Jeudi s’achevait à Luxembourg une réunion des ministres de l’Environnement visant à préparer un accord ambitieux pour limiter le réchauffement climatique. Les négociations progressent, mais le défi reste élevé.
L’Europe, qui s’affiche comme le fer de lance de cette lutte contre les gaz à effet de serre, appelle à une prise de conscience mondiale. Au Luxembourg, certaines associations dénoncent pourtant un manque d’ambition, soulignant au passage le retard du Grand-Duché en la matière…
L’objectif est d’aller vers des politiques plus équitables et plus durables», résume Carole Dieschbourg. La ministre luxembourgeoise de l’Environnement achevait hier une réunion avec ses homologues européens, sur un sujet brûlant : le réchauffement climatique.
Cette réunion informelle a permis de discuter des objectifs de développement durables (ODD) qui vont être adoptés lors du Sommet de l’ONU en septembre, ainsi que des négociations climatiques en vue d’un accord de Paris «ambitieux» en décembre (lire par ailleurs).
«Nous avons eu de bons échanges à différents niveaux», affirme-t-elle. «Il est important de souligner qu’il existe une convergence qui se confirme sur le plan politique, notamment sur la question de l’adaptation aux changements climatiques, un sujet particulièrement important pour les pays en développement.»
Convergence aussi sur «le financement de la lutte contre le réchauffement climatique, donc vers des économies sobres en émissions de gaz à effet de serre», ajoute la ministre, rappelant que l’UE est le principal contributeur à ce financement climatique (plus de 9,5 milliards d’euros en 2013). La moitié de ces contributions «sont consacrées à la prévention des changements climatiques, et l’autre à l’aide aux pays en développement.» Mais «il faut une méthodologie crédible pour montrer que ces flux de financement sont efficaces. La transparence et la confiance vont de pair».
Les ministres ont également discuté d’une proposition de la présidence luxembourgeoise : «une boîte à outils» pour le financement climatique, qui servirait à inventorier et sélectionner les instruments nécessaire pour réaliser ce financement climatique. Par exemple, «on pense aux obligations « vertes » ou aux prêts à conditions avantageuses».
Interpellé au sujet des subventions publiques à l’industrie des énergies fossiles, qui sont contradictoires avec la lutte contre le réchauffement climatique, Carole Dieschbourg admet que «c’est un sujet inhérent à la discussion sur le financement climatique», mais qui interviendra «plus tard» dans le processus de négociation.
«L’environnement doit rester au premier plan de nos priorités, et il faut qu’il soit intégré dans les autres politiques», insiste-t-elle.
Bruxelles avait pourtant envoyé un message bien différent, en décembre dernier. Le président de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker, avait alors annoncé l’abandon de 83 projets de règlements et de directives environnementales, visant notamment à réduire les déchets, améliorer la qualité de l’air et l’économie circulaire… Motif invoqué : l’emploi est un sujet plus urgent que l’environnement.
46 pays se sont déjà engagés pour le climat
La nomination dans l’équipe Juncker de Miguel Arias Cañete au poste de commissaire à l’action climatique avait aussi fait grincer des dents, ce dernier étant accusé de conflits d’intérêts avec le secteur pétrolier. Sans oublier certaines de ses réflexions hasardeuses : «Un débat entre un homme et une femme est toujours compliqué. Si vous abusez de votre supériorité intellectuelle, vous apparaissez comme un machiste», osait-il en mai 2014. Heureusement, l’Espagnol ne s’est pas livré à pareils affrontements intellectuels hier, confirmant les dires de Carole Dieschbourg sur «un débat très fructueux» entre les ministres de l’Environnement.
Tout en nuançant : «Il reste toutefois beaucoup de travail, et les progrès restent lents au niveau des négociations techniques. Mais il y a quand même une dynamique politique positive pour trouver un accord à Paris qui conviendrait à tout le monde.»
Il se félicite en particulier du «pas en avant » par rapport au protocole de Kyoto, rappelant que seulement 31 pays (représentant 13 % des émissions globales) avaient alors participé à la deuxième période du protocole. Tandis que pour l’accord de Paris, 46 pays (qui représentent 56 % des émissions globales), ont déjà fait part de leurs engagements pour lutter contre le réchauffement climatique.
Il a également insisté sur la nécessité de mettre sur la bonne voie les systèmes d’échange de quotas d’émissions de gaz à effet de serre, rappelant l’objectif de les réduire dans l’UE d’au moins 40 % d’ici 2030.
«En conclusion, ces réunions ont aidé les ministres à mieux comprendre l’urgence de la situation et des défis à surmonter, pour que [la conférence de] Paris soit un succès.»
Un succès qui dépendra principalement de la capacité à «surmonter les divisions historiques entre les pays développés et ceux en développement. Il est important de sortir de nos zones de confort, pour entrer dans les zones de compromis», conclut-il.
Romain Van Dyck