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Luxembourg : la garde-robe équitable s’étoffe


En blouse de travail, le jeune artiste Edsun a livré une émouvante performance en hommage aux victimes du Rana Plaza. (photo Julien Garroy)

La campagne «Rethink your clothes» pointe les ravages humains et environnementaux de la «fast fashion» et veut développer l’offre de textile équitable au Luxembourg.

«Jusqu’à quand va-t-on encore penser que cinq euros est le juste prix à payer pour un t-shirt qui nécessite 140 étapes de fabrication, de la production du coton jusqu’aux coutures finales ?», interroge la directrice de l’ONG Fairtrade Lëtzebuerg, Geneviève Krol. Aux côtés de Caritas, l’association a été mandatée, cette année encore, par le ministre de la Coopération et de l’Aide humanitaire pour porter la campagne «Rethink your clothes» avec un double objectif : renforcer la prise de conscience des consommateurs quant à l’impact de leurs achats, et développer l’offre textile fairtrade au Grand-Duché.

Huit ans tout juste après la catastrophe du Rana Plaza au Bangladesh, qui avait fait 1 134 morts et 2 500 blessés, Jean-Louis Zeien, président de Fairtrade Lëtzbuerg, constate des avancées et veut croire en un changement plus profond : «Alors qu’à l’époque on trouvait très peu de vêtements issus du commerce équitable, aujourd’hui de nouvelles marques émergent comme Dedicated en Suède ou Melawear en Allemagne pour ne nommer que celles-ci, en adéquation avec les attentes des nouvelles générations.» Au-delà de cette nouvelle offre, l’ONG plaide pour que davantage de distributeurs rejoignent le mouvement – seuls 25 points de vente proposent actuellement des vêtements ou accessoires fairtrade au Luxembourg, et va plus loin, en soutenant la création et la confection 100% luxembourgeoise. «Dans l’atelier d’Eva Ferranti à Bascharage, le tout premier pyjama entièrement fabriqué au Luxembourg à partir de coton équitable indien est en train de voir le jour, tandis qu’à Esch, l’upcycling de l’écovillage BENU, dirigé par Georges Kieffer, a beaucoup de succès.»

Les Luxembourgeois sont prêts

L’upcycling, qui consiste à récupérer des vêtements pour en créer d’autres, est un moyen de se mettre en mode «économie circulaire» sans pour autant s’habiller fairtrade des pieds à la tête. Autres pistes : faire durer davantage ses habits simplement en en prenant soin, en les réparant, en les donnant ou en les échangeant. On peut aussi acheter moins en stoppant les achats impulsifs et en optant pour des articles de seconde main. Un phénomène qui s’est d’ailleurs répandu ces derniers mois à la faveur de la crise sanitaire : «A voir si ça perdure!», lance Jean-Louis Zeyen.

En tous cas, pour lui, les Luxembourgeois sont prêts : «Aujourd’hui déjà, pour de nombreux produits labellisés fairtrade, on ne parle plus de niche, alors qu’ils étaient encore étiquetés comme tels il y a quelques années. La banane équitable, c’est 35% de parts de marché au Luxembourg, les fleurs, notamment les roses, 29%, le café, 11%, le cacao, 4,5%.» Des chiffres qui placent le pays à la sixième place mondiale en ce qui concerne la consommation de produits issus du commerce équitable, les Suisses occupant le haut du tableau.

Et pour que le textile parvienne un jour à ces jolis scores, Franz Fayot, ministre de la Coopération et de l’Aide humanitaire, a un plan : «Il faut créer tout un écosystème, en augmentant la demande pour ces produits. Nous devons donc inciter les citoyens à consommer de manière responsable, mais aussi les entreprises, institutions et administrations publiques, à acheter des uniformes fairtrade, comme Post l’a déjà fait.» Pour bénéficier de conseils sur ce point, les professionnels pourront se rendre au local que Caritas ouvrira en ville dans les prochaines semaines : un lieu dédié au textile équitable, avec notamment des ateliers de couture et une expo-vente de créateurs engagés.

Christelle Brucker

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