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MSF Luxembourg : «La prise en charge mentale des migrants est vitale»


Les migrants "ne sont souvent pas conscients d’avoir besoin d’être aidés et, dans de nombreux pays, c’est encore un immense tabou. On considère aussi que c’est du vent, voire de la sorcellerie", relate Wilma van den Boogaard. (photo Fabrizio Pizzolante)

Violences et traumatismes dans le pays d’origine, incidents sur la route, stress et abus dans les camps, attente et déconvenues dans le pays d’accueil… Du début à la fin de leur périple (quand s’arrête-t-il véritablement ?), le parcours des migrants est semé d’embûches, voire de terribles épreuves qui fragilisent chaque fois davantage leur santé mentale.

Wilma van den Boogaard est infirmière, coordinatrice médicale pour Médecins sans frontières et chercheuse opérationnelle au sein de LuxOR (Luxembourg Operational Research), l’unité de recherche opérationnelle de MSF qui participe au développement de la recherche médicale sur le terrain. Elle a mené de nombreuses missions à l’étranger, la dernière en date fut au Liban de 2017 à 2019 dans un camp palestinien où vivent de nombreux réfugiés syriens. Elle a également participé à une étude sur la santé mentale des migrants dans le camp de Moria, en Grèce. Wilma van den Boogaard témoigne des difficultés psychologiques rencontrées par ceux qui ont dû fuir leur pays d’origine et se sont retrouvés coincés dans des camps.

Quelles difficultés psychologiques rencontrez-vous chez les migrants ?

Je ne suis pas psychiatre, je ne peux donc pas poser de diagnostic et parle toujours de symptômes traumatiques. Mais que ce soit au Liban, où j’ai travaillé, ou en Grèce, où j’ai fait des recherches, on se rend compte que l’histoire personnelle et les raisons pour lesquelles les personnes ont fui leur pays sont déjà en arrière-plan lorsqu’elles se retrouvent dans des camps. Ce qui domine à ce moment-là, c’est le stress du quotidien. Car les migrants se retrouvent coincés des mois, voire des années, dans des situations qui ne devaient être que temporaires. En outre, ils y accumulent constamment du stress : comment avoir de l’eau ? De la nourriture ? Se laver ? Comment garantir la sécurité de sa femme, de ses enfants ? En effet, il y a des vols, des viols, des incendies dans ces camps.

Les migrants viennent-ils aisément solliciter une aide psychologique ?

Ils ne sont souvent pas conscients d’avoir besoin d’être aidés et, dans de nombreux pays, c’est encore un immense tabou. On considère aussi que c’est du vent, voire de la sorcellerie. Il y a donc souvent une méconnaissance à ce sujet. Par exemple, lorsque des enfants se remettent à faire pipi au lit ou montrent un comportement antisocial, on va le percevoir comme étant le fait d’un enfant difficile. Nous devons donc sensibiliser les adultes à ces questions, leur expliquer qu’en fait l’enfant a besoin de sécurité. Or les camps sont très hostiles pour eux. Au Liban, il n’y a pas trop de problèmes pour les tout-petits, tout le monde s’occupe d’eux. Mais les adolescents sont vulnérables, notamment avec la drogue. Par contre, dans le camp de Moria, des enfants sont violés et lorsqu’une ...


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