Un nouveau paquet législatif vise à réformer de fond en comble les aides au logement, datant de 1979. L’objectif est notamment de dynamiser la création de logements abordables.
Ce fut une erreur d’attendre 40 ans avant de réformer la loi sur l’aide au logement.» Le ministre Henri Kox est passé à l’offensive, hier, en présentant le paquet législatif qui doit venir «pérenniser et ancrer le changement de paradigme» entamé dans la politique du logement du Grand-Duché.
L’exercice s’annonce périlleux au vu de la situation d’urgence sur le marché avec une explosion des prix de 14 % sur la seule année de 2020. Une cause de la pénurie de logements abordables : «Les logements subventionnés par l’État ont été perdus au fil des années en raison de la revente des biens sur le marché privé.»
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Le gouvernement en place, crédité jusque-là d’une mauvaise note dans le domaine du logement, veut définitivement mettre fin à ces pratiques en créant un «parc de logements durablement abordables». «L’objectif n’est plus de disposer d’un parc de 3 ou 4 % de logements en main publique, mais de passer à 10 ou 15 %, comme cela est le cas en Allemagne ou en France. Les Pays-Bas pointent à 30 %. À Vienne, 60 % de la population vit dans des logements subventionnés, mais l’exercice a commencé il y a 100 ans déjà», développe le ministre du Logement, Henri Kox.
Le revenu comme pierre angulaire
Pour enfin offrir à un nombre bien plus élargi de personnes à se loger tout en pouvant continuer à vivre dignement, principe inscrit dans la Constitution révisée, il est prévu de réformer de fond en comble l’aide au logement, datant de 1979.
Le paquet législatif, présenté hier à la Chambre des députés, est composé de deux textes distincts : un premier pour subventionner davantage la construction de logements abordables (voir ci-dessous) et un second visant à élargir et simplifier les aides individuelles.
Les deux régimes ne sont pas cumulables : les «aides à la pierre» sont accordées aux promoteurs sociaux (Fonds du logement, Société nationale des habitations à bon marché, communes, fondations et ASBL) tandis que les aides individuelles sont réservées aux personnes qui cherchent à se loger par le biais du marché privé.
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Le revenu va venir jouer un rôle clé pour bétonner le droit au logement. «Nous allons mener une politique du logement ciblée sur ceux qui ont les plus grandes difficultés à se loger tout en garantissant qu’ils puissent continuer à vivre dignement», résume le ministre Kox. Jusqu’à 50 % de la population résidente doit ainsi devenir éligible pour accéder à un logement locatif abordable, construit et géré par la main publique.
L’autre volet majeur de la réforme consiste à rendre plus simple et généreux les aides individuelles au logement, destinées aussi bien à la location qu’à l’acquisition d’un logement sur le marché primaire. Ici, entre 50 et 100 % de la population peut être éligible sur base de son revenu.
La taxe sur la spéculation annoncée pour l’été
La grande priorité reste toutefois la création d’un plus grand nombre de logements abordables, avec le concours des entreprises de constructions privées. Par contre, les promoteurs privés sont tenus à l’écart.
«L’idée n’est pas de subventionner les promoteurs privés afin que ces derniers puissent réaliser d’énormes plus-values», précise le ministre du Logement. Pour profiter du soutien étatique, les acteurs privés sont appelés à constituer une Société d’impact sociétal (SIS), sans possibilité de réaliser de plus-value sur les logements construits.
La réforme de l’aide au logement, qui ne devrait pas être votée avant 2023, s’intègre dans un plan d’action plus global comprenant le Pacte logement 2.0 conclu entre État et communes, mais aussi la réforme de l’impôt foncier, combinée à une nouvelle taxe sur la spéculation visant à mobiliser des terrains non construits. Ce projet de loi attendu de pied ferme «doit être prêt à l’été», annonce Henri Kox.
Les aides individuelles en bref
GARANTIE LOCATIVE Jusqu’à 50 % des résidents seront éligibles pour cette aide. L’État se porte garant pour financer la garantie locative (3 mois de loyer maximum).
SUBVENTION DE LOYER Même principe : 50 % des résidents pourront profiter de cette aide à la location, qui varie actuellement entre 130 et 300 euros.
GARANTIE D’ÉTAT Entre 75 et 80 % de la population est éligible pour cette aide visant à accéder à la propriété. Jusqu’à présent, la garantie porte sur la partie du prêt qui dépasse les 60 % du coût total de l’investissement. Ce plafond sera augmenté d’un tiers.
PRIME D’ACCESSION Entre 40 et 60 % des résidents seront éligibles pour cette prime d’accession à la propriété. Plus de familles avec enfants doivent pouvoir en profiter (au moins 33 %). Actuellement, la prime varie entre 250 et 9 700 euros.
PRIME D’ÉPARGNE Jusqu’à 40 % de la population devient éligible pour cette prime qui représente 10 % de l’épargne annuelle (maximum de 500 euros par an et de 5 000 euros sur dix ans).
SUBVENTION D’INTÉRÊT Jusqu’à 40 % de la population pourra bénéficier d’un montant maximal à subventionner de 200 000 euros. Un forfait de 10 000 euros s’ajoute par enfant en charge (plafond global de 240 000 euros).
LOGEMENT INTÉGRÉ La création d’une nouvelle unité d’habitation au sein d’un logement existant est dotée d’une prime de 10 000 euros.
RÉNOVATIONS Des subventions d’intérêt et primes sont prévues pour des travaux d’amélioration, d’aménagements spécifiques ainsi que les rénovations énergétiques (maximum de 100 000 euros par logement).
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