Un consensus a été trouvé parmi les députés pour revoir la procédure d’état d’urgence en cas de menace terroriste sur le pays. Pour ce faire, une révision de la Constitution s’impose.
La redéfinition de l’état d’urgence prévoit, entre autres, un contrôle parlementaire, à l’instar de ce qui se fait à l’Assemblée nationale française.
L es attentats terroristes qui ont endeuillé l’année 2015 ont forcément des répercussions au niveau national. Après avoir annoncé des mesures antiterroristes quelques jours après les attentats du 13 novembre à Paris, le Premier ministre, Xavier Bettel, avait également déposé un projet de loi, le 1 er décembre, au Parlement. « À situation exceptionnelle, mesures exceptionnelles », avait-il justifié devant les parlementaires. Mais une partie de ces derniers, dont ceux du principal parti d’opposition, le CSV, en voulaient plus, estimant que l’allongement de la durée des gardes à vue pour la porter à 48 heures ou encore celle des horaires de perquisition par la police n’allaient pas assez loin. Un certain nombre de députés avaient ainsi prôné une réforme des modalités du déclenchement de l’état d’urgence dans le Grand-Duché, afin de pouvoir donner une réponse immédiate à toute menace terroriste avérée .
Dans nos colonnes, le président du groupe parlementaire du CSV, Claude Wiseler, avait circonscrit la problématique : « Je distingue deux types de mesures. Tout d’abord, celles d’ordre général, dont le CSV approuve le principe (…) Je les distingue des mesures temporaires de réaction à un « état d’urgence ». Le cadre de celles-ci doit pouvoir être élargi, notamment par une révision de la Constitution qui ne prévoit la possibilité de faire des règlements d’urgence qu’en cas de « crise internationale » et non « nationale » », avait-il déclaré le 21 décembre dernier. Or toute révision de la Constitution et en l’occurrence de l’alinéa 4 de l’article 32 ( l ire encadré ci-dessous ) implique inévitablement une majorité des deux tiers des députés, soit le vote d’au moins 40 parlementaires sur un total de 60.
L’état d’urgence ne pourra dépasser six mois
Les députés de la majorité ne peuvent donc pas se passer des voix du principal parti d’opposition, le CSV. Il fallait donc trouver un consensus satisfaisant pour tout le monde et il a été trouvé mercredi dernier en commission parlementaire. Une nouvelle disposition constitutionnelle y a en effet été adoptée et sera transférée au Conseil d’État la semaine prochaine.
Concrètement, le texte prévoit de conférer au gouvernement le pouvoir de prendre des mesures exceptionnelles telles que le fait d’imposer un couvre-feu à la population, sans avoir recours à une loi ou sans devoir abroger une loi existante. À la condition néanmoins d’être en présence de «menaces réelles pour les intérêts vitaux ou les besoins essentiels de tout ou d’une partie de la population». Le texte limite également l’état d’urgence à une durée de dix jours, qui ne pourra être prolongée qu’avec l’accord du Parlement à la majorité qualifiée, sans toutefois excéder une période totale de six mois.
Dans ce cadre, la révision de l’alinéa 4 de l’article 32 de la Constitution prévoira trois types de situation permettant d’édicter des règlements d’urgence : «une grave crise internationale», «une grave crise nationale» et «une atteinte grave à l’ordre public.»
Sur un deuxième point, le déclenchement de l’état d’urgence sera désormais soumis au contrôle parlementaire, comme cela se fait à l’Assemblée nationale française. Cela signifie que le Parlement pourra dorénavant intervenir à tout moment dans un scénario d’état d’urgence, sans devoir être convoqué par le Grand-Duc. Enfin, il ne pourra désormais plus être dissous en situation d’état d’urgence.
Claude Damiani