Accueil | Politique-Société | Pétition au Luxembourg : morts du Covid et victimes de la guerre des feux…

Pétition au Luxembourg : morts du Covid et victimes de la guerre des feux…


L'auteur de la pétition défend une minute de silence le soir de Nouvel An, et l'interdiction des feux d'artifices (photo : Didier Sylvestre).

Une pétition publique a été débattue mardi par les députés, qui n’étaient pas tous très à l’aise. Commémoration des victimes du Covid ou guerre aux feux d’artifice ?

Le débat était trop important pour le différer, selon la présidente de la commission des Pétitions, Nancy Arendt (CSV). La minute de silence en mémoire des victimes de la pandémie de Covid-19 est effectivement un débat que chacun dans l’enceinte du Parlement estime nécessaire au vu des 4 975 signatures récoltées par la pétition, dont la moitié sur papier.

La pétition introduite par Daniel Frères se trouvait en bonne place dans des commerces et dans certains cabinets de vétérinaire. L‘auteur de la pétition, renommé pour sa lutte en faveur du bien-être animal, réclamait une minute de silence pour les morts du Covid-19 le soir de la Saint-Sylvestre et réclamait donc l’interdiction sur tout le territoire des feux d’artifice parce que le moment n’est vraiment pas à la fête.

Le pétitionnaire a d’ailleurs davantage disserté sur les nuisances des feux d’artifice que sur la commémoration des victimes de la pandémie. Il a fallu attendre l’intervention de Claude Lamberty (DP) après trois quarts d’heure de discussion pour que la question soit posée de manière directe : « J’ai le sentiment qu’il s’agit plus de protéger les animaux que de commémorer les morts, non?», lâche-t-il à l’intention de Daniel Frères.

D’autres députés, à l’instar de Claude Lamberty, suggèrent de changer la date et s’ils saluent unanimement le principe d’une cérémonie officielle de commémoration, ils estiment que la date est mal choisie. L’auteur de la pétition finit par céder et ne se dit pas opposé à une cérémonie commémorative fixée le jour de la fête nationale, comme le proposera plus tard la ministre de l’Intérieur, Taina Bofferding.

Même si les députés semblent gênés par le mélange des genres, ils prennent part activement au débat et taclent diplomatiquement le pétitionnaire qui insiste beaucoup sur l’interdiction des feux d’artifice à laquelle la majeure partie des communes se sont déjà ralliées. «Il y a encore des communes qui ont donné des autorisations spéciales pour des feux d’artifice, alors des gens vont encore se réunir, et ce n’est pas possible. Il ne faut pas oublier non plus que ce n’est pas le moment d’encombrer les urgences avec des blessés qui manipulent des fusées», martèle Daniel Frères.

La ministre Taina Bofferding, qui s’est préalablement renseignée, n’a pas connaissance d’une recrudescence des accidents la nuit de la Saint-Sylvestre et le CGDIS lui a même précisé qu’aucune personne n’a été conduite à l’hôpital en raison d’une blessure causée par un pétard ou une fusée.

Le député Fernand Kartheiser (ADR) se demande si cette commémoration ne va pas créer un précédent, car après tout il faudrait rendre hommage à ceux qui meurent d’une autre maladie, d’un accident ou d’un attentat, comme il l’énumère. De son côté, Émile Eicher (CSV), également président du Syndicat des villes et communes (Syvicol), explique la difficulté pour certaines communes de décider d’une interdiction alors qu’elles ne disposent pas d’un règlement de police ou que cette interdiction n’y figure pas. Il sait en revanche qu’une grande partie des communes du pays ont déjà signifié l’interdiction de tirer des feux. Il rappelle aussi qu’à cette date le couvre-feu sera entré en vigueur et qu’à partir de 21 h plus personne ne sera censé être dans la rue à allumer des mèches.

Une commémoration pour la fête nationale

«On peut toujours tirer un feu de son jardin en tant que personne privée», insiste encore le pétitionnaire. Les députés insistent aussi mais sur le côté commémoration, car s’ils ont reconnu l’urgence de débattre, ce n’est pas pour le volet protection animale liée aux nuisances des feux d’artifice. Paul Galles (CSV) aimerait savoir comment l’auteur de la pétition imagine cette minute de silence. «C’est un acte volontaire, chacun chez soi peut l’observer», répond Daniel Frères en précisant que le côté officiel reste l’affaire des décideurs politiques.

Jean-Paul Schaaf (CSV) propose d’éteindre pendant quelques minutes les illuminations de Noël en guise de minute de silence pour les morts du Covid, alors qu’Aly Kaes (CSV) suggère d’allumer une bougie à la fenêtre.

Octavie Modert (CSV) recommande fortement de ne pas observer une minute de silence à la Saint-Sylvestre, «pour éviter des rassemblements de quelque ordre qu‘ils soient et peu importe à quel moment de la journée». Elle suggère d’attendre au moins la fin de la période de couvre-feu et de laisser le temps aux autorités d’organiser une telle cérémonie d’hommage aux victimes de la pandémie. En revanche, la députée de l’Est estime que la Chambre peut prendre l’initiative d’observer une minute de silence en séance plénière et justement ce sera chose faite lors de l’adoption d’une loi Covid, donc certainement avant la fin de l’année.

Taina Bofferding ne s’étend pas sur les feux d’artifice en répétant que leur interdiction relève d’une compétence communale. Elle assure qu’une commémoration aura lieu, un acte officiel qui rendra hommage non seulement aux victimes de la pandémie mais à tous ceux qui sont au front pour la combattre. Cet événement aura certainement lieu le jour de la fête nationale, une date qui se prête mieux à une minute de silence que la Saint-Sylvestre, de l’avis du gouvernement comme de la plupart des députés.

Geneviève Montaigu