Les écoles internationales vont-elles servir de modèle au système éducatif luxembourgeois pas adapté à la situation multiculturelle du pays. L’alphabétisation en allemand ne peut plus être la seule option.
Le dernier rapport national sur l’éducation (Bildungsbericht) démontre, si besoin était encore, les inégalités persistantes du système scolaire luxembourgeois, qui réussit mieux aux enfants sans passé migratoire et à ceux dont les parents jouissent d’un statut socio-économique élevé.
Ces différences sont plus toujours plus criantes alors que «les performances des élèves ne parlant ni le luxembourgeois ni l’allemand à la maison et issus de familles socialement défavorisées ont continué de se dégrader par rapport au dernier rapport sur l’éducation publié il y a trois ans, ce dans tous les domaines de compétence analysés et indépendamment des conséquences de la pandémie».
Ce constat brutal des auteurs du rapport publié par l’université du Luxembourg et le Script ne peut qu’encourager le ministre Claude Meisch à multiplier les ouvertures d’écoles internationales publiques dont les premiers bilans sont attendus avec impatience pour faire bouger un système sclérosé.
Dans le système traditionnel, rien n’a fonctionné jusqu’à présent pour réduire ces inégalités. Au contraire, les auteurs relèvent que «le fossé social se creuse dans le système éducatif luxembourgeois, tandis que les écarts de performance entre les groupes d’élèves s’amplifient».
En cause principalement, l’alphabétisation en allemand qui handicape une bonne partie de la population scolaire. La stratégie du redoublement pour les élèves qui n’atteignaient pas le niveau dans cette langue est un échec. Des élèves développant pourtant un bon potentiel continuent d’échouer dans le système scolaire luxembourgeois.
Au cours de l’année scolaire 2019/2020, 72 % des élèves issus des catégories socio-économiques élevées ont été orientés vers l’enseignement secondaire classique, contre 16 % des élèves au statut socio-économique faible.
Pourtant, à performances scolaires égales, ces chiffres ne sont plus les mêmes. Seuls 51 % des jeunes issus de milieux favorisés seraient orientés vers le lycée classique, contre 36 % des jeunes plus défavorisés.
Les auteurs précisent que les familles ouvrières supposent souvent un risque plus élevé d’échec de leur enfant dans des filières supérieures que les familles de diplômés universitaires. «Les parents issus de couches sociales plus défavorisées visent moins souvent une voie académique, même en cas d’obtention de notes identiques.»
L’allemand plus tôt ?
Mais ce ne sont pas les décisions des parents qui influent le plus sur l’orientation, ce sont bel et bien les résultats scolaires. Pour les auteurs, il y a urgence à offrir plusieurs options de langue d’alphabétisation sur le modèle des écoles internationales.
Leur implantation pourrait s’inspirer de la carte qui dévoile commune par commune le taux d’élèves orientés vers l’enseignement classique. Elle montre clairement que ce taux est faible dans le nord du pays, dans le sud et surtout le sud-ouest et plutôt élevé dans le centre (à l’exception de la ville de Luxembourg). Les différences géographiques reflètent la diversité des conditions sociales, économiques, linguistiques et migratoires au sein du pays.
Les écoles internationales ne vont pas résoudre le problème de toute une partie de la population. Si le système s’accroche à l’allemand, il faut mettre le paquet sur son apprentissage dès le plus jeune âge. Le rapport indique qu’une analyse scientifique est en cours pour déterminer dans quelle mesure la professionnalisation et le développement continu du secteur de la petite enfance peuvent contribuer à améliorer la situation.
Sinon le système éducatif national continuera à souffrir d’un problème général au niveau de la performance et de l’égalité. La majorité de la population scolaire luxembourgeoise présente des performances générales insuffisantes.
Geneviève Montaigu
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