L’un, Leipzig, est une étoile montante européenne. L’autre, Dortmund, semble avoir perdu l’étincelle qui en avait fait le « Liverpool allemand » des années 2010 : à la veille de leur rencontre en Bundesliga samedi (18h30), les destins des deux rivaux du Bayern se croisent inexorablement.
Dans ce choc, l’objectif du RB, deuxième à deux points, est de rester au coude à coude avec le leader Munich, pour continuer à rêver. Celui du Borussia, quatrième à déjà huit points ? Éviter d’être totalement décroché après 15 journées seulement.
Dynamiques inversées
Les dynamiques, cette saison, sont inversées. Leipzig surfe sur la lancée de sa demi-finale de Ligue des champions en août (perdue 3-0 contre le Paris SG). Son entraîneur Julian Nagelsmann, à 33 ans, fait plus que jamais figure d’atout numéro un d’un club ambitieux et structuré pour progresser.
Dortmund, modèle par bien des aspects depuis longtemps, se bat au contraire contre ses nouveaux démons: l’inconstance, et les séries noires qui succèdent depuis trois saisons aux moments d’euphorie. « L’équipe est divisée, sans leaders », déplorait en décembre Dietmar Hamann, ancien du Bayern et de Liverpool aujourd’hui consultant. « La classe individuelle ne sert à rien si tu ne joues pas comme une équipe. » Mi-décembre, le coach suisse Lucien Favre a été limogé. Son adjoint Edin Terzic, 38 ans mais aucune expérience de première division comme entraîneur en chef, est devenu le quatrième entraîneur de l’équipe en trois ans et demie.
Cent ans d’écart
Si l’on remonte le temps, les trajectoires des deux clubs sont également incomparables. « A terme, le RB va s’installer dans le premier tiers du championnat et devenir un dangereux adversaire », avait prédit le patron du Bayern Karl-Heinz Rummenigge dès 2017. Il ne s’attendait peut-être pas à ce que les choses aillent si vite. Fondé en 2009 par Red Bull, Leipzig est passé en dix ans de la cinquième division au dernier carré de Ligue des champions. Jamais un club n’avait connu une ascension aussi fulgurante… même si le RB n’a encore jamais gagné un titre.
Dortmund, club associatif fondé en 1909 au temps des mines de charbon, possède en revanche un belle armoire à trophées, mais la poussière du temps commence à les recouvrir. Dernier champion d’Allemagne en 2012 avant que le Bayern ne prenne le pouvoir, le Borussia a encore remporté la coupe nationale en 2017, avec Thomas Tuchel. Depuis, plus rien. Et ses deux deuxièmes places consécutives en Bundesliga ont suscité plus de critiques que d’enthousiasme, tant l’équipe a semblé fragile mentalement face au rouleau compresseur du Bayern. En Ligue des champions, le souvenir de la finale de 2013 (perdue contre le Bayern) est déjà loin. Le BVB n’a jamais dépassé les 8es de finale lors des trois dernières éditions.
Pression contre sérénité
Dortmund peine en fait à assumer son statut de « grand club » depuis le départ de Tuchel en juin 2017, chassé pour incompatibilité d’humeur avec le patron Hans-Joachim Watzke. A chaque début de saison, les commentateurs font du BVB le principal rival du Bayern pour le titre et, à chaque revers, la pression devient énorme sur l’entraîneur et sur l’équipe. Favre en a été victime en décembre.
A l’inverse, Leipzig se distingue par sa sérénité : jamais un coach n’a été limogé depuis l’accession à la Bundesliga. Les successions ont toujours été planifiées, le choix des hommes dicté par une vision à long terme. Les dirigeants n’exigent rien d’autre de Nagelsmann que de continuer à faire grandir le club. Personne ne lui reprochera de ne pas être champion d’Allemagne.
La confrontation samedi pourrait bien ressembler à un passage de témoin. Le vainqueur pourra revendiquer, pour quelque temps au moins, le statut symbolique de « rival numéro un » du Bayern.
LQ/AFP