Le ministre du Travail a finalisé, en concertation avec l’ACEL, un nouveau cadre légal qui rend le statut du stagiaire enfin plus clair. Une augmentation de l’offre de stages est l’un des objectifs poursuivis.
« Contrairement à ce qui se fait en Allemagne, le Luxembourg ne dispose pas d’une véritable culture de stages. Ce nouveau texte de loi doit nous permettre de nous en approcher. » Ces mots sont ceux non pas du ministre du Travail et de l’Emploi mais de Pol Lutgen, le président de l’Association des cercles d’étudiants luxembourgeois (ACEL). C’est en étroite concertation que Nicolas Schmit et son équipe de conseillers ont travaillé ces six derniers mois sur l’élaboration d’un nouveau cadre légal définissant les droits et obligations des stagiaires et de leurs patrons de stage. «On dispose bien d’un cadre légal datant de 1982, mais ce dernier ne tient plus du tout compte des réalités du terrain ainsi que des besoins des élèves et étudiants», souligne le ministre du Travail.
Lundi après-midi, il s’est dit fier de présenter «une nouvelle forme» de travail législatif. «Je partage volontiers la paternité de ce projet de loi avec l’ACEL. Mon objectif a surtout été d’être à l’écoute des jeunes», a souligné Nicolas Schmit aux côtés de Pol Lutgen. «Je tiens à mettre en avant leur attitude pragmatique. Ils n’ont pas insisté sur le volet pécuniaire, mais se sont investis pour offrir aux élèves et étudiants des stages de qualité et à caractère éducatif», poursuit le ministre du Travail et de l’Emploi.
Un appel au patronat
«Aujourd’hui, il n’existe presque plus de formations qui ne prévoient pas une période de stage en entreprise. Or jusqu’à présent, il a été très compliqué pour les jeunes de décrocher un stage sur le marché du travail luxembourgeois. Seuls les stages conventionnés étaient plus ou moins accessibles», détaille le président de l’ACEL. «Le problème majeur est qu’au Luxembourg les employeurs demandent à l’embauche déjà une grande expérience professionnelle. Or sans la possibilité de faire des stages, cette équation ne peut pas être résolue», enchaîne Pol Lutgen.
Profitant de la tribune offerte par le ministre du Travail, l’ACEL a lancé un «appel aux entreprises pour ouvrir davantage leurs portes aux stagiaires». «Il faut aussi regarder ce que ces stages peuvent apporter aux entreprises. Un problème majeur est en effet aussi le recrutement de jeunes talents qualifiés», complète Nicolas Schmit.
Approche pragmatique
Le futur cadre légal pour stagiaires (lire encadré), validé vendredi dernier par le Conseil de gouvernement, doit donc s’avérer être une opération de type «gagnant-gagnant». L’ACEL avait contacté une première fois Nicolas Schmit dans ce dossier en avril 2017. En juin, une première entrevue a eu lieu. Les travaux préparatoires se sont poursuivis lors de la Réunion européenne des étudiants luxembourgeois fin septembre à Cologne et Bonn. Les travaux concrets se sont déroulés entre novembre et février. «On est quelque peu surpris que cela ait été possible en moins d’un an», avoue le président de l’ACEL.
Mais cela prouve aussi que le camp politique peut à la fois être à l’écoute des jeunes et se montrer très pragmatique. Reste à la Chambre des députés et au Conseil d’État à avancer également dans les meilleurs délais sur ce texte. Le projet sera déposé demain au Parlement. Un vote avant la fin de la législature est l’objectif annoncé. Une entrée en vigueur du texte dès la rentrée de septembre pourrait en effet grandement faciliter la vie à tous ceux qui se trouvent aux portes du marché de l’emploi. À bon entendeur…
David Marques
Intégré au code du travail
Le nouveau cadre légal sur l’accueil de stagiaires fera partie intégrante du code du travail. «Les patrons de stage seront donc obligés de respecter les dispositions de congé et de santé et de sécurité au travail», souligne le ministre Nicolas Schmit. Le nouveau texte prévoit deux catégories de stage :
›Les stages conventionnés (obligatoires) : aussi bien les lycées que les hautes écoles et universités rendent aujourd’hui obligatoires des stages en entreprise pour compléter une formation. Le texte de loi prévoit la conclusion d’une convention de stage entre le stagiaire, le patron de stage et l’établissement scolaire. La durée maximale de ces stages conventionnés est fixée à neuf mois. La rémunération reste facultative, mais les patrons de stage doivent respecter le code de travail en matière notamment d’attribution des jours de congé.
›Les stages non conventionnés (volontaires) : pour la première fois, ces stages sur base volontaire – «afin d’étoffer le CV et pouvoir mieux s’orienter notamment entre son bachelor et son master», dixit Pol Lutgen – feront aussi l’objet d’une convention de stage. Sur une période de référence de deux ans, le jeune pourra effectuer des stages d’une durée maximale de douze mois, dont au maximum six mois chez un seul patron. Les 2e et 3e mois devront être rémunérés à hauteur de 30% du salaire social minimum non qualifié (600 euros). Au-delà de trois mois, une rémunération à hauteur de 50% du SSM non qualifié (1 000 euros) devra être versée au stagiaire.
›Afin d’éviter les abus, les patrons de stage seront obligés de mettre en place un registre de leurs stagiaires. L’Inspection du travail et des mines (ITM) pourra contrôler ce registre, qui doit être accessibles aux délégations du personnel. De plus, une entreprise ou organisation ne pourra pas accueillir plus de 10% de stagiaires à la fois.