Le débat parlementaire qui s’est tenu mardi a une nouvelle fois mis en lumière le niveau considérable du risque de pauvreté au Grand-Duché. Les apparences sont souvent trompeuses.
Près d’une personne sur cinq (18,3 %) est touchée par la pauvreté, à des degrés divers, au Grand-Duché. Le constat a de quoi surprendre dans un pays considéré comme un eldorado. Ce problème, qui ne date pas d’hier, a fait l’objet d’une interpellation de la part du principal parti d’opposition, le CSV, mardi, au Parlement, au lendemain de la publication d’une étude par Eurostat. «106 000 personnes sont concernées, dont 32 % sont des citoyens portugais et 46 % sont des ménages monoparentaux», souligne le député à l’origine du débat, Paul Galles (CSV). Et selon ce dernier, la pauvreté ne doit pas uniquement être appréhendée d’après le facteur matériel et financier, elle doit également être perçue d’après un angle psychologique en ce qu’elle favorise l’exclusion sociale.
Dans ce contexte, le problème de l’accès au logement et celui du chômage – sans omettre le phénomène des travailleurs pauvres – ont largement été désignés comme étant les sources primaires du risque de pauvreté. Afin de contrer cette mise au ban de la société, le CSV a évoqué différentes pistes : la lutte contre le chômage par le biais de l’Adem, bien entendu, mais aussi la nécessité d’une indexation des allocations familiales, la hausse du crédit d’impôt pour les ménages monoparentaux, la création de logements publics ou encore l’obligation d’introduire davantage d’équité dans le cadre de la future réforme fiscale.
Pauvreté et logement cohabitent
Les députés de la majorité ont, pour leur part, mis en avant les mesures déjà prises par le gouvernement Bettel, dont la réforme du RMG (devenu Revis), la hausse du salaire social minimum et celle du revenu pour personnes gravement handicapées. Selon la députée socialiste Tess Burton (LSAP), «l’éducation est la pierre angulaire du combat contre la pauvreté afin de permettre ensuite aux citoyens de toucher un salaire conséquent, une fois entrés dans la vie professionnelle». Parallèlement, la politique relative au changement climatique devra également profiter aux personnes menacées du risque de pauvreté, a-t-elle ajouté, rejoignant les propos de la parlementaire écolo Djuna Bernard.
L’opposition s’est évidemment montrée bien plus critique et pessimiste : «Le gouvernement Bettel II mène clairement une politique en faveur des nantis», s’est notamment exclamé Jeff Engelen, de l’ADR. «Cet énorme pourcentage du risque de pauvreté n’est pas tombé du ciel, au contraire. Il s’avère être le résultat des décisions politiques prises au cours des vingt dernières années, à savoir celles visant à libéraliser le marché du logement», a renchéri le député déi Lénk Marc Baum, qui a également fustigé le «montant trop faible du Revis».
Un groupe de travail
En guise de réponse à tous les reproches dirigés contre l’exécutif, la ministre de la Famille et de l’Intégration, Corinne Cahen, a annoncé qu’un groupe de travail était en train de se pencher sur «un budget de référence» pour les plus vulnérables. «Les résultats de cette réflexion devraient être connus cette année», a-t-elle assuré. Avant, pour elle, d’estimer qu’une activité professionnelle constitue une garantie face au risque de pauvreté, puis de rappeler les lignes directrices de la stratégie gouvernementale face à cette problématique globale de la pauvreté : «Les mêmes chances pour tous les jeunes au niveau de l’éducation, la promotion de l’apprentissage des langues, la minimisation de l’échec scolaire, le renforcement des foyers monoparentaux (…). Cela étant, il reste un problème, et c’est celui du logement», a estimé la ministre.
Concernant ce combat-là, qui semble perdu d’avance, Corinne Cahen a invité tous les bourgmestres et échevins à transmettre à l’Agence immobilière sociale (AIS) toutes les informations relatives à des logements qui seraient inoccupés dans leurs communes respectives. Dans ce cadre général, le futur pacte logement dit «2.0» apporterait son lot de solutions, a encore indiqué la ministre. En attendant que les paroles se traduisent en actes, près d’une personne sur cinq est dans le besoin au Luxembourg.
Claude Damiani