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Xavier Bettel à l’opposition : «Oui, on a des ADN différents»


«Mieux vaut avoir trois avis au sein d'une même coalition que trois avis dans un seul parti», a notamment tancé le premier ministre à destination de l'opposition (Photo : Julien Garroy).

C’est au bout de 11 heures de débats, répartis sur deux jours, que s’est refermé le chapitre état de la Nation. Fustigé par l’opposition, le Premier ministre est venu défendre les choix posés par la coalition tricolore.

En fin de compte, ce sont 16 députés qui sont montés à la tribune de la Chambre pour commenter la déclaration sur l’état de la Nation du Premier ministre. Le CSV arrive largement en tête avec cinq orateurs (Martine Hansen, Gilles Roth, Marc Spautz, Marc Lies et Laurent Mosar), suivi du LSAP (Georges Engel, Francine Closener et Yves Cruchten), du DP (Gilles Baum et Gusty Graas), de déi gréng (Josée Lorsché et François Benoy), de l’ADR (Fernand Kartheiser et Roy Reding), de déi Lénk (Marc Baum) et enfin du Parti pirate, qui, avec son élu Sven Clement, a été jeudi le dernier parti d’opposition à prendre la parole.

Comme ses collègues du camp de l’opposition, il n’a pas épargné le gouvernement tout en dressant les risques que font courir un nationalisme et un populisme grandissants. «Bon nombre de personnes se sentent aujourd’hui décrochées. Elles sont donc réceptives aux réponses simplistes avancées par le bord extrémiste. Je regrette d’autant plus le fait que le Premier ministre se contente de maintenir le système social actuel, ce qui équivaut à maintenir les inégalités et injustices qui ne cessent de se creuser», souligne d’emblée Sven Clement. «La pandémie ne doit cependant pas être une excuse pour ne pas sortir du statu quo. Le pays vit bien une grave crise sanitaire, mais il ne s’agit pas du seul problème qui se présente à nous. Il existe aussi une crise climatique, une crise du logement et une crise sociale», enchaîne le député pirate. Dans cet ordre d’idées, Sven Clement réclame que le système fiscal soit réformé au plus vite. «Il n’est plus acceptable qu’un célibataire ou un monoparental soit moins bien loti sur le plan fiscal que ceux qui ont la chance de vivre en couple», clame-t-il. Un mécanisme de redistribution plus efficace, une augmentation «drastique» de l’offre de logements abordables («Emprunter pour investir dans la pierre est dans l’intérêt des générations futures») et une véritable politique climatique («Il faut être sincère et dire que le bilan actuel est misérable») sont les autres points énoncés par le député d’opposition.

Le CSV en ligne de mire

Pressé de rejoindre Bruxelles pour assister au sommet européen, le Premier ministre a finalement pu livrer sa réplique au bout de près de 11 heures de débats, répartis sur deux jours. Sa conclusion s’est voulue conciliante : «Je savais d’emblée que nous n’allions pas être d’accord, mais il est important d’avoir cet échange démocratique empreint de respect. Ce n’est qu’ensemble que nous pouvons être forts. Cela vaut aussi bien à l’extérieur qu’à l’intérieur des murs de la Chambre.»
Auparavant, Xavier Bettel n’a cependant pas manqué de dénoncer à son tour les contradictions et incohérences affichées par les intervenants des partis d’opposition. Comme souvent, le CSV s’est retrouvé dans sa ligne de mire. «Si j’avais lu son programme électoral, j’aurais eu les mêmes réactions négatives», ironise le Premier ministre, qui avait pour objectif premier de souligner l’unité qui caractérise la coalition tricolore. «On nous reproche de ne pas avoir la même vue sur les questions fiscales. On ne peut pourtant pas nous reprocher d’avoir des ADN différents. Mieux vaut avoir trois avis au sein d’une même coalition que trois avis dans un seul parti. Le DP, le LSAP et déi gréng ont au moins trouvé un accord commun», persiste Xavier Bettel.

Le chef du gouvernement rappelle une nouvelle fois que l’accord de coalition continue de primer :  «Cela ne veut pas dire qu’il est interdit aux trois partis de la majorité de discuter d’autres positions. Il faut juste savoir que de nouvelles initiatives ne seront pas réalisées pendant cette législature.» Xavier Bettel mentionne entre les lignes le débat sur l’introduction de nouvelles taxes sur la fortune. Par contre, la réforme fiscale ayant comme objectif l’individualisation de l’imposition resterait à l’ordre du jour. «Nous savons que cela aura un coût que nous ne pouvons pas supporter pour l’instant», note le Premier ministre, sans citer de date précise pour cette réforme majeure.

S’il salue le «consensus» qui existe dans le domaine de la santé, le Premier ministre est revenu avec plus d’insistance sur le logement. «Je ne souhaite pas accabler le CSV qui a tenu pendant 30 ans les rênes du ministère du Logement. Peu importe qui a eu et à quel moment une responsabilité. Ce qui compte pour les personnes en quête d’un logement est que nous agissions ensemble pour avancer plus rapidement», avance Xavier Bettel.

«Il n’est pas juste d’affirmer que l’on s’endette trop. Nous faisons des investissements qui ne constituent pas des dettes pour les générations futures. Personne dans la majorité n’est un fétichiste de l’austérité. C’est le moment d’investir dans la relance pour redonner des perspectives aux gens», termine le Premier ministre en défendant le projet de budget 2021.

David Marques