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Soins de santé : le Luxembourg rate la grande distinction


La Commission européenne pointe le risque d'une pénurie de médecins, dont une formation spécifique et complète fait toujours défaut au Luxembourg. (illustration Isabella Finzi)

Le solide système de soins de santé du Grand-Duché ne donne pas entièrement satisfaction à la Commission européenne. Un appel pour atteindre une plus grande efficacité est lancée, d’autant plus que le système possède des déficits structurels, selon Bruxelles.

Avec une espérance de vie moyenne de 82,4 ans, le Luxembourg est le pays, parmi les 28 que compte l’UE, dans lequel on vieillit le mieux. Entre 2000 et 2015, cette moyenne est passée de 78 à 82,4 ans. «Le Grand-Duché se situe deux années au-dessus de la moyenne européenne. L’espérance de vie a augmenté de presque 5 ans sur 15 ans, ce qui est remarquable, mais ce qui veut aussi dire que la population vieillit très rapidement», souligne Juliane Winkelmann de l’Observatoire européen des systèmes et des politiques de santé.

Le vieillissement de la population constitue, selon les experts de la Commission européenne et de l’OCDE, un des défis majeurs qui attend le système de soins de santé du Luxembourg. «L’investissement de la main publique dans les soins de santé est la plus importante au niveau européen. Mais une population vieillissante va encore augmenter les frais. Il sera donc important que le Luxembourg réponde à ce défi en améliorant l’efficacité de son système de soins de santé, qui connait quelques problèmes structurels», poursuit Juliane Winkelmann.

Peu de prévention

Ces deux premières conclusions majeures figurent dans le diagnostic sur les profils de santé, dressé pays par pays par la Commission européenne et l’OCDE. Ces rapports ne doivent pas rester lettre morte. «Il s’agit d’alimenter le débat au niveau national et communautaire. Pour y parvenir, il faudra utiliser les données de santé collectées beaucoup plus activement», indique John Ryan, directeur en charge de la Santé publique auprès de la Direction générale de la Santé, rattachée à la Commission européenne. «On constate que les systèmes de soins de santé sont chargés par 80% de maladies chroniques. Il est vraiment important que les États membres mènent une réflexion sur la prévention», enchaîne le haut fonctionnaire européen.

Pour revenir au Luxembourg, l’appareil de santé doit devenir plus efficace, selon les experts bruxellois. «Le Grand-Duché est le pays qui investit le plus d’argent public par tête d’habitant dans le domaine des soins de santé. Or le résultat au niveau des décès évitables est identique à celui obtenu par la France, l’Espagne ou l’Italie. Il reste donc encore une marge pour rendre les soins plus efficaces», souligne Juliane Winkelmann.

Vers une pénurie de médecins ?

D’autres déficits structurels sont pointés par la Commission européenne. Une possible pénurie de médecins, dont une formation spécifique et complète fait toujours défaut au Luxembourg, en fait partie. «Malgré une plénitude des ressources financières, le Luxembourg compte moins médecins par tête habitant que la moyenne européenne (0,7 médecins par 1 000 habitants)», détaille Juliane Wikelmann. Avec les nombreux départs à la retraite d’ici 10 ou 15 ans, le Grand-Duché devra anticiper la situation, faute de quoi les «déserts médicaux» vont devenir une réalité, met en garde John Ryan.

Une plus importante utilisation de médicaments génériques (moyenne de 11% actuellement contre 49% en Europe) ainsi que l’introduction plus rapide du dossier de soins électronique partagée (une phase test est en cours) et du médecin-référent sont d’autres recommandations majeures émises par la Commission européenne.

Tous ces éléments seront discutés au printemps prochain entre Bruxelles et les ministres de tutelle. Car comme l’a inévitablement souligné Yuriko Backes, chef de l’antenne luxembourgeoise de la Commission européenne, «il vaut toujours mieux de prévenir que de guérir».

David Marques

Plus d’informations et chiffres sur ce rapport dans notre édition papier de ce vendredi 24 novembre.