L’OGBL compte bien imposer sa vision des choses en matière de sortie de crise. Il est crucial pour le syndicat que la crise économique issue de la crise sanitaire ne se mue pas en crise sociale.
Quatre jours après une tripartite obtenue de haute lutte, l’OGBL ne s’est pas départi de cette certitude de ne pas avoir été entièrement écouté et entendu par le gouvernement. Nora Back, la présidente du syndicat, estime ne pas avoir pu présenter la vision de sortie de crise du syndicat lors de la rencontre de samedi au château de Senningen. «Le Premier ministre et les ministres présents nous ont dit que cette vision ne faisait pas partie des priorités d’une tripartite, car le but des tripartites serait de gérer le chômage», a-t-elle indiqué mardi à l’issue du premier congrès national postconfinement de l’OGBL.
«Nous n’allons rien lâcher. Il s’agit de discussions que nous devrons mener avec les trois acteurs de la tripartite qui garantissent la paix sociale. (…) Tout est complémentaire : le pouvoir d’achat, la sécurité sociale, les prix du logement… Si nous ne considérons pas le tout, nous ne ferons rien de sérieux en faveur du maintien de l’emploi.»
Nora Back ne remet cependant pas en question la tripartite qu’elle avait elle-même appelée de ses vœux, ni les échanges et la recherche de solutions concernant le chômage. Des mesures ont été prises par le gouvernement en ce sens. «Il s’agit de décisions du gouvernement, elles ne sont pas issues d’un accord tripartite dans le sens classique du terme, souligne la présidente. Ce sont de bonnes mesures, nous les soutenons, mais elles sont insuffisantes et ne vont pas assez loin.» Union des entreprises luxembourgeoises (UEL) et gouvernement se sont engagés à se réunir rapidement avec l’OGBL au sein du Comité permanent du travail et de l’emploi pour réfléchir à des solutions plus concrètes en matière de maintien de l’emploi. «C’est un des résultats positifs de la tripartite», reconnaît Nora Back.
Contre une politique d’austérité
Logement, pouvoir d’achat, réforme fiscale… On l’aura compris, la sortie de crise envisagée par le syndicat est avant tout sociale. «Le chômage est une des principales priorités, reconnaît Nora Back. Nous devons aussi éviter les faillites et que les conditions de travail, la qualité de vie et les conditions salariales des salariés se détériorent, mais aussi faire en sorte que des dossiers politiques comme la transition écologique ne passent pas inaperçus. Le pouvoir d’achat joue pour l’OGBL un rôle crucial en matière de lutte contre le chômage et de création d’emplois.»
Le syndicat est absolument contre une politique d’austérité. Lors des précédentes crises, elle «a non seulement fait peser une charge sur les classes à revenus faibles et moyens et a creusé le fossé entre riches et pauvres, mais elle a considérablement affaibli l’État social et fortement limité les possibilités d’intervention financière des États.»
Le syndicat préconise donc une politique de relance économique basée sur un renforcement du pouvoir d’achat et la promotion de l’investissement public. «Toute autre politique conduirait à une récession économique prolongée ou à une dépression encore plus grave», précise le syndicat, qui exige notamment la réindexation immédiate avec effet rétroactif des allocations familiales qui n’ont pas été adaptées depuis 2006, plus de justice fiscale sans réductions d’impôts et la réintroduction d’un ajustement des taux d’imposition en fonction de l’évolution des prix, une réduction du budget de la défense et le retrait des projets de satellite militaire et d’avion ravitailleur ou encore un renforcement des conventions collectives de travail pour «sécuriser et renforcer les salaires».
L’action politique dans le domaine du logement est également une des priorités du syndicat dans la gestion de la crise actuelle. La situation du marché du logement au Luxembourg est plus que jamais inacceptable pour l’OGBL en ce sens que les prix pratiqués freinent le pouvoir d’achat des Luxembourgeois. Pour tenter de remédier à cette situation, le syndicat propose, entre autres solutions, d’instaurer un impôt foncier progressif. Enfin, le syndicat est d’avis que le gouvernement, pour réussir la sortie de crise, peut emprunter davantage et contracter une dette de 30 %, voire 40 %, du PIB.
Le détail du plan de sortie de crise de l’OGBL est disponible dans le prochain numéro d’Aktuell. Nora Back a promis de ne rien lâcher pour continuer à imposer la vision de son syndicat au gouvernement et l’amener à continuer à mettre en œuvre ses suggestions.
Sophie Kieffer
SES : les négociations se poursuivent
«Il faudra attendre jeudi pour en savoir plus», a indiqué Nora Back en référence aux salariés de la Société européenne des satellites (SES), qui fait l’objet d’un plan social. Le syndicat demande au gouvernement de ne pas l’accepter, malgré l’affirmation de Xavier Bettel qui le qualifiait de nécessaire. De 10 % à 15 % des 600 salariés seraient sur la sellette en raison d’une réorganisation de l’entreprise qui doit faire face au changement du marché de la télévision et des habitudes de consommation. Nora Back a promis que son syndicat faisait tout ce qu’il pouvait pour limiter le nombre de licenciements lors des négociations.