La Chambre des députés devrait valider mercredi à l’unanimité la hausse de 2,8% du salaire social minimum (SSM). L’attaque frontale du camp patronal est restée sans effet.
L’annonce du Premier ministre, Xavier Bettel, en date du 20 novembre a eu l’effet d’une bombe. Au 1er janvier 2021, le salaire social minimum doit augmenter de 2,8%. Le jour même, l’Union des entreprises luxembourgeoises (UEL) a fustigé la mesure : «Une telle hausse dans le contexte de crise économique actuel n’est tout simplement pas soutenable.» La Chambre de commerce, la Chambre des métiers et la Fedil sont montées à leur tour au créneau pour revendiquer le retrait immédiat du projet de loi. Finalement, le patronat s’est retrouvé face à un mur. Mardi, la commission parlementaire du Travail a adopté à l’unanimité le rapport sur la hausse du SSM. Le vote en plénière, prévu ce mercredi, ne devrait être qu’une formalité.
Selon les chiffres repris dans le rapport en question, l’augmentation du SSM de 2,8% représentera un surcoût de 54,3 millions d’euros pour les entreprises (43,3 millions d’euros de salaires et 11 millions d’euros de cotisations patronales). La hausse du SSM sera compensée par une aide forfaitaire de 500 euros. Les secteurs éligibles sont l’Horeca, le commerce de détail, le secteur événementiel et la formation professionnelle continue. Le ministère des Classes moyennes estime que ces secteurs comptent entre 60 000 et 70 000 salariés, dont deux tiers qui perçoivent le SSM. Il est donc prévu de verser une aide de 500 euros pour 40 000 salariés, soit 20 millions d’euros.
Une barrière pour les non-qualifiés ?
Aux yeux du camp patronal, cette compensation est largement insuffisante. «Beaucoup d’autres secteurs, comme la construction, se démarquent avec un nombre considérable de salariés touchant des salaires situés au SSM (…). Il est de ce fait important que le gouvernement adopte une approche de compensation généralisée» sur une période de trois ans (2021-2023), estiment la Chambre des métiers et la Chambre de commerce. «Une compensation plus généralisée de cette hausse salariale, telle que nous l’avions connue pour les années 2012 à 2016, aurait donné aux entreprises une bouffée d’oxygène pour traverser la période difficile», ajoute la Fedil, la fédération des industriels.
D’une manière plus générale, les représentants du camp patronal redoutent une perte de compétitivité, selon eux plombée par les hausses substantielles du SSM depuis 2000 (+70%). Depuis juillet 2010, la hausse serait de 24%. Et sur les deux dernières années, le SSM se serait «envolé» de plus de 7%. «L’augmentation prévue détériorera davantage la compétitivité des entreprises et leur capacité à investir pour se relancer dans le nouveau contexte économique, au moment où la pérennité de beaucoup d’entre elles est remise en cause par la crise», avancent Chambre de commerce et Chambre des métiers. Ils ajoutent qu’ «en ces temps de crise, le relèvement du SSM risque d’aggraver les difficultés éprouvées par les résidents peu ou pas qualifiés lors de la recherche d’un emploi».
Cet argumentaire n’est pas partagé par le camp politique. «Les plus vulnérables sont fortement touchés par la crise actuelle. En cette période, il est important de procéder à ces adaptations», persiste et signe le Premier ministre.
David Marques
Plus de 61 200 salariés concernés
La hausse de 2,8% du salaire social minimum équivaudra à une augmentation de 60 à 70 euros par salarié. Le salaire minimum pour personnes non qualifiées va passer dès janvier de 2 141,99 euros à 2 201,93 euros (12,73 euros par heure). Pour les personnes qualifiées, le salaire minimum va passer de 2 570,39 à 2 642,32 euros (15,72 euros par heure). Selon les dernières estimations, reprises dans le rapport de la commission parlementaire du Travail, 61 227 salariés vont toucher le salaire minimum revu à la hausse, dont quelque 55% sont des résidents. À la fin du second semestre de cette année, le Statec chiffrait l’emploi intérieur à 443 259 salariés. Ils sont donc environ 14% à toucher le SSM.