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Politique : Syriza, une « autre voie » pour la Grèce (Interview)


David Wagner, porte-parole de déi Lénk, alliée de Syriza, voit dans ces élections « un message d’espoir ».

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« Les Grecs subissent une crise humanitaire. », selon David Wagner, porte-parole de déi Lénk. (Photo : Alain Rischard)

> Que signifierait pour vous une victoire de Syriza ?

David Wagner : Ce serait le début de la résistance en Europe contre la dictature des marchés financiers. C’est un problème qui concerne d’autres pays de l’UE soumis au programme de la troïka (NDLR : UE-BCE-FMI). C’est l’ensemble de l’Europe qui est concernée, même le Luxembourg, évidemment à un degré qui n’est pas comparable avec la Grèce. C’est le sacro-saint triple A des agences de notation, qui appartiennent aux marchés financiers, qui est en jeu. Ces élections sont importantes pour toute la Gauche européenne, c’est un message d’espoir : une autre voie est possible.

> Syriza a semblé tempérer son discours ces dernières semaines.

Le but est de rassurer, d’obtenir le soutien de la population qui n’a pas pour tradition de voter à gauche. Il ne faut pas oublier qu’il y a encore quelques années, Syriza n’était qu’à 5-6 %, à l’image de déi Lénk au Luxembourg.

> Quel est son programme ?

Syriza a plusieurs priorités. Le parti veut tout d’abord mettre fin à l’insécurité humanitaire de la population, notamment par l’augmentation des salaires ou la gratuité des soins, car les Grecs subissent une véritable crise humanitaire. Syriza a également un programme de relance économique pour les petites et moyennes entreprises. Cela peut paraître étonnant, mais ce n’est pas contradictoire avec les idées de Syriza, car les petites et moyennes entreprises sont également victimes des marchés financiers. Et bien sûr, le pilier principal du programme de Syriza est la renégociation de la dette. Un bras de fer va s’engager avec la Commission européenne sur ce sujet. Syriza veut remédier au pire, parce que les Grecs sont tout simplement dans une situation invivable.

> Que pensez-vous des déclarations de Jean-Claude Juncker qui souhaite « revoir des têtes connues » au pouvoir ?

C’est un manque de respect envers les Grecs. Les « têtes connues », les Grecs n’en veulent plus. Ces élections sont un échec de la Commission Juncker, c’est une mort politique pour Jean-Claude Juncker. Car toutes ces mesures d’austérité que les Grecs refusent sont soutenues par Juncker. Et l’austérité n’a fait qu’aggraver la situation. On se demande dans quel monde vit Juncker pour soutenir cette politique. Pour lui, la défense des marchés financiers passe avant la démocratie.

> Si la dette de la Grèce est réduite, ne sont-ce pas les contribuables européens qui vont payer ?

Cette rhétorique a pour but de faire peur. Car en réalité, la dette est voulue par les marchés. Pour un État, il est impossible d’emprunter auprès de la BCE. L’État doit emprunter auprès des banques privées. Or les banques privées reçoivent de l’argent de la part de la BCE. Et les banques privées prêtent ensuite cet argent aux États à des taux exorbitants de 7, 8 ou 10 %. Dans le cadre du Mémorandum, le programme d’aide de la troïka, l’État grec reçoit de l’argent de la troïka. Mais ces aides sont conditionnées à des réformes qui nuisent à la reprise économique. De plus, cet argent va vers les banques privées, car l’État grec doit rembourser les intérêts de la dette. C’est donc le système bancaire au niveau européen dans son entièreté qu’il faut revoir.

> Pensez-vous qu’il y ait un risque de sortie de la Grèce de la Zone euro (Grexit) ?

Je ne sais pas. Syriza souhaite rester dans l’UE et dans la Zone euro. Si les négociations pour une renégociation de la dette sont un échec, si les grands pays bloquent, Syriza devra revoir sa copie. Au second semestre 2015, le Luxembourg aura la présidence de l’UE sans doute en plein débat sur la Grèce. Le gouvernement luxembourgeois aura une grosse responsabilité. Il y a des socialistes dans le gouvernement, ils doivent aider les efforts de Syriza. Il y a un choix à faire entre les marchés financiers et la population.

Propos recueillis par notre journaliste Nicolas Klein


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