banane »
Deschamps avait même souligné que « les difficultés (étaient) plus nombreuses à l’entraînement » qu’en match, se réjouissant d’avoir un « groupe qui a du répondant ». Mais l’entrée en lice solide des Bleus à Munich a freiné les ambitions des seconds couteaux : Giroud ne s’est même pas échauffé et Coman n’a pas eu la chance de fouler sa pelouse munichoise… Cela n’a toutefois pas effacé les larges sourires des visages des remplaçants, à l’image d’un Giroud aux anges après le match. Mais la gestion du groupe et des « égos » s’annonce cruciale lors des prochains jours.
« Notre objectif, surtout quand on est en grande compétition, c’est de ne perdre personne. Le premier jour, ils sont tous heureux, ils ont tous la banane. Après, chaque jour qui passe… Il faut accorder autant si ce n’est plus à ceux qui jouent peu ou pas », déclarait Deschamps début mai. « Le domaine le plus compliqué, c’est la gestion humaine, forcément ».
Le vice-capitaine Raphaël Varane a prolongé mercredi cet aspect : « C’est une compétition qui va être éprouvante, on aura besoin de tout l’effectif, que ce soit dans l’attitude, l’ambiance ou sur le terrain », a-t-il lancé. « A tout moment, chaque joueur peut avoir sa chance, pour aider l’équipe et tout le monde en est conscient ». Quant au latéral Lucas Hernandez, il a assuré jeudi qu’ « entre nous il n’y a pas de titulaires et de remplaçants, on est tous les mêmes ».
Réservistes mobilisés
La question est rendue plus épineuse encore par l’élargissement des listes à 26 joueurs, ce qui oblige l’encadrement à placer trois joueurs en tribunes à chaque match. Une règle perçue par le staff comme un couperet supplémentaire planant au-dessus de la dizaine de « réservistes » potentiels…
« Le coach nous l’a dit dès le premier jour : il y aura des choix à faire. Mais cela changera peut-être en fonction des matches », a pointé le milieu Moussa Sissoko, conscient qu’il « n’y aura pas le temps pour tirer la gueule de son coté, car un joueur qui ne sera pas sur la feuille pour un match, pourrait y être sur le suivant voire même le démarrer ». « On aura besoin de tout le monde, sans état d’âme, avec la même envie, la même détermination », avait ajouté le joueur de Tottenham, désigné réserviste mardi aux côtés de Léo Dubois et Marcus Thuram.
Les choix de Deschamps samedi contre la Hongrie, l’adversaire le moins coriace du groupe F, seront ainsi observés. Ils pourraient confirmer un début de hiérarchie entre les remplaçants, que ce soit en attaque – Giroud devant Ben Yedder ? Dembélé devant Coman ? Thuram en queue de peloton ? – ou en défense. Dans ce secteur, par exemple, le novice Koundé semble doubler Dubois, habituelle doublure de Pavard…
« Les matches se gagneront à 26 », a affirmé le capitaine Hugo Lloris avant l’Euro. Le premier s’est surtout gagné à 11. Le défi est désormais de faire comprendre aux 15 autres qu’ils ont aussi leur part dans le succès.
LQ/AFP