Après la présentation du budget du «bien-être», mardi par la majorité, place à l’opposition. Martine Hansen, la présidente du groupe chrétien-social, s’est lâchée mercredi sur le projet de budget qui ne reflète selon elle aucune priorité, aucune vision. Un budget de chiffres, sans idées.
La cheffe du groupe parlementaire chrétien-social, Martine Hansen, ne retrouve pas dans le budget les accents placés dans le rapport présenté mardi par le socialiste Yves Cruchten. Ce dernier, qui a réservé une large partie de son discours au PIB bien-être, à la lutte contre la pauvreté et les inégalités, a certes réussi à séduire l’opposition, mais c’est dans les chiffres qu’elle aurait préféré voir la traduction des priorités développées par le rapporteur.
Mais le quantitatif l’emporte toujours sur le qualitatif, analyse Martine Hansen en reprenant une citation de la Chambre de commerce dans son avis sur le projet de budget.
Si les caisses sont pleines, la politique est vide, résume la députée qui observe que la seule priorité du gouvernement est de poursuivre sur le même rythme de croissance au détriment de la qualité de vie des habitants. «Notre devise est « nous voulons rester ce que nous sommes » et pas « nous voulons garder ce que nous avons »», lance la députée de l’opposition.
Avec un budget de 20 milliards, elle serait déjà satisfaite si le gouvernement pouvait émettre ne serait-ce «qu’une seule idée pour chaque milliard afin d’améliorer la qualité de vie des citoyens». Mais elle soupçonne le gouvernement d’être à court d’idées, de n’avoir aucune vision, aucune priorité sinon celle de vouloir remplir les caisses. «C’est un budget économe au niveau des accents politiques», a dit la Chambre des métiers et Martine Hansen apprécie la formulation. Pour elle, ce budget n’est que le prolongement des douzièmes provisoires, le budget intermédiaire entre chaque changement de gouvernement.
La cheffe de l’opposition estime pourtant que le bien-être des gens devrait être «la priorité des priorités». Mais c’est tout le contraire qui se produit, estime-t-elle. «Ce budget se base sur une croissance soutenue, mais on ne voit aucune stratégie sur la manière d’absorber ses effets. C’est comme si vous alliez chercher un sapin de Noël de trois mètres pour le charger dans une Mini, ça ne fonctionne pas», compare-t-elle.
Mobilité, rien ne va plus
Analysant les chiffres dans le détail, relevant des incohérences dans les prévisions macroéconomiques, l’oratrice regrette amèrement que la réforme fiscale se fasse derrière des portes closes et ne se reflète pas dans les chiffres du budget ni dans le programme pluriannuel, pas plus que les mesures en faveur du climat.
Un environnement préservé mais aussi un logement abordable font partie des attentes des citoyens soucieux de leur bien-être, rappelle en substance Martine Hansen. Elle s’étonne que le budget ne reflète aucune offensive sérieuse en matière de construction de logements ou d’acquisition de terrains. Pour elle, c’est même le parent pauvre de ce budget.
Pas mieux du côté de la mobilité : «Ce budget nous permettra-t-il dans trois, quatre ou cinq ans de vivre moins d’embouteillages? Non.» Le tram ne résoudra pas tout, pas plus que les investissements dans le rail, estime-t-elle. D’ailleurs, la hauteur des investissements en général dans la mobilité ne suffit pas à suivre la croissance du pays, selon elle. Quant à la réorganisation du réseau des bus (RGTR), elle n’a encore entendu personne se dire satisfait des propositions.
Le secteur de la santé devra aussi s’adapter à la croissance démographique. Mais là encore, Martine Hansen estime que le personnel manquera cruellement. «Il y a plus de départs à la retraite que de jeunes formés et le réservoir dans la Grande Région s’épuise», observe-t-elle. Si le secteur de la santé doit en pâtir, c’est aussi le bien-être des gens qui sera menacé.
Mais pour le CSV, le point central du bien-être, c’est la famille. «Les parents n’ont plus de temps à consacrer à leurs enfants qui sont déposés à 7 h à la maison relais et récupérés à 19 h», estime Martine Hansen. Ce n’est pas l’école ou la maison relais qui remplacent l’éducation des parents et le CSV persiste dans la défense de son projet qui offre aux parents la possibilité d’élever leurs enfants à la maison.
Elle ne voit décidément rien dans ce budget qui lui donne de l’espoir pour la suite. Pour elle, c’est un budget avec des chiffres mais sans vision. Autrement dit, «C’est un budget du bien avoir, mais pas du bien-être.»
Geneviève Montaigu
ADR : «Pauvreté rime avec LSAP»
Gast Gibéryen (ADR) a été interrompu 18 fois lors de son intervention sur le budget 2020. Le député s’en est largement pris au LSAP, qui a sursauté à plus d’une reprise. Une engueulade avec Mars Di Bartolomeo est venue couronner cet épisode loin de toute analyse du budget. Gast Gibéryen a notamment reproché aux élus du LSAP «de préférer passer leur temps dans des conseils d’administration au lieu d’être au chevet des gens». «La pauvreté, qui est au plus haut, rime avec 30 ans de gouvernance du LSAP», a-t-il ajouté. L’élu a également fustigé le fait que la hausse des accises sur le carburant va en premier lieu frapper les plus démunis.
Déi Lenk : «les gens en ont assez»
David Wagner (déi Lénk) n’a pas manqué de thématiser la crise sociale. «La priorité du ministre des Finances est de plaire au secteur financier», a-t-il lancé lors de son intervention sur le budget 2020. «On dit toujours que celui qui travaille beaucoup s’en sort, mais ce n’est pas le cas», déplore-t-il. Les «vrais travailleurs» tels que les ouvriers seraient bien plus mal lotis que les cadres du secteur financier. «Désormais, la crise climatique risque d’accentuer encore la crise sociale», prédit David Wagner. «Le gouvernement est-il fini? Je ne sais pas. Mais il est clair que les gens en ont assez», conclut-il.
Pirates : «le gouvernement ne fait rien»
Inégalités sociales qui se creusent, problèmes environnementaux, explosion des prix du logement. La liste des maux énumérés par Sven Clement (Parti pirate) est longue. «Il y a du pain sur la planche. Or le gouvernement a décidé de ne rien faire», fustige le député lors de son analyse du budget 2020. Comme le CSV, il évoque un budget «sans substance».
Les pirates condamnent aussi la croissance aveugle. «Si on ne peut pérenniser notre système social que grâce à une croissance illimitée, il est peut-être temps de réfléchir à une refonte du système», lance encore Sven Clement.