La Stëmm vun der Strooss est parvenue à ne jamais fermer ses portes aux plus démunis durant l’année 2020, même si cela a demandé quelques aménagements.
Vent debout, la Stëmm vun der Strooss, qui œuvre en faveur de l’intégration sociale et professionnelle des personnes défavorisées, a tenu bon tout au long d’une année 2020 bien sûr marquée par la pandémie et les multiples mesures sanitaires. Il a fallu se réorganiser, vite et bien, pour pouvoir continuer à venir en aide aux personnes les plus démunies, mais l’association est parvenue à rester ouverte pendant tout le confinement et également à offrir de quoi manger à ceux qui en avaient besoin. Près de 4 700 personnes ont ainsi pu faire appel aux différents services proposés par la Stëmm durant cette année si particulière.
«Comme nous ne pouvions laisser entrer personne dans nos locaux au début de la pandémie, nous avons servi des repas, gratuitement, sur le trottoir», rappelle Bob Ritz, chargé de communication pour la Stëmm vun der Strooss. Cette opération en pleine rue a duré au-delà du confinement dans la commune d’Esch-sur-Alzette, où les locaux, trop petits, ne permettaient pas le respect de la distanciation sociale.
En 2020, la Stëmm, qui a dressé récemment son bilan pour l’an passé, a ainsi réalisé précisément 101 190 repas. Si le chiffre peut paraître élevé, c’est toutefois 7,7% de moins qu’en 2019. «Cette diminution est liée aux trois mois durant lesquels les repas ont été offerts gratuitement, et n’entrent donc pas dans les statistiques», souligne le chargé de communication.
Un lien social fragilisé
L’ASBL a fort heureusement continué à recevoir des dons tout au long de l’année, qui ont permis de mettre en place de nouveaux aménagements afin d’accueillir au mieux les personnes vulnérables une fois que cela a été possible.
«Nous avons loué, grâce à un partenariat avec la fraternité Verbum Spei d’Esch, une nouvelle salle qui permet de laisser entrer 20 personnes en même temps. Dans la même optique de pouvoir accueillir davantage de personnes tout en respectant les mesures sanitaires en vigueur, la terrasse du restaurant social à Hollerich a pu être réaménagée. Grâce à Majany, partenaire de longue date de l’ASBL, une collecte de dons a été lancée. Cette initiative a quant à elle permis d’installer un auvent démontable avec un toit et des murs relevables ainsi que des chauffages, financé aussi pour une part par le ministère de la Santé», explique Bob Ritz, qui témoigne avec gratitude : «Nous avons reçu un grand soutien de la part d’entreprises, de particuliers et de fondations. C’était vraiment une année solidaire.»
Un bémol toutefois : l’année 2020 a porté un coup au lien social que s’échine à créer la Stëmm et qui est si important pour des personnes déjà fragilisées et isolées. Les 170 personnes en réinsertion professionnelles ont ainsi dû rester confinées chez elles à partir de la mi-mars, en raison de leur vulnérabilité et parce que la Stëmm s’est retrouvée dans l’impossibilité d’employer autant de monde qu’à l’accoutumée.
Un lien également mis à mal entre les bénéficiaires et les éducateurs de l’ASBL. «Lorsque nous avons pu rouvrir les portes de nos restaurants sociaux, du fait de la distanciation sociale en vigueur, nous avons dû limiter alors l’accès à 30 minutes, afin de pouvoir accueillir tout le monde. C’était compliqué pour les personnes à la rue, qui avaient l’habitude de rester plus longtemps pour discuter entre elles et avec les éducateurs. Et en plus, cela a créé des files d’attente assez importantes», fait savoir Bob Ritz.
Mais désormais les choses s’améliorent peu à peu. «Les gens peuvent s’assoir ensemble, à 2 ou 4, comme dans les restaurants classiques. Ça discute plus, c’est déjà mieux.»
Tatiana Salvan
Un nouveau service : la Kanner Stëmm
Un nouveau service a vu le jour en juin 2020 : la Kanner Stëmm, un service de pédiatrie sociale qui permet désormais à la Stëmm vun der Strooss d’apporter son aide aussi aux plus petits. Situé au 113 avenue Gaston-Diderich à Luxembourg, ce service est destiné à cibler et soutenir les enfants vulnérables ainsi que leur famille, victimes (ou qui pourraient le devenir) de maltraitance. Dans ce cadre, une pédiatre sociale établit un projet thérapeutique en fonction d’un diagnostic médical élaboré en collaboration étroite avec les professionnels médicaux et les structures sanitaires impliquées.
La Stëmm en chiffres
En 2020, la Stëmm vun der Strooss, c’était :
· 101 190 repas soit -7,7% par rapport à 2019 (dont trois mois sans statistiques)
· 4 672 personnes différentes qui ont fait appel aux services de la Stëmm soit -4%
· 84 tonnes de denrées alimentaires redistribuées gratuitement, soit -33%
· 239 personnes encadrées sur cinq sites, dans les ateliers de réinsertion professionnelle (-7%)
· 31 personnes relogées dans le cadre de l’activité Immo Stëmm
· 169 consultations gratuites offertes par les médecins bénévoles du Docteur Stëmm
· 1 622 personnes qui ont pu prendre une douche gratuitement, soit -62,4%
Des locaux plus grands pour les ateliers
Malgré la crise sanitaire, l’année 2020 aura marqué un tournant positif pour la Stëmm vun der Strooss, qui a vu la finalisation des plans et l’obtention du permis de construire de son nouveau bâtiment, le Caddy Schweesdrëps 2, sur la commune de Sanem.
Avec ce projet, adopté en Conseil de gouvernement le mois dernier, la Stëmm pourra regrouper en un seul endroit trois de ses ateliers : Caddy, Schweesdrëps et Immo Stëmm. «Les locaux habituels, trop petits, n’étaient plus adaptés et rendaient le travail logistique plus difficile, explique Bob Ritz, chargé de communication pour la Stëmm vun der Strooss. Ce nouveau site va permettre un travail plus efficace et d’augmenter la productivité.»
L’atelier Caddy, situé actuellement à Bonnevoie, propose des mesures de réhabilitation et de réinsertion professionnelle à une vingtaine de personnes se trouvant dans une situation difficile tant sur le plan personnel que social ou professionnel. Ces personnes sont chargées de récupérer les aliments de l’hypermarché Auchan bientôt périmés et qui ne peuvent plus être remis en rayons, de les retravailler puis de les fournir aux restaurants de la Stëmm à Esch-sur-Alzette et à Hollerich, ainsi qu’à d’autres associations de Luxembourg qui les redistribuent directement aux personnes à la rue. «Évidemment, la méthode HACCP est respectée. La sécurité alimentaire est garantie!», précise Bob Ritz.
Cet atelier fusionnera donc avec le Schweesdrëps, un autre atelier de la Stëmm situé lui à Esch-sur-Alzette. Au sein de cet atelier thérapeutique, une trentaine de personnes en réinsertion professionnelle proposent aux clubs sportifs du Sud de nettoyer leurs tenues et au besoin, de les raccommoder. «Cet atelier à caractère productif permet aux personnes «mises au travail» de réaliser un travail de qualité qui demande une certaine discipline ainsi qu’une bonne organisation, mais aussi une capacité de travailler sous pression, vu le rythme imposé par le calendrier sportif», explique Bob Ritz.
Les deux ateliers seront rejoints dans le nouveau bâtiment par le service Immo Stëmm, chargé de trouver des logements abordables aux personnes aux revenus modestes. En 2020, 31 personnes ont été logées dans 26 appartements ou studios grâce à ce service qui garantit aux propriétaires le paiement du loyer.
Lutter contre le gaspillage alimentaire
Avec un site plus grand et plus pratique, le projet Caddy Schweesdrëps 2 va en outre permettre «d’engager 40 personnes supplémentaires se trouvant en réinsertion professionnelle et bénéficiant du revenu d’inclusion sociale dans des métiers comme la cuisine, le transport, la logistique, le ménage, le repassage, la couture ou le service», fait savoir la Stëmm.
Un renfort de main-d’œuvre qui va contribuer à lutter davantage contre le gaspillage alimentaire. En effet, grâce au partenariat de la Stëmm avec Auchan, 500 tonnes de denrées alimentaires pourront être récupérées, retravaillées et redistribuées chaque année, au lieu des 100 tonnes actuelles. «C’est donc un projet social, puisqu’il permet de donner du travail à des personnes en difficulté, mais également environnemental, se réjouit Bob Ritz. Et vu que nous allons récupérer plus d’aliments, nous allons aussi pouvoir en donner plus !»
Entre la construction et l’équipement, le projet, qui devrait être achevé à l’automne 2022, s’élève à près de 6 millions d’euros, auquel l’État apporte un soutien de plus de 4,5 millions d’euros. Reste donc un peu moins de 1,5 million d’euros à trouver pour l’ASBL auprès des particuliers, entreprises et fondations. «Nous avons établi une sorte de liste de mariage sur notre site stemm.lu. Les donateurs peuvent choisir ce pour quoi ils veulent payer : des armoires, des chaises, du matériel de cuisine, etc.» À l’heure où nous écrivons ces lignes, 90 000 euros de dons avaient été récoltés, soit un peu plus de 6% de la somme nécessaire.
Tatiana Salvan