À 39 ans, Nora Back s’apprête à devenir la nouvelle figure incontournable du monde syndical luxembourgeois. Fraîchement élue à la tête de la Chambre des salariés, elle aborde avec enthousiasme sa nouvelle fonction. En décembre, un autre défi majeur l’attend : la présidence de l’OGBL.
Vous avez vécu un début d’année très mouvementé avec une issue plutôt inattendue. Quel est aujourd’hui votre état d’esprit après ce premier semestre marqué par les élections sociales et, donc, votre arrivée à la tête de la Chambre des salariés?
Nora Back: C’était intense. Il est vrai que le résultat des élections sociales était inattendu. Mais, je veux encore une fois le répéter, il s’agit d’un résultat aux conséquences multiples, mais qui doit être relativisé. On avait appelé les électeurs à voter pour notre liste et non pas pour des têtes. En fin de compte, cette consigne a été largement respectée et l’on a décroché, avec l’OGBL, 92% des voix dans le groupe des « Autres services » (NDLR: Nora Back et André Roeltgen étaient tous les deux candidats dans ce groupe socioprofessionnel, l’un des neuf que compte la CSL). Moi, j’arrive première élue, mais entre moi et notre président, André Roeltgen, qui finit 2esuppléant, la différence de voix est minime. Une poignée de gens a ainsi décidé de l’issue des élections et donc aussi de l’avenir de l’OGBL et de la Chambre des salariés. Je tiens à le rappeler, car cela laisse un goût amer.
Au départ, il était en effet prévu qu’en cas de succès aux élections sociales, André Roeltgen prenne la présidence de la CSL. Jeudi, c’est vous qui avez pris les rênes du parlement du travail. Dans ces conditions, existe-t-il des appréhensions par rapport à ce mandat?
Je dois d’abord dire qu’André Roeltgen et moi-même nous sommes présentés aux élections en étant prêts à prendre nos responsabilités. Par contre, je dois avouer que dans les premiers moments qui ont suivi la publication des résultats, cela fut un choc. J’ai aussi un énorme respect pour la tâche qui m’attend désormais. Mais je ne peux pas dire que j’ai peur. C’est bien plus une joie que je ressens maintenant. Et puis c’est aussi un signe que je sois la première femme à avoir l’honneur de présider une institution comme la CSL, qui ne se résume d’ailleurs pas à ses dirigeants. Je ne suis pas seule, je ne me sens pas seule et je souhaite vraiment mettre en avant le soutien que j’obtiens d’un grand nombre de bonnes personnes hautement compétentes et d’équipes qui travaillent bien ensemble. Ils me portent, tout comme le fait la confiance qui a été placée en moi lors du scrutin, mais aussi lors de mon élection unanime à la tête de la CSL. Je pense donc être sur le bon chemin et j’ai le sentiment de pouvoir mener ma mission à bien.
Il y a deux semaines, nos confrères de Paperjam vous ont attribué le titre de « femme la plus puissante du pays ». Cela vous inspire quoi?
(Elle soupire) Ah, ce titre… J’ai du mal à le commenter. Mais en même temps c’est courageux et beau de leur part de me le décerner. Je me réjouis, en tout cas, que l’on accorde pour une fois une telle reconnaissance à la CSL, mais aussi à l’OGBL. On commence à se rendre de plus en plus compte, à l’échelle de la société, que l’on ne peut plus snober les représentants de la population active.
Vous présidez donc depuis jeudi la CSL, institution qui représente plus de 520 000 salariés et pensionnés. Comment abordez-vous ce mandat ?
Il m’importe d’honorer le travail accompli depuis 2008 par le président sortant, Jean-Claude Reding. C’est un personnage qui dispose d’une grande notoriété, qui est connu et reconnu pour son engagement. Mais son travail n’a pas toujours été visible. Pourtant, il a fait de la CSL l’institution incontournable qu’elle est aujourd’hui. Je n’ai donc pas vraiment d’autre choix que d’essayer de travailler dans la continuité de ce qui a été fait ces dix dernières années. Toute autre ambition serait démesurée. Garder ce niveau de qualité constituera mon premier grand défi. Mais cela n’empêche pas la nécessité de moderniser certains aspects.
Retrouvez l’intégralité de l’entretien avec notre journaliste David Marques dans le Quotidien du mardi 11 juin 2019.