La plateforme citoyenne sur le climat telle qu’elle semble envisagée par Xavier Bettel ne convainc pas les militants de Rise for Climate, qui veulent davantage de démocratie.
C’est une annonce qui a pris de court les membres de Rise for Climate (RFC) : le 12 octobre dernier, à la surprise générale, Xavier Bettel annonçait lors de son discours sur l’état de la Nation la création d’une plateforme citoyenne pour discuter des questions climatiques. Dès le début de l’année prochaine, 100 citoyens devraient ainsi être invités à se prononcer sur la politique environnementale du pays, après avoir débattu avec des experts.
Si au premier abord, cette décision peut paraître être une avancée, elle laisse pour le moins sceptique le mouvement RFC, alors que la plateforme CELL (qui coordonne et soutient des initiatives pour une transition écologique et citoyenne) était en pleine discussion avec la ministre de l’Environnement, Carole Dieschbourg, au sujet de la création d’assemblées citoyennes.
«Déjà, la mise en œuvre de cette décision est encore très floue à l’heure actuelle, mais en plus, l’un des problèmes majeurs, c’est que les résultats de cette convention seront soumis à un débat à la Chambre. C’est une vaste blague ! C’est le fait de débattre et d’échanger qui permet aux gens de se forger une opinion, de changer leurs a priori. Si vous soumettez les conclusions d’un débat citoyen à un parlement qui a toujours les mêmes opinions et les mêmes logiques de parti, ça ne sert à rien! C’est d’ailleurs ce qui s’est passé en France», a commenté Gilles Dacheux, de RFC.
Les membres de RFC se disent d’autant plus «inquiets» que les députés, en plus d’être écartés du processus initial, ont déjà pris des positions allant à l’encontre d’une démarche visant à réduire l’empreinte carbone, en votant par exemple en faveur du CETA (l’accord de libre-échange entre l’UE et le Canada) ou en ne votant pas l’état d’urgence climatique, mais sans le faire suivre d’effets. Pour Rise for Climate, cette annonce fait craindre une forme «de démocratie washing», une illusion de démocratie.
«La démocratie a un prix»
Pour qu’il y ait un véritable débat démocratique, RFC propose donc différentes mesures, en premier lieu desquelles la mise en place d’un conseil citoyen vraiment représentatif de la population, n’incluant de fait pas uniquement les citoyens luxembourgeois, mais aussi les travailleurs frontaliers et les personnes vivant au Luxembourg sans la nationalité.
«Les décisions prises au Grand-Duché ont autant d’impact pour ceux qui y vivent que pour ceux qui habitent au-delà de la frontière», souligne Sofia Fernandes Duarte, de RFC. «Tous ces gens paient des impôts ici, ils ont donc aussi le droit de décider ce qu’on fait avec cet argent.»
Quant à la sélection des experts avec lesquels seront menés les débats, elle doit bien sûr être particulièrement rigoureuse. Pour RFC, il est essentiel qu’une «autorité indépendante présente des panels d’experts au conseil citoyen, ce dernier étant in fine celui qui décide de qui doit être auditionné.»
Les résultats, eux, devraient plutôt être soumis à référendum, lequel serait «ouvert à toute personne possédant un numéro de sécurité sociale luxembourgeois». À condition que «la population puisse participer au débat !», insiste Gilles Dacheux.
Et pour l’impliquer, il faut l’informer suffisamment. «Il faut des émissions régulières à la télévision, à la radio, commencer par une enquête nationale sur les questions à débattre, monter des pièces de théâtre-forum, organiser des réunions d’information dans les quartiers, entreprises et lycées avec les membres du conseil citoyen…», détaille-t-il.
Un processus sur le long terme. «Il faut compter au moins trois jours par question et par assemblée», estime Gilles Dacheux. «Il faut le temps que les gens puissent se forger une opinion, que les idées maturent», complète Sofia Fernandes Duarte.
«La démocratie a un prix : il faut lui consacrer du temps», insiste le premier, qui pense que le changement ne pourra venir que de la base citoyenne et non pas des dirigeants : «On ne peut pas compter sur la seule action des dirigeants pour changer ce qu’ils ont mis en place.»
«Pessimistes»
«Paroles et paroles et paroles…» Les militants de Rise for Climate s’avouent «pessimistes» quant à l’issue de la COP26, qui risque de se terminer par un amoncellement de promesses non tenues.
«Quand on voit que des États comme la Chine et la Russie sont absents, cela rend difficile d’obtenir un accord qui peut changer les choses», commente Gilles Dacheux. «Les hommes politiques n’ont pas compris l’importance d’agir. Ils ont des conflits d’intérêts. Et depuis l’accord de Paris, les émissions continuent d’augmenter! On n’est même pas arrivé à une phase de stagnation!»
Tatiana Salvan
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Tant que tous ces illuminés ne feront que discuter, pas grand mal. Mais le jour où ils veulent m’imposer des contraintes idiotes alors là, j’organise la révolte.