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[Tribune] Absurdité transatlantique : pourquoi Trump se trompe


(Photo : afp)

Le secrétaire des jeunes démocrates Hugo da Costa et la députée libérale Corinne Cahen prennent position après les propos de Trump estimant que l’Europe «profite» des États-Unis.

Donald Trump affirme que l’Union européenne a été créée pour «arnaquer» les États-Unis. Une déclaration audacieuse, qui ne pourrait être plus fausse. «L’UE a été fondée pour profiter de nous», a récemment déclaré l’ancien président américain dans une interview. Pourtant, un simple regard sur l’histoire et les liens économiques transatlantiques suffit pour comprendre qu’il ne s’agit que d’un discours populiste et, surtout, profondément absurde.

L’UE n’est pas un projet anti-américain, mais une véritable «success story» transatlantique – une histoire que les Américains eux-mêmes ont coécrite. Après la Seconde Guerre mondiale, les États-Unis ont activement participé à la stabilisation économique et politique de l’Europe.

Le plan Marshall a été un élément clé de la reconstruction européenne. De plus, l’OTAN, avec les États-Unis en tant que force dominante, garantit la sécurité de l’Occident. Une Europe forte n’a jamais été un problème pour Washington, bien au contraire : cela a toujours été une nécessité stratégique. Les États-Unis ont très vite compris qu’une Europe stable non seulement garantissait la paix sur le continent, mais aussi renforçerait leur propre influence. Une Europe divisée et économiquement affaiblie aurait facilement ouvert la porte aux Soviétiques – un scénario que Washington voulait éviter à tout prix. C’est pourquoi les États-Unis ont non seulement soutenu des programmes d’aide économique, mais aussi encouragé l’intégration politique du Vieux Continent.

Il ne faut pas oublier que la dépendance européenne en matière d’industrie militaire est également en grande partie due à l’influence américaine. La contrepartie de la protection américaine a toujours été le soutien européen à l’industrie de défense des États-Unis. De plus, Washington exerce fréquemment une influence considérable sur l’Europe, notamment dans le secteur financier.

Un exemple concret est le Foreign Account Tax Compliance Act (FACTA), qui oblige les institutions financières européennes à fournir aux autorités fiscales américaines des informations sur les titulaires de comptes américains.

Aujourd’hui encore, les États-Unis maintiennent cette pression, tout en remettant en cause certaines législations européennes, comme le Digital Services Act, qui va à l’encontre des intérêts de figures influentes comme Elon Musk et d’autres milliardaires de la tech, proches de Trump.

Sur le plan économique, l’UE est tout sauf un adversaire. Bien au contraire : ce partenariat économique est l’un des plus rentables au monde. En 2023, les échanges commerciaux entre les États-Unis et l’Union européenne ont atteint plus de 1 600 milliards d’euros, et près de six millions d’emplois aux États-Unis dépendent directement de ces échanges.

Même si des désaccords surgissent parfois, l’UE n’a jamais été un ennemi des États-Unis, mais bien un partenaire à part entière. L’idée que l’Europe s’enrichit aux dépens des États-Unis est non seulement fausse, mais aussi dangereuse et à courte vue.

Car la rhétorique de Trump ne nuit pas seulement aux relations transatlantiques : elle sert directement les rivaux de l’Occident et les ennemis de la démocratie. Russie et Chine se réjouissent de toute division au sein de l’alliance euro-américaine. Un partenariat transatlantique affaibli offre davantage d’opportunités aux régimes autoritaires.

Les déclarations de Trump sur l’UE ne sont pas seulement trompeuses, elles sont toxiques. Elles mettent en péril un partenariat fondé sur des valeurs communes, des intérêts économiques et une coopération en matière de sécurité. La réalité est pourtant claire : l’UE n’est pas l’ennemie des États-Unis, mais l’un de leurs alliés les plus importants. Le nier, c’est jouer avec le feu et risquer la stabilité de tout l’Occident.

Nous devrions nous inspirer de John F. Kennedy, qui décrivait déjà si bien la relation unique entre l’Europe et l’Amérique : «L’Amérique et une Europe unie peuvent, dans un partenariat large et efficace, apporter des solutions aux problèmes urgents auxquels l’humanité tout entière est confrontée en ces temps décisifs.»

Hugo da Costa
(étudiant en droit, conseiller communal à Betzdorf et secrétaire général des Jonk Demokraten).

Corinne Cahen
(entrepreneure, députée du DP, échevine de la Ville de Luxembourg et ancienne ministre et présidente de parti).