Canettes, mégots, chewing-gums : les détritus laissés sur les chemins ou au bord des routes ont un impact direct et grave sur les animaux qui les ingèrent. Une campagne est lancée.
Jeter ses déchets sur un sentier pédestre ou par la fenêtre de sa voiture ne fait pas que polluer la nature : ce geste tue aussi des animaux, et notamment les bovins. Les animaux qui pâturent à proximité ingurgitent, en effet, ces débris de plastique, aluminium, verre ou métal, avec des conséquences parfois fatales. Ce phénomène, appelé «maladie des déchets», est tristement connu des éleveurs qui, chaque année, peuvent ainsi perdre plusieurs bêtes.
C’est pourquoi, à l’initiative du Service jeunesse de la Centrale paysanne, la campagne nationale «Däin Offall mécht mech doudkrank – gehei näischt an d’Natur» (Tes ordures me rendent malade – Ne jette rien dans la nature) est aujourd’hui lancée.
«Sur notre exploitation, on a souvent des vaches qui tombent malades à cause de ça. On en perd une vache tous les deux ans environ, mais pour certains collègues c’est plus», s’agace Joe Biver, agriculteur et producteur laitier depuis 12 ans, à la ferme familiale Biver-Haan de Kehlen, qui compte 300 bêtes dont 75 laitières. Avec le temps, il a appris à reconnaître les signes de cette «maladie» insidieuse : «Soudain, la vache ne donne plus de lait, refuse de s’alimenter, perd beaucoup de poids, et a des soucis digestifs. Quand c’est une infection, on peut la traiter, mais si un morceau de métal ou de verre a causé des plaies internes, on ne peut plus rien pour elle.»
Un pic d’incivilités en lien avec le Covid
En ingérant des éléments en plastique, l’animal risque une accumulation dans sa panse et une inflammation locale, tandis que le métal fend les tubes digestifs, perfore les poumons, voire le cœur. En cela, le pâturage «libre» présente moins de danger que l’herbe fauchée par l’agriculteur pour en faire du foin ou de l’ensilage. Malgré les précautions, des aimants sur les faucheuses et dans la panse des animaux pour agréger les particules de métal, il est presque impossible d’éviter les autres débris.
Selon la Centrale paysanne, qui relaye cette préoccupation majeure du secteur agricole, le problème s’est accru ces derniers mois : la crise liée au Covid a suscité un véritable engouement pour les randonnées pédestres et autres activités nature, provoquant un pic d’incivilités le long des chemins et zones de pâturage.
Le danger vient aussi des chiens
Autre danger pour les bovins, un parasite (le Neospora) présent dans les selles de certaines races de chien. «On pourrait croire que les excréments de chien en pleine nature ne posent pas de problème particulier, poursuit Joe Biver, mais pour les éleveurs, cela fait partie des déchets problématiques. Ce parasite provoque des avortements chez les vaches en gestation et ce, même à un stade avancé. Rien que cet hiver, j’en ai eu trois.»
La campagne de sensibilisation auprès du grand public, cofinancée par les ministères de l’Agriculture et de l’Environnement, va se poursuivre ces prochaines semaines. Rappelons que l’action de jeter ou d’abandonner un déchet dans la nature est illégale et passible d’une amende allant de 145 euros (pour un mégot sur un trottoir) à 250 euros (pour des détritus dans un cours d’eau).
Christelle Brucker
Au Luxembourg, d’après la plus récente étude de l’administration de l’Environnement (2015), l’abandon sauvage de détritus dans la nature, c’est : – 103 kg de déchets par kilomètre le long des routes nationales (contre 89 en 2008) et 216 kg le long des autoroutes (309 en 2008) – 1,2 million d’euros investis chaque année pour le nettoyage le long des voies nationales et autoroutes à charge de l’État – 18% de canettes métalliques (sur le volume total collecté), 15% de bouteilles en plastique, et 29% de déchets divers issus du plastique L’étude sera reconduite entre la fin de cette année et le printemps 2022.En chiffres