L’ «Observatoire des discriminations 2020», le nouveau sondage du Centre pour l’égalité de traitement, montre que les victimes en souffrent, mais qu’elles sont aidées.
Le Centre pour l’égalité de traitement (CET) vient de publier son nouveau sondage «Observatoire des discriminations » alors que le racisme a été un thème d’actualité cette année dans le monde avec le mouvement «Black Lives Matter», comme le rappelle Nathalie Morgenthaler, la directrice du CET. «La pandémie a également accentué les discriminations», selon elle.
Le sondage réalisé par TNS Ilres auprès d’un échantillon de 1 014 personnes montre que 20 % des résidents déclarent avoir été victimes d’au moins une discrimination au cours des trois dernières années, contre 26 % en 2015. Ce léger recul permet au président du CET, Patrick Hurst, de conclure que les efforts déployés en vue de sensibiliser la population aux problèmes liés à la discrimination porte ses fruits et qu’il faut continuer dans cette voie.
Mais n’en demeure pas moins que ce pourcentage correspond à un chiffre absolu de 103 900 résidents âgés de plus de 16 ans. C’est toujours la nationalité qui arrive en tête des motifs de la discrimination pour 46 % des victimes, puis le sexe et les compétences linguistiques. La discrimination liée à la couleur de la peau concerne 12 % des victimes.
Alors que 79 % des victimes déclarent toujours souffrir de l’expérience, seulement 10 % ont porté plainte et presque un tiers n’a rien entrepris. Parmi celles qui n’ont rien fait, 39 % estiment que de toute façon une plainte n’aurait rien changé. Les souffrances se traduisent par méfiance et repli sur soi pour 35 % des victimes, aigreur et frustration pour 33 % et sensation de peur pour 19 %.
Seuls 44 % affirment que la discrimination a disparu. «Cela signifie que 56 % en souffrent toujours», précise Tommy Klein, de TNS Ilres.
Une «évolution positive»
Avez-vous été témoin d’une discrimination ces trois dernières années? À cette question, 27 % ont répondu par l’affirmative. Pour 59 %, c’était lié à la nationalité, pour 54 % à la couleur de la peau ou à une discrimination ethnique, 37 % au sexe/genre et encore 29 % disent que la discrimination était liée à l’orientation sexuelle. Les souffrances sont toujours présentes pour 59 % de ces victimes, mais 41 % des témoins avouent ne pas savoir si la victime souffre toujours ou pas. Quoi qu’il en soit, 57 % des témoins ont aidé la personne discriminée, contre 10 % qui n’ont pas réagi du tout. «Alors qu’en 2015, 14% disaient avoir aidé la victime et 40 % estimaient n’avoir rien fait. On constate donc une évolution positive de la volonté de soutenir les victimes et une baisse de l’acceptation des actes discriminatoires», relève encore Tommy Klein.
Les personnes interrogées se sont également exprimées sur le degré de gravité de différents exemples de discriminations. Une personne noire empêchée d’entrer dans une discothèque et un couple d’homosexuels empêchés de réserver un voyage sont parmi les actes de discrimination les plus graves (94 %) par rapport au refus d’un logement pour cause de religion musulmane (88 %) ou un logement inadapté pour les personnes handicapées (87 %), un salaire inégal pour les femmes (85 %) et les sorties interdites et surveillées des pensionnaires d’une maison de retraite (65 %).
«L’appréciation de ce qui constitue une discrimination est restée relativement stable par rapport à 2015. Le même constat vaut pour l’évaluation quant à une augmentation ou diminution des discriminations pour différents domaines» note le représentant de TNS Ilres.
Changer la loi
Cette étude révèle quand même qu’un résident sur cinq a été victime d’une discrimination au moins une fois ces trois dernières années. Plus souvent des femmes, des jeunes entre 15 et 35 ans. «Dans la cour d’école, les discriminations sont très fortes», observe Tommy Klein.
Le président du CET, Patrick Hurst, estime que les résultats de ce quatrième sondage indiquent que le CET doit poursuivre ses efforts. Mais le CET doit disposer de plus de moyens humains et cette demande a déjà été formulée maintes fois.
Le CET, qui est rattaché depuis 2017 à la Chambre des députés, et l’ensemble des partis admettent qu’il doit se développer vu son rôle important dans la lutte contre les discriminations. Pour l’heure, il a pu embaucher une personne spécialisée dans la communication, un community manager qui relaie sur les réseaux sociaux les missions et les messages du CET. «Nous avons proposé d’avoir trois postes supplémentaires pour doubler notre équipe», précise le président.
Parmi les vieilles revendications du CET demeure celle de pouvoir ester en justice. «Mais pour cela, il faut changer la loi», conclut Nathalie Morgenthaler, la directrice du centre.
Geneviève Montaigu