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Spéculation au Luxembourg : une date butoir pour construire


La ministre de l'Intérieur, Taina Bofferding, mise sur un cadre légal renforcé pour contrer la spéculation foncière (photo : Fabrizio Pizzolante).

La ministre de l’Intérieur a présenté jeudi trois instruments pour «endiguer la spéculation foncière». À l’avenir, les propriétaires de terrain devront lancer la construction de logements dans un délai de 4 ans.

Le ministre du Logement, Henri Kox, n’est pas le seul à avoir les clés en main pour combattre la crise du logement. Le ministère de l’Intérieur, avec Taina Bofferding à sa tête, est un allié de taille. Alors que les travaux pour la réforme très attendue de l’impôt foncier continuent, les communes vont à l’avenir disposer d’un nouvel instrument pour forcer les promoteurs et autres propriétaires de terrain à lancer la construction de logements. Jeudi, la ministre de l’Intérieur a présenté les contours du futur cadre légal concernant les travaux de viabilisation et de construction de terrains classés en zone constructible.

«Si nous voulons endiguer dans la mesure du possible la spéculation foncière et l’envolée des prix du logement, l’État et les communes devront devenir des acteurs beaucoup plus actifs sur le marché du logement. Le ministère de l’Intérieur apporte sa contribution, notamment dans la planification de nouveaux quartiers et par la création de nouveaux instruments efficaces permettant d’augmenter l’offre de terrains disponibles et d’accélérer la création de logements et de logements abordables», résume la ministre Taina Bofferding. Un terrain classé en zone constructible voit sa valeur augmenter. Retarder la construction permet de valoriser davantage ce même terrain. C’est en partant de ce constat que le ministère du Logement a décidé de revoir et adapter la législation sur le développement urbain.

Des «sanctions» pour les plus passifs

Vendu comme «instrument innovant pour accélérer la mobilisation de terrains à bâtir», le «contrat administratif d’aménagement» (ou «Baulandvertrag») va enfin devenir réalité. Le projet initial, lancé lors de la législature écoulée, prévoyait que «les travaux de viabilisation doivent être entamés de manière significative endéans un délai maximal de 12 ans, et ce, sur base d’un contrat administratif conclu avec les autorités communales». «Face à l’évolution actuelle des prix, cette approche ne suffisait plus. C’est pourquoi nous avons entièrement retravaillé le projet de loi afin de le renforcer davantage et d’introduire aussi un délai pour la construction de logements», souligne Taina Bofferding.

L’objectif est de passer d’une «planification négative» (ou passive) à une «planification positive». Le futur «Baulandvertrag» va fixer non seulement une date butoir pour la viabilisation mais aussi pour l’entame de la construction de logements. Les travaux devront être commencés au plus tard quatre ans après la conclusion du contrat. Si les délais respectifs ne sont pas respectés (viabilisation et construction), les propriétaires risquent des sanctions. Les terrains pourront notamment être reclassés comme zone non constructible (ou agricole). Une autre «sanction» est de forcer le propriétaire à réaliser des logements d’intérêt général (logements sociaux) et donc de renoncer à son projet de construction initial.

Toute une série de terrains sont exemptés de ces nouvelles dates butoirs. Il s’agit de terrains de moins de 10 ares, classés en zone habitable ou mixte, les terrains déjà viabilisés, les terrains sis dans une zone d’aménagement différée (ZAD) et les terrains appartenant aux promoteurs publics.

En parallèle au nouveau «Baulandvertrag», le ministère de l’Intérieur vise à alléger la procédure pour modifier le plan d’aménagement général (PAG) des communes. Grâce à la loi «omnibus», les délais «théoriques» doivent passer de 12 à 7 mois.

Finalement, un mécanisme de remembrement ministériel sera introduit. À la demande d’une commune, la ministre de l’Intérieur pourra passer outre les blocages qui apparaissent régulièrement entre les propriétaires de différentes parcelles. Souvent le refus d’un propriétaire peut bloquer un projet d’ensemble. À l’avenir, les terrains de propriétaires récalcitrants pourront être déplacés. «Le remembrement ministériel évitera que certains projets de construction de nouveaux quartiers soient bloqués pour des années, voire des décennies», conclut Taina Bofferding.

Geneviève Montaigu