La fin de l’état de crise est actée. La pandémie de Covid-19 n’est pas évacuée pour autant. En cette période déconfinement, La ministre de la Santé fait remarquer que le pays «vit une période dangereuse» où toute baisse de vigilance pourrait s’avérer fatale.
Le soleil brille. Le mercure avoisine les 30 °C. Les enfants se défoulent sur l’aire de jeux aux abords de la Villa Louvigny. Leurs parents papotent.
Le spectre du coronavirus semble loin en cette journée d’été. À quelques mètres de là, la ministre de la Santé, Paulette Lenert, administre toutefois une piqûre de rappel : «Du point de vue de la santé, il n’y pas encore de retour à la normale. On vit une période dangereuse.» Avec la fin de l’état de crise, le regain de liberté s’accentue une nouvelle fois, non sans inquiéter la ministre. Elle pointe plus particulièrement la levée de toute restriction légale en ce qui concerne le rassemblement en privé.
Le 10 juin, le gouvernement avait instauré une limite de 20 personnes. Le Conseil d’État s’est opposé à cette mesure en renvoyant vers le droit constitutionnel stipulant que le domicile est inviolable. «Il est connu que je ne partage pas cette position. J’aurais d’ailleurs préféré attendre les deux semaines habituelles pour évaluer l’impact des mesures prises le 10 juin avant de faire un pas de plus. Mais la Chambre a tranché», constate Paulette Lenert. Il ne lui reste plus qu’à lancer un appel pour «pouvoir compter sur le sens des responsabilités de tout un chacun» afin d’éviter un second confinement, comme ceux décrétés ces derniers jours en Allemagne et à Lisbonne. «Cela aurait un prix énorme sur le plan économique et humain.»
Baisser la garde pourrait en effet s’avérer fatal. Selon les dernières modélisations publiées lundi par la Task Force Covid-19, l’organisation hebdomadaire de 50 réunions privées avec 50 invités, en l’absence de distanciation sociale, combinée à un quotidien scolaire «à l’ancienne» (pas de distanciation, pas de traçage), pourrait faire exploser les courbes. D’ici décembre, le nombre d’hospitalisations en soins intensifs dépasserait la barre des 150 patients. Plus de 1 500 décès seraient à prévoir jusqu’au printemps 2021.
Par contre, une organisation de l’école soumise à un traçage efficace, combinée à la tenue de 150 manifestations par semaine accueillant à chaque fois 200 personnes, respectant la distanciation sociale avec à la clé un dépistage de taille, auraient un effet bien plus limité. Seul un léger regain du nombre d’hospitalisations en soins intensifs est prédit (pic de 20 en mars 2021). Le nombre de décès augmenterait progressivement à 200 en fin d’année. Le pic pourrait attendre les 400 victimes fin 2021.
«Consultez si vous avez des symptômes»
Il s’agit à chaque fois de moyennes calculées par les scientifiques qui peuvent varier en fonction de l’évolution du nombre de nouvelles infections. «Le danger est réel», insiste Paulette Lenert en dépit du nombre réduit de cas positifs enregistrés ces derniers jours. «On a eu le cas d’une fête d’anniversaire ayant réuni 30 personnes. En fin de compte, 12 cas positifs ont été décelés», illustre le Dr Jean-Claude Schmit. Le directeur de la Santé poursuit son raisonnement : «Si 20 personnes ont un contact étroit avec 10 autres, le traçage est gérable. Mais si 20 personnes fréquentent une fête de 80 personnes, on sera confrontés à un problème.» Le contact étroit est défini comme la rencontre d’une durée de plus de 15 minutes sans respect des gestes barrières (par exemple une sortie au restaurant). «Si une des personnes est testée positive, il est important de pouvoir se remémorer ceux qu’elle a fréquentés», note la ministre de la Santé.
«Le meilleur moyen d’éviter de nouvelles infections est de garder ses distances ou de porter un masque là où il n’est pas possible de respecter la distance des 2 mètres, même si cela devient lassant», ajoute Paulette Lenert.
Autre «règle suprême» qui serait un peu tombée aux oubliettes : «Dès que vous présentez des symptômes qui peuvent de près ou de loin être liés au coronavirus, consultez un médecin et évitez d’aller travailler.»
La combinaison entre respect des gestes barrières, dépistage et traçage reste donc primordiale même si le nombre de règles strictes est aujourd’hui fortement réduit. Le port obligatoire du masque est ainsi limité aux transports publics et aux lieux accessibles au public (commerces, guichets, centres sportifs). Les enfants de moins de 6 ans sont exemptés. Les rassemblements en public de plus de 20 personnes restent fortement encadrés (places assises obligatoires).
Le ministère de la Santé compte avoir mis en place, d’ici la mi-juillet, une nouvelle stratégie de tests pour continuer à accompagner le déconfinement. Les travaux afin d’ajuster les lois Covid, validées lundi pour la durée d’un mois, sont également lancés.
David Marques