La récente série de collisions entre cyclistes et voitures, avec deux blessés graves à la clé, inquiète les amateurs de deux-roues. L’association ProVelo.lu évoque «une évolution effrayante» et dénonce un manque de respect entre usagers de la route.
Le choc a été violent. Le désarroi et l’inquiétude restent importants. Il y a tout juste une semaine, la cycliste professionnelle Claire Faber a percuté une voiture à l’entrée d’Esch-sur-Alzette. La collision s’est produite à l’intersection entre la rue de Rumelange et la rue des Noyers. Claire Faber a été grièvement blessée à la mâchoire, aux côtes et à une clavicule.
Mercredi, c’était au tour d’un autre cycliste de subir de graves blessures après avoir été renversé par une voiture au rond-point Raemerich, toujours à Esch-sur-Alzette. Deux jours plus tôt, un autre cycliste avait été victime d’un accident à Mondercange.
Comment expliquer cette accumulation d’accidents graves ? «Aussi bien nous en tant que cyclistes que les automobilistes avons des obligations à respecter. Or nous constatons que le respect mutuel et la prudence ne cessent de diminuer», affirme Jo Klein, membre et porte-parole de l’association ProVelo.lu. Il ne veut pas imputer toute la responsabilité aux conducteurs de véhicule motorisé. «Mais il faut être conscient qu’en cas d’accident, les cyclistes risquent directement des blessures. Ils ne disposent pas d’un châssis pour se protéger», souligne Jo Klein. S’y ajoute un nombre d’amateurs de vélo qui ne cesse d’augmenter depuis le début de la pandémie de coronavirus. «Les novices ne respectent pas toujours les règles de sécurité qui sont nécessaires pour éviter au mieux les accidents», note notre interlocuteur.
Les agressions se multiplient
D’une manière plus globale, ProVelo.lu constate une «évolution effrayante» à bien des niveaux. Les accidents ne sont pas le seul fléau. Les cyclistes se font aussi de plus en plus souvent insulter, voire agresser par des automobilistes. «Je ne sais pas à quoi est due cette confrontation. Les conducteurs ont-ils peur de perdre de la place sur les routes ?», s’interroge Jo Klein. Il fait état d’automobilistes qui klaxonnent, font vrombir leur moteur une fois le cycliste doublé ou des chauffeurs qui activent le lave-glace pour irriter le cycliste. «Le plus fréquent est le non-respect d’une distance suffisante lorsque la voiture s’apprête à dépasser un cycliste», reprend-il. Le 2 avril, un SUV est ainsi venu frôler un cycliste entre Clemency et Bascharage avant de commettre un délit de fuite.
La campagne de sensibilisation et de prévention officiellement lancée hier par la police, en association avec ProVelo.lu, tombe donc à point nommé (lire ci-dessous). «Jusqu’à présent, les cyclistes ne faisaient pas partie des campagnes ciblées de la police», déplore Jo Klein. Le constat dressé par les forces de l’ordre est identique à celui de l’association s’engageant pour une meilleure protection des cyclistes : le respect mutuel fait trop souvent défaut.
Le nombre croissant d’amateurs de deux-roues se répercute aussi dans les statistiques des accidents de la route. «À travers l’Europe, le nombre de blessés et de morts sur les routes reste généralement stable. Cela ne vaut cependant pas pour les cyclistes. Les proportions changent», indique Pascal Peters, le directeur central de la police administrative. Il existerait une grande inconnue sur le nombre réel de cyclistes blessés. Chaque chute ou accident n’est en effet pas signalé à la police.
Morts sur les routes : 12 % sont des cyclistes
Par contre, «il faut constater que 12 % de toutes les victimes de la route de 2020 sont des cyclistes. S’y ajoutent 16 % de piétons et 27 % de motards», énumère Pascal Peters. Le pourcentage est effrayant. Le chiffre absolu sera dévoilé la semaine prochaine lors d’une conférence de presse du ministre de la Mobilité, François Bausch. Il est cependant déjà connu que la route a fait 26 morts en 2020. Si on fait le calcul, trois cyclistes auraient donc trouvé la mort l’an dernier. «Il ne s’agit cependant pas forcément de collisions avec des voitures», précise Pascal Peters.
«Nous avons besoin d’un effort collectif pour que chacun puisse trouver sa place sur la route», souligne le ministre de la Sécurité intérieure, Henri Kox. Le chemin risque toutefois d’être encore long. «Les réactions que nous recevons à nos communications et messages de sensibilisation sont très effrayantes. Bon nombre d’automobilistes estiment que les cyclistes n’ont pas le droit de rouler sur la chaussée», termine Jo Klein. Les cyclistes sont bien meurtris dans leur chair.
David Marques