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Régionales en France : le Luxembourg souffle aussi


Une large majorité de la classe politique luxembourgeoise se dit soulagée de la défaite du Front national aux élections régionales en France. (illustration AFP)

Le Quotidien fait un tour d’horizon des réactions politiques luxembourgeoises après les régionales françaises. Réactions qui vont toutes, ou presque, dans le même sens. Celui du soulagement.

Dès dimanche, le ministre du Développement durable et des Infrastructures, François Bausch (déi gréng) s’est montré particulièrement direct en tweetant : «Ouf, grand soulagement, je ne dois pas négocier avec des représentants du FN.» Aussitôt dit, aussitôt retweeté par la ministre de la Famille et de l’Intégration et ministre à la Grande Région, Corinne Cahen (DP), qui est vraisemblablement sur la même ligne.

Déi Gréng : «La France est en sursis»

Le chef de la fraction parlementaire libérale, Eugène Berger, a quant à lui évoqué, à chaud, «un sursaut républicain à l’arrière-goût amer». Contacté lundi par Le Quotidien, le député explicite le fond de sa pensée et livre une analyse plus approfondie du scrutin : «Il y a une semaine, j’avais formulé l’espoir que les Français, qui tiennent aux valeurs républicaines et à l’idée communautaire, se mobilisent pour le 2e tour pour faire barrage au parti d’extrême droite qu’est le FN. Heureusement cela a été le cas, mais aux politiques responsables de prendre maintenant au sérieux ce défi et de proposer de vraies perspectives d’avenir, aussi pour les plus faibles. Combattre le chômage, développer l’économie, redoubler d’efforts pour une meilleure intégration, mettre en avant les bienfaits de la communauté européenne, etc… seraient la meilleure prévention contre l’émergence des partis extrémistes.»

Pour Viviane Loschetter, présidente du groupe parlementaire des écolos (déi gréng), «la France est en situation de sursis.» En effet, la députée verte juge que «42% pour Marine Le Pen et une moyenne de 40% d’abstention sont un grave problème et mettent en cause les principes républicains de la France. Il s’agit maintenant de prendre au sérieux les messages de préoccupation, de manque d’alternatives et de perspectives des citoyennes et citoyens qui résident en France.»

Même son de cloche du côté de l’opposition, où le président du CSV, Marc Spautz, a mis en avant, dès dimanche (et avant les résultats définitifs), «un grand soulagement, (car) le FN n’obtiendrait aucune région». Soulagement confirmé, au sein du parti chrétien-social, le soir-même, par le chef du groupe politique du CSV au Parlement, Claude Wiseler, qui a salué le fait que «la France reste fidèle à ses valeurs».

Lundi, ce même Claude Wiseler tempère sa vision et confie au Quotidien que «les résultats du FN restent inquiétants». Sans oublier de pointer du doigt les partis traditionnels. «Il est grand temps que les partis traditionnels arrêtent de se chamailler en interne, ce que personne ne comprend d’ailleurs. Les courses des différentes écuries qui occupent l’avant-scène politique doivent cesser. Les partis traditionnels doivent se pencher sur les véritables préoccupations des Français : le social, le chômage, la sécurité, etc. Car, en attendant, les problèmes perdurent!», conclut un Claude Wiseler anxieux pour le futur de l’Hexagone.

L’ADR s’abstient de tout commentaire

Beaucoup plus à droite du CSV sur l’échiquier politique, l’ADR dit quant à lui «respecterle choix souverain des Français» et rappelle également défendre la vision d’une Europe des nations. Le député Fernand Kartheiser est aussi d’avis que l’impact des régionales françaises sur le Luxembourg est anecdotique : «Défendant une Europe des nations, le parti ADR ne commente généralement pas le résultat d’élections démocratiques dans d’autres États membres, mais espère pouvoir établir de bonnes relations de travail avec les élus dans l’intérêt d’un développement fructueux des relations bilatérales. Le parti ADR note que l’impact potentiel des élections régionales en France sur le Luxembourg est de toute façon fort limité.»

À gauche, voire très à gauche, déi Lénk estime, pour sa part, qu’«il n’y a pas lieu d’être satisfait». Le député David Wagner se veut, en effet, catégorique sur ce point : «Certes, le FN n’a remporté aucune présidence de région, mais il triple son nombre de conseillers régionaux. Sans parler de certaines régions qui ont voté Front national à hauteur de 30 ou 40%.» Par ailleurs, David Wagner relève que le fort taux d’abstention constitue un camouflet pour le gouvernement français : «La moitié des électeurs ne vote plus… Il faut que le gouvernement, qui se dit de gauche, inverse absolument sa politique en vue des présidentielles de 2017», juge-t-il. Bref, selon déi Lénk, «qualifier les résultats des régionales de victoire, serait aller vite en besogne».

Claude Damiani

Anne Brasseur : « Écouter les citoyens »

Anne Brasseur. (Photo archives François Aussems)

Anne Brasseur. (Photo archives François Aussems)

La présidente de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe qui siège à Strasbourg, Anne Brasseur appelle à guider les électeurs et à plus d’Europe, suite au 2e tour des élections régionales françaises. « Il faut vraiment agir en responsables et en tant que partis démocratiques dans tous les pays. Il faut écouter les citoyens, répondre à leurs questions et ne pas les laisser seuls », confie-t-elle, mardi, au Quotidien.

Car selon Anne Brasseur, « en l’absence de réponses et face à l’insécurité qui s’installe, celle-ci peut se transformer en peur ; et la peur est le plus mauvais conseiller ! », prévient encore Anne Brasseur. Selon la présidente de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe, « on pousse ces électeurs dans les bras des nationalistes et de l’extrême droite, si on ne leur fournit pas de réponses. A nous tous les partis, toutes tendances confondues, d’être à l’écoute des électeurs et de trouver des réponses à leurs questions pour rétablir un esprit de confiance entre les électeurs et les partis traditionnels il en va de la stabilité de nos démocraties », a insisté Anne Brasseur.

Sur un dernier point, Anne Brasseur met également l’accent sur le fait qu’il faille « dire aux électeurs que les populistes n’ont pas d’alternatives ni de réponses. » Avant pour la présidente du Conseil de l’Europe d’appeler à « plus d’Europe car, seul, un pays ne peut résoudre les problèmes. »

Claude Damiani

 

Claude Turmes, eurodéputé : « Réagir avec des actions concrètes »

« La bonne nouvelle est que le Front national n’ait pas gagné de région, par contre ce qui est inquiétant est le nombre d’électeurs favorables au FN qui a atteint un nouveau record. De plus, nous nous retrouvons dans une situation où des régions entières sont sans opposition socialiste ou de gauche due aux listes qui ont été retirées dans ces régions. Le FN est un problème qui existe depuis 30 ans et deux facteurs ont fait qu’il ait gagné de l’ampleur avec le temps : d’un côté, nous avons une élite complètement déconnectée face aux problèmes réels de la société et de l’autre, une politique d’austérité qui ne fait qu’accroître les inégalités. Il est temps maintenant de réagir avec des actions concrètes et non seulement avec des belles paroles. »