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Nationalisme vaccinal : «L’équité restera-t-elle une illusion ?»


Le vaccin anti-Covid risque de rester pour longtemps une rareté dans les pays en voie de développement. Hier, Stéphanie Empain (déi gréng) est venue sonner l’alerte à la Chambre.

À elle seule, l’UE a signé des options pour acquérir 2,5 milliards de doses du vaccin anti-Covid. Annoncée en grande pompe, la solidarité avec les pays plus démunis peine à se mettre en place.

«Personne ne sera en sécurité tant que le monde entier ne le sera pas.» Cette phrase marquante constitue le leitmotiv de la plateforme Covax. L’Organisation mondiale de la santé (OMS) et l’Alliance du vaccin (Gavi) chapeautent cette initiative qui doit assurer «un accès mondial et équitable aux vaccins». L’objectif est que 2 milliards de doses puissent être distribuées équitablement d’ici la fin 2021.

«La lutte contre la pandémie de coronavirus doit être globale. Il faut nous assurer que les vaccins seront disponibles au même moment pour tous les citoyens», souligne Stéphanie Empain. La députée déi gréng est montée mercredi à la tribune de la Chambre pour rappeler que le «nationalisme» met sérieusement en péril l’engagement pris envers les pays en voie de développement. «Je suis une personne optimiste. Or j’ai de plus en plus de difficultés à croire que la solidarité figure parmi les priorités absolues de la communauté internationale», fustige Stéphanie Empain.

À elle seule, la Commission européenne a signé des options pour 2,5 milliards de doses. «C’est suffisant pour vacciner quatre fois l’ensemble de la population des 27 États membres de l’UE.» «Trop peu, trop tard», clament toutefois une série de pays. Mercredi, la présidente de la Commission européenne a été mise sur le gril par les eurodéputés. «Nous avons été trop optimistes et sans doute trop confiants sur la livraison en temps voulu des doses commandées», s’est défendue Ursula von der Leyen. Elle promet un renforcement des capacités de production, qui vont toutefois satisfaire en premier lieu les besoins européens. L’engagement selon lequel les États membres doivent faire «don» d’une partie de leurs doses «à des pays à revenu faible ou moyen» restera encore lettre morte.

«Le marché est bloqué et les prix explosent», constate amèrement Stéphanie Empain. Dans ces conditions, les pays plus pauvres ne seraient pas en mesure de se procurer le vaccin. La conséquence : le virus continuera de se propager auprès d’une population vulnérable, avec à la clé l’arrivée de nouvelles mutations du Covid-19.

Le ministre de la Coopération, Franz Fayot, rétorque que l’équité est un principe que le Luxembourg continue à défendre. Il admet les «difficultés qui accompagnement le lancement de Covax», initiative que le gouvernement soutient avec un million d’euros. S’y ajoutent 5 millions d’euros pour l’Alliance du vaccin (Gavi). Sous peu, 3,3 % de la population de 18 pays faisant partie du réseau Covax pourra être vaccinée. «La priorité ira au personnel de santé travaillant en Afrique, en Asie et en Amérique latine», précise Franz Fayot.

Le Luxembourg est aussi en attente du mécanisme de partage des vaccins que l’UE compte mettre en place. En outre, le ministre se dit disposé à soutenir les pays cibles de l’aide à la coopération du Luxembourg. «La discussion avec la ministre de la Santé sur la redistribution du surplus de vaccin n’est cependant pas encore engagée», doit néanmoins tempérer Franz Fayot.

«L’équité restera-t-elle une illusion», s’interroge Stéphanie Empain, qui apporte elle-même une réponse : «Un échec de Covax équivaudrait à une banqueroute morale.»

David Marques

AstraZeneca a livré 2 400 doses

La ministre de la Santé, Paulette Lenert, espérait obtenir un premier contingent de plus de 11 000 doses du vaccin d’AstraZeneca. Finalement, le laboratoire n’a fourni que 2 400 doses au Luxembourg. Selon le calendrier des livraisons  publié le 1er février, le Luxembourg devrait avoir obtenu jusqu’à présent 34 800 doses du vaccin anti-Covid, dont 31 200 de BioNTech/Pfizer et 3 600 de Moderna. Les 2 400 doses d’AstraZeneca font augmenter le stock à 37 200 doses, permettant de vacciner 18 600 personnes. Le calendrier doit être actualisé dans les jours à venir.

Jusqu’à mardi soir, 18 653 doses ont été administrées. La première dose a été injectée à 14 227 personnes et 4 426 ont obtenu la seconde. La semaine écoulée, 5 198 doses ont été administrées, dont 2 008 deuxièmes doses.

Malgré tout, le Grand-Duché reste mal placé à l’échelle mondiale. En date du 7 février, 2,7 % de la population avait été vaccinée. Nos pays voisins ne sont pas beaucoup mieux lotis : France (3,3 %), Belgique (3,6 %) et Allemagne (3,8 %). Pour rappel, le Luxembourg attend 1,8 million de doses, qui permettrait de vacciner plus d’un million de personnes.