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Luxembourg : «La faillite d’une commune est exclue»


La ministre socialiste Taina Bofferding ne s’est pas privée d’attaquer de manière frontale le CSV, qui affirme sans, selon elle, aucune base chiffrée que «les communes se trouvent au bord de l’asphyxie». (photo Hervé Montaigu)

La ministre de l’Intérieur, Taina Bofferding, est montée au créneau, vendredi, pour réfuter tout risque financier majeur pour les communes. Le Covid n’a pas provoqué l’hémorragie redoutée.

Oui, les finances communales ont souffert de la crise sanitaire. «Mais la situation n’est de loin pas si dramatique que d’aucuns l’ont voulu faire croire», martèle Taina Bofferding. Cette conclusion, la ministre de l’Intérieur l’a rappelée à plusieurs reprises, vendredi, au moment de présenter le premier bilan détaillé de l’impact de la pandémie de coronavirus sur la trésorerie des 102 communes du pays.

L’État leur a reversé en 2020 une enveloppe de 2,1 milliards d’euros, soit quelque 210 millions d’euros de moins que les 2,3 milliards inscrits dans le budget initial datant du mois d’octobre 2019. «Je rappelle qu’à la sortie du premier confinement, en mai 2020, l’estimation portait sur une perte de 418 millions d’euros», note Taina Bofferding. Si le gouffre reste important, il a pu être diminué de moitié.

Bon nombre d’autres indicateurs démontrent que la casse a pu être limitée (lire encadré). «Au vu de ces chiffres, je ne peux que m’étonner que certains élus du CSV continuent de marteler sans cesse que les communes se trouvent au bord de l’asphyxie. Le problème est clairement conjoncturel et non pas structurel», s’indigne la ministre de l’Intérieur. Elle vise ouvertement le «catastrophisme», le «conservatisme» et les «ressentiments personnels» affichés par «certains» députés-maires chrétiens-sociaux, dont Michel Wolter, un de ses prédécesseurs au poste de ministre de l’Intérieur.

Le syndicat des communes (Syvicol) en a aussi pris pour son grade. En réaction aux propos tenus vendredi, le Syvicol précise, par voie de communiqué, ne pas «contester les constats» dressés par la ministre. Mais ajoute que «l’effet de la crise ne se limitera pas à l’exercice 2020». Le syndicat redoute que les communes puissent perdre jusqu’à un milliard d’euros d’ici 2023. «Je ne veux pas embellir les choses. Avec le ministre des Finances, nous nous sommes toutefois efforcés de stabiliser les finances publiques et d’éviter des conséquences négatives aux communes», reprend Taina Bofferding.

«La situation de départ était solide»

La réforme des finances communales, qui date de décembre 2016, aurait aussi largement contribué à la résilience des communes en cette période de crise. Un rapport d’évaluation de la Banque centrale du Luxembourg (BCL) en arrive à la conclusion que les objectifs de cette réforme – finalisée au bout de 30 ans de blocages et toujours contestée par le CSV – ont été atteints. «Les finances communales ont pu être stabilisées grâce au mécanisme de redistribution des fonds reposant sur l’équité et la stabilité», souligne la ministre. Une enveloppe supplémentaire de 90 millions d’euros est distribuée tous les ans. «Grâce à cette réforme, la situation de départ était très solide, un fait qui a aussi tendance à être passé sous silence», déplore encore Taina Bofferding, qui ajoute que «personne ne s’est plaint» des transferts record de 209 et 208 millions d’euros enregistrés en 2018 et 2019.

Le ministère de l’Intérieur s’est aussi doté d’une nouvelle équipe d’experts, qui ont mis en place un système de surveillance de l’évolution des finances communales. Dès le moindre écart, le ministère prend contact avec la commune concernée. Ce mécanisme vient se joindre aux freins ancrés dans la loi communale, qui interdit aux édiles de dépasser les bornes. Contrairement à ce qui peut se produire aux États-Unis, «une faillite est exclue. Les communes restent à tout moment opérationnelles.»

David Marques

Les dégâts ont pu être limités

LIQUIDITÉS La manne financière des 102 communes du pays a connu une baisse assez substantielle à l’automne dernier. Le recours aux réserves explique ce phénomène. Aujourd’hui, le niveau des liquidités est revenu au niveau de janvier 2020 (plus de 2 milliards d’euros).

RECRUTEMENT La crise sanitaire n’a pas freiné le recrutement de personnel. L’année 2020 s’est soldée par une hausse de 4,5 % de l’emploi salarié (14 792 personnes contre 14 156 en 2019). Pour cette année 2021, un recrutement supplémentaire de 3 % est prévu.

INVESTISSEMENTS Les investissements en capital ont, eux aussi, augmenté de 4,5 % par rapport à 2019. Le montant global affiche 1 137 millions d’euros. Il doit passer à 1 235 millions d’euros en cette année 2021 (+8,7 %).

DETTE Entre 2017 et 2019, les emprunts contractés ont fortement diminué. De 145 millions d’euros en 2017, on est passé à 94 millions d’euros en 2018 (-35 %) et à 52 millions d’euros en 2019 (-44,2 %). En toute logique, les emprunts sont nettement repartis à la hausse en 2020 (+143,8 %) pour atteindre 128 millions d’euros.