La Ville de Luxembourg aurait pu être à l’avant-garde, si le collège échevinal «n’avait pas laissé passer des chances». À presque mi-mandat, déi gréng font opposition aux idées de la majorité.
Le courant passe difficilement entre ces occupants du banc de l’opposition à Luxembourg et l’équipe en place. Depuis deux ans, déi gréng auraient du mal à se faire entendre par le DP et le CSV. Le parti se sent laissé sur la touche et en veut au conseil communal de ne pas avoir saisi toutes les opportunités pour faire de la capitale luxembourgeoise, une ville «durable, d’avenir et agréable à vivre pour ses habitants». Il ne serait pourtant pas trop tard pour faire changer les choses, «la Ville en a les moyens matériels et financiers», estime François Benoy, chef du groupe déi gréng au conseil communal de la capitale, ne manquerait que l’envie politique.
De nombreux grands projets ont été réalisés à Luxembourg ces dernières années, d’autres, comme le tram, sont en cours et d’autres vont suivre. Difficile donc de croire en l’inertie ou en un manque d’ambition des édiles et d’une bourgmestre totalisant 24 ans d’expérience de la fonction. À travers trois grands axes, déi gréng Stad ont tenté de démontrer, hier lors d’une conférence de presse, que le conseil communal avait «évité les défis».
À commencer par ceux en matière de mobilité. Alors que d’ici quatre mois le tram et une piste cyclable attenante traverseront la ville du nord au sud, il serait «largement temps de prendre l’initiative de relier les quartiers à la piste cyclable» pour encourager et accompagner le recours à une mobilité différente. En parallèle, explique François Benoy, «il serait temps de créer plus d’espaces pour les piétons et les cyclistes dans les quartiers». Déi Gréng Stad auraient depuis ces dernières années émis de nombreuses propositions en ce sens, comme celle, par exemple, de freiner le trafic automobile dans la rue Pasteur pour rendre les trajets vers les commerces et les restaurants plus agréables pour les riverains et leur permettre de rejoindre plus aisément la piste cyclable. «Nous demandons à ce qu’une analyse soit réalisée pour chaque quartier sur la manière d’y améliorer la mobilité et de les relier au centre-ville grâce à cette nouvelle piste cyclable», annonce le député. Un des premiers aménagements à réaliser serait d’étendre la zone piétonne en centre-ville, notamment en y incluant définitivement la rue du Fossé. Une motion en ce sens sera déposée lors du prochain conseil communal.
« On ne peut pas favoriser tous les moyens de transport à la fois »
Pour déi gréng Stad, les édiles n’iraient pas assez loin dans leurs actions. La rue Beaumont, la rue Notre-Dame et la place des Bains devraient elles aussi devenir des zones mixtes. «Des priorités doivent être déterminées. On ne peut pas favoriser tous les moyens de transport à la fois, insiste François Benoy. Nous avons besoin d’une politique conséquente en matière de mobilité active et nous devons profiter du regain d’affection pour le vélo qu’a engendré la crise.»
Si la Ville devait choisir de privilégier ce type de mobilité, elle devrait également, selon les verts, permettre aux enfants de se rendre à l’école ou au foyer scolaire de manière autonome et en toute sécurité. «Les rues doivent être adaptées en particulier autour des écoles», estime la conseillère communale Christa Brömmel. Ces aménagements devraient être systématiques, notamment en cas de travaux, mais le collège échevinal n’en aurait pas le réflexe. Les panneaux de signalisation au moment de la rentrée scolaire seraient insuffisants. «Nous avons demandé au moment des discussions sur l’organisation scolaire qu’un concept de mobilité soit élaboré pour chaque quartier en partenariat avec les acteurs concernés», poursuit la conseillère communale.
Tant qu’à aménager les chemins et les abords des écoles, autant en profiter pour réaménager les cours de récréation – certaines ressembleraient à des cours de prison, dixit la conseillère communale. Un autre chantier à prendre en main concerne l’école publique qui ne serait plus fréquentée que par la moitié des écoliers de la capitale. Il serait donc grand temps de remédier à ce désamour qui aurait un impact sur la cohésion sociale et sur le trafic routier.
On en revient à la mobilité et à l’écologie, thématiques chères au parti politique. C’est pourquoi il n’hésite pas à rappeler à l’ordre le collège échevinal en la matière. Ce dernier n’aurait pas tenu ses engagements en lien avec la convention des maires pour le climat et l’énergie, en n’établissant pas de plan d’action pour 2020 et 2030, l’assainissement énergétique des immeubles communaux tarderait à venir, de même que l’installation de cellules photovoltaïques sur leurs toits… La liste est encore longue, selon déi gréng, qui commencent à douter de l’importance que revêt la protection climatique aux yeux du collège échevinal. «Nous avons profité des débats budgétaires en décembre 2019 pour introduire une motion en la matière. Elle n’a jusqu’à présent reçu l’avis d’aucune commission», regrette Linda Gaasch.
Attendus au tournant
Peut-être est-ce lié à la pandémie de Covid-19 qui a détourné les institutions et administrations de leurs objectifs? Déi Gréng Stad ne veulent pas considérer le virus comme un frein, mais comme un encouragement à innover et à créer. «La pandémie actuelle montre à quel point il est important de mettre en place des mesures de protection du climat et de l’environnement afin de réduire les effets d’éventuelles crises à venir et de garantir la qualité de vie de chacun en renforçant les cohésion de la société, note Claudie Reyland, la coprésidente du groupe. Nous attendons des responsables de la Ville de Luxembourg qu’ils mettent en place des projets innovants, participatifs et durables.»
Le groupe écologiste au conseil communal annonce la couleur. Le collège échevinal aura intérêt à bouger sinon il se heurtera «au plus grand parti d’opposition au conseil communal pendant les trois prochaines années à venir».
Sophie Kieffer