La réforme des services de taxi de 2016 n’était pas allée assez loin. Une nouvelle loi ouvrele marché à la concurrence et aux VLC de type Uber pour faire baisser les prix.
«Hep taxi!» Au Luxembourg, surtout depuis que les transports en commun sont gratuits, on hésite avant d’appeler un taxi. En cause : les tarifs pratiqués. Parmi les plus hauts de l’Union européenne. La réforme des services de taxi de 2016 devait faire bouger les choses mais le contraire s’est produit, les prix ont augmenté. Un nouveau texte de loi qui entrera en vigueur le 1er janvier 2022 devrait remédier au problème.
3,80 euros du kilomètre au lieu de 3,30 euros avant la réforme de 2016, ce sont les prix les plus élevés pratiqués au Luxembourg, selon le ministre de la Mobilité, François Bausch, dans une réponse parlementaire du mois d’octobre dernier. Des tarifs dus, selon les exploitants de sociétés de taxi, à la réforme qui les a obligés à engager des frais, notamment pour l’achat de voitures zéro émission et, selon le ministre, au quasi-monopole de deux ou trois entreprises sur le secteur. D’où l’intérêt de l’ouvrir à d’autres acteurs comme les VLC, les voitures de location avec chauffeur. Là où la réforme de 2016 avait échoué, l’avant-projet de loi adopté vendredi par le conseil de gouvernement doit réussir.
De l’autre côté de la frontière, à Metz et à Nancy, le géant américain Uber, qui souhaite depuis 2016 poser ses roues sur le sol luxembourgeois, trépigne d’impatience. Des discussions avaient eu lieu, mais elles n’avaient pas abouti en raison de la nécessaire adaptation de son modèle économique aux normes sociales et aux taxes appliquées au Grand-Duché. L’affaire avait capoté. En mai 2019, lors de la présentation de son plan d’action en matière de sécurité routière, François Bausch avait indiqué qu’une ouverture du marché ne devait pas se faire aux dépends des chauffeurs et qu’il ne souhaitait pas «qu’on en arrive à l’esclavage», mettant ainsi en doute les pratiques du géant américain.
Le découpage territorial aboli
Pas question pour le ministre de déroger au droit du travail, aux impôts et à la sécurité sociale. L’avant-projet de loi vient préciser les règles concernant les VLC, notamment en ce qui concerne les infractions, l’absence des droits essentiels pour leurs clients et l’extension du cadre légal aux voitures de location avec chauffeur. «L’introduction des règles identiques à celles applicables pour les taxis permettra d’ouvrir le secteur à de nouveaux acteurs, tout en veillant à l’application des droits essentiels du travail et de la sécurité sociale», indique le ministère. «Dans ce contexte, le projet distingue les services de taxi et de VLC. Alors que les taxis peuvent être pris ad hoc, la course en VLC doit être commandée moyennant une documentation détaillée reprenant notamment les dates et heures de la réservation ainsi que de la course à effectuer.»
Le projet de loi prévoit aussi une série d’autres modifications par rapport à la législation existante. Un des changements majeurs consiste en l’abolition des zones géographiques dévolues aux sociétés de taxi qui pourront opérer sur l’ensemble du territoire du Luxembourg. Jusqu’à présent, un taxi de Luxembourg-ville pouvait transporter un client jusqu’à Esch-sur-Alzette par exemple, mais n’avait pas le droit de prendre de course depuis la métropole du Fer et revenait donc à vide vers la capitale.
Il a également été décidé d’abolir la limitation du nombre de licences émises et la différenciation entre licences ordinaires et licences zéro émission. «Cette libéralisation permet aux exploitants de mieux gérer leur parc automobile en fonction de la situation économique du marché», indique le ministère. «En ce qui concerne les critères environnementaux, ceux-ci ne se jugent plus uniquement sur un seul véhicule, mais sur l’ensemble du parc automobile d’un exploitant de façon à réduire de manière considérable les émissions de CO2 des taxis et VLC d’ici 2025.»
Enfin, dans l’optique d’améliorer la qualité de service des conducteurs de taxi, chaque nouveau conducteur devra passer un examen obligatoire et l’âge maximal pour un conducteur est fixé à 70 ans. De même, il sera interdit au conducteur de fumer dans son véhicule pendant son service, même en absence d’un client ; les conducteurs devront accepter les paiements par carte bancaire et conduire à leurs frais les clients à un guichet automatique bancaire en cas de panne du terminal bancaire ou encore choisir le trajet le plus économique pour le client et non plus forcément le plus court.
Sophie Kieffer