Grincements de dents en Italie, étonnement en Espagne, sueurs froides en Angleterre, volontarisme en Allemagne : les voisins européens redoutent un effet boule de neige après l’arrêt définitif de la saison de Ligue 1 qui se dessine sur l’injonction du gouvernement français.
Alors que le championnat des Pays-Bas est officiellement arrêté et celui de Belgique devrait suivre la même voie, le Premier ministre français Édouard Philippe a annoncé mardi que les matches ne pourraient pas reprendre avant au moins le mois d’août en France.
À Rome, le ministre italien des Sports, Vincenzo Spadafora, très réservé quant à une reprise de la Serie A, s’est tout de suite engouffré dans la brèche : « Les décisions que sont en train de prendre d’autres pays, comme la France hier (mardi), pourraient pousser l’Italie à suivre elle aussi cette ligne, qui deviendrait alors une ligne européenne », a-t-il déclaré mercredi à la télévision.
« Je vois un sentier de plus en plus étroit pour la reprise du championnat. Si j’étais un président de club de football, je penserais surtout à m’organiser pour reprendre en sécurité le prochain championnat qui devra débuter fin août », a-t-il insisté. Après des semaines d’hésitation, le monde du football italien s’est pourtant enfin mis en ordre de bataille et présente un front commun favorable à la reprise. « Si nous ne repartons pas, nous risquons des dégâts irréparables », a estimé mardi Claudio Lotito, le président de la Lazio Rome, principal défenseur d’un retour sur les terrains.
En Espagne en revanche, le chef du gouvernement Pedro Sanchez, a annoncé quelques heures après le discours de son homologue français que les équipes de Liga pourraient s’entraîner à nouveau à partir de lundi, avec de strictes conditions de sécurité. « Je ne comprends pas en quoi il y aura plus de risque à jouer des matches de football à huis clos, avec toutes les mesures de précaution, que de travailler sur une chaîne de montage ou sur un bateau de pêche en haute mer », a tonné Javier Tebas, le patron de la Liga, l’organe qui gère le football professionnel en Espagne. Lui qui pousse pour reprendre au plus vite le championnat espagnol a assuré que le football professionnel pourrait « finir par disparaître » s’il n’est pas autorisé à reprendre « de manière sûre et contrôlée ».
L’UEFA pense qu’il est « possible » de reprendre
En Angleterre, le gouvernement se montre prudent mais bienveillant devant le projet « Restart » (redémarrage) élaboré par la Premier League, qui prévoit selon la presse un retour à l’entraînement le 18 mai et vise un retour à la compétition le 8 juin, à huis clos et dans un petit nombre de stades pour limiter les déplacements. Mais l’ancien joueur Gary Neville s’est insurgé mercredi à la télévision sur une approche « purement économique » alors que le risque sanitaire est réel : « Combien de gens doivent mourir en jouant au football en Premier League avant que cela devienne gênant ? Un joueur ? Un membre de staff en soins intensifs ? ».
En Allemagne en revanche, les ministres des sports des Länder – les États régionaux – ont accepté le principe d’une reprise « mi-mai ou fin mai » et à huis clos du championnat, ce que souhaitaient les clubs. « Il s’agit ni plus ni moins de sauver le football », avait martelé lundi le patron du Borussia Dortmund, Hans-Joachim Watzke. « Nous devons jouer aussi vite que possible. Chaque semaine de retard rend la situation plus critique. Si on reprend en juin, on peut laisser tomber », a-t-il insisté mardi, évoquant un signal fort pour le reste du monde, « un certificat de qualité de ce que les Allemands ont accompli dans cette crise ».
« La situation sanitaire varie d’un pays à l’autre, donc les décisions en France et aux Pays-Bas sont différentes de celles en Allemagne, où la situation est mieux gérée », a fait valoir l’ancien international français du Bayern Munich Willy Sagnol, sur le site Sport1.de, tout en s’interrogeant : « Que se passera-t-il si un joueur ou un entraîneur attrape le virus ? ».
Désireuse de reprendre la saison pour sauver sa lucrative Ligue des champions, l’UEFA a pour sa part réaffirmé mercredi qu’il était « possible » sanitairement d’achever l’exercice 2019-2020. « Toutes les organisations qui prévoient une reprise de leurs compétitions fourniront un protocole complet (…) afin de s’assurer que la santé de ceux impliqués est protégée », a assuré Tim Meyer, président du comité médical de l’UEFA.
À l’inverse, le président de la commission médicale de la FIFA, Michel d’Hooghe, s’est montré « très sceptique » sur un retour à la compétition cette saison.
AFP/LQ