Le projet de loi relatif aux sanctions administratives destinées à lutter contre les petites incivilités est toujours dans les tuyaux et ne met pas tout le monde d’accord.
Le sujet est loin de faire l’unanimité. L’extension des compétences des agents communaux et l’introduction de sanctions administratives communales font grincer les dents du parquet depuis quatre ans, date à laquelle il a émis son premier avis sur le projet de loi déposé par l’ancien ministre de l’Intérieur Dan Kersch.
Le syndicat des villes et communes (Syvicol) se réjouit, au contraire, du texte proposé par le gouvernement «qui répond à une longue revendication des communes en matière de police administrative», rappelle le syndicat dans son dernier avis complémentaire. Le texte a fait des allées et venues et les derniers amendements gouvernementaux témoignent de sa volonté à faire adopter une loi au forceps s’il le faut, du moment qu’il donne satisfaction aux communes.
Las de voter des règlements communaux de police générale qui restent sans effets à cause du manque de disponibilité et de moyens de la police grand-ducale, les bourgmestres réclament depuis longtemps des agents municipaux autorisés à infliger des sanctions administratives pour lutter contre toutes les petites incivilités qui importunent les habitants.
«Contrairement à la police judiciaire, la police administrative générale vise à prévenir les troubles à l’ordre public au sens large, sur un territoire donné et à l’égard de toute activité ou de toute personne», précise le Syvicol. Les auteurs du projet de loi soulignent eux-mêmes que «le maintien de la sécurité, de la tranquillité et de la salubrité publique est une mission historique et fondatrice des communes».
Certes, mais venir le troubler est déjà passible de poursuites pénales. Le parquet qui s’interroge sur le rôle du futur «fonctionnaire sanctionnateur», constate que ses critiques n’ont pas été prises en compte et regrette que le risque persiste de voir s’opposer une amende administrative avec d’éventuelles poursuites pénales. «Tel est notamment le cas de toute disposition susceptible d’être qualifiée de tapage nocturne, mais aussi pour tous les faits en relation avec la voie publique, matière réglée par l’arrêté grand-ducal du 23 novembre 1955 et punissable pénalement», illustre le parquet dans son avis.
Que fera la police grand-ducale sachant qu’un même fait peut-être pénalement ou administrativement constaté? «Il y aura dans ce cas une source d’insécurité juridique flagrante», fait observer le parquet.
Sans compter que pour certains faits, se pose toujours la question des pouvoirs d’enquête des agents municipaux afin d’identifier la personne à laquelle le fait peut être imputé. Ils ne peuvent agir qu’en flagrant délit et doivent se limiter aux faits dont ils ont été les témoins directs. Le Conseil d’État critique cette absence de pouvoirs d’enquête qu’il considère comme une des «faiblesses majeures» du système envisagé, comme le rappelle le parquet.
Des pouvoirs spécifiques d’OPJ
En l’état actuel du texte et faute de précision, l’agent municipal pourra uniquement constater les contraventions au règlement de police générale et en dresser procès-verbal, aucun autre acte ne pourra être posé comme rassembler des preuves, recevoir les déclarations de témoins ou procéder à une vérification d’identité. Le Syvicol propose d’attribuer aux agents municipaux qui ont réussi à l’examen de promotion de leur carrière des pouvoirs spécifiques de police judiciaire expressément définis.
Le projet de loi auquel tiennent tant les communes paraît donc encore bancal et demande à être retoqué pour satisfaire aussi bien au parquet qu’aux communes. Mais il est urgent.
«La police ne dispose pas de suffisamment de moyens pour être efficacement au service des missions communales et les autorités judiciaires classent bien souvent sans suite des infractions qu’elles considèrent comme d’importance mineure», se plaint le Syvicol.
Au rang des petites incivilités qui empoisonnent la vie quotidienne des citoyens, les déchets sauvages figurent en bonne place. Un véritable fléau pour les communes, selon le Syvicol, et qui ne cesse de s’amplifier. Pour le syndicat, les agents municipaux devraient être habilités à constater certains des faits punis par les lois environnementales et dresser un avertissement taxé.
Geneviève Montaigu