La concrétisation des nouveaux plans d’aménagement dans les communes a largement fait progresser le nombre de bâtiments classés. Les 18 communes qui ont déposé le leur depuis janvier 2014 ont décidé de protéger 7 642 nouveaux édifices.
Le directeur du Service des sites et monuments, Patrick Sanavia, se félicite de ce nouvel élan, mais il pointe aussi du doigt le peu d’implication de certaines communes. Mersch et Wiltz sont dans le viseur.
Le nombre de bâtiments classés a explosé grâce aux nouveaux PAG. Cela doit vous satisfaire.
Patrick Sanavia : D’une manière générale, oui, nous sommes très contents. La grande majorité des communes a joué le jeu et c’est une belle satisfaction pour nous. Depuis le début, j’ai participé à plus de 200 réunions avec des bourgmestres et, parfois, en sortant, j’avais plutôt un mauvais pressentiment. Mais nous avons échangé, nous sommes allés dans leurs rues pour leur expliquer notre point de vue et, honnêtement, je n’aurais pas cru qu’on parviendrait aujourd’hui à un tel résultat. Sur le tiers des communes qui ont rendu leur nouveau PAG, nous avons conseillé la protection de 10 000 bâtiments et au final environ 8 700 l’ont été. C’est bien… mais d’un autre côté, il en manque.
Avez-vous pointé les communes les moins vertueuses ?
Oui, certaines nous posent problème. À Mersch, nous avons proposé de protéger 332 bâtiments et seuls 148 le sont au final. Idem pour Wiltz, où seuls 145 des 370 bâtiments que nous avons conseillés ont été effectivement inscrits.
Savez-vous pourquoi ?
Non, il n’y a pas eu de dialogue et c’est un problème. Classer une bâtisse n’est pas une obligation, c’est une chance. Un classement est une protection juridique pour le propriétaire et une opportunité d’obtenir des subventions. Ceci étant dit, dans certains cas, nous comprenons également que des communes choisissent de ne pas classer. Certaines nous ont expliqué leur point de vue, et nous pouvons aussi comprendre leurs considérations lorsqu’elles sont valables.
N’est-ce pas la limite de ce système de classement communal ? Ne risque-t-on pas d’avoir affaire parfois à des questions de personnes plus qu’à des intérêts patrimoniaux réels ?
Effectivement, cela peut arriver. Même si, je le répète, dans la grande majorité des cas, cela s’est bien passé. Toutefois, bien que l’autonomie communale existe, le ministre de l’Intérieur serait tout à fait dans son droit en refusant les PAG de communes qui n’auraient pas obéi à leur devoir en termes de protection du patrimoine.
De nombreuses petites communes ne disposent pas de services adéquats pour traiter ces questions-là. Comment les aidez-vous ?
Nous les aidons, nous allons partout. Pour nous, il n’existe pas de communes prioritaires et d’autres secondaires : nous allons partout et elles ont autant d’importance les unes que les autres. Évidemment, dans les plus petites, c’est une question de personne. Si le bourgmestre est sensible à ça, tout est facile. Sinon, il faut réussir à le convaincre !
En cas de risque de destruction d’un immeuble d’intérêt, quels sont vos recours ?
Le ministre peut protéger n’importe quel bâtiment, à n’importe quel moment. C’est arrivé récemment à Heinerscheid, les bulldozers étaient déjà arrivés sur le site pour détruire une ancienne ferme mais le bâtiment a reçu en urgence une protection nationale qui a interdit sa destruction.
A contrario, quelles sont les communes les plus impliquées ?
À Larochette, nous avions estimé que 70 bâtiments méritaient une protection parce qu’ils étaient importants pour la localité et la commune en a sélectionné 227 ! Luxembourg est un bon exemple également. L’ancien PAG, le plan Joly, protégeait 800 bâtiments et il y en a 6 000 aujourd’hui. C’est un sacré progrès, mais je suis aussi obligé de dire qu’il en manque 300, notamment à Gasperich et Bonnevoie. On le voit, il y a une prise de conscience progressive, un cheminement vers le bien au niveau du patrimoine.
Entretien avec Erwan Nonet